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Actualités - INTERVIEWS

Benita Ferrero-Waldner à l'Orient Le Jour : des missions autrichiennes spécialisées attendues dans les prochains mois à Beyrouth (photo)

La visite que Mme Benita Ferrero-Waldner, ministre d’Etat autrichien aux Affaires étrangères, vient d’effectuer au Liban a jeté les bases d’une nouvelle étape dans les relations entre Vienne, qui présidera l’année prochaine l’Union européenne, et Beyrouth qui, à travers la conclusion d’un accord de partenariat avec l’UE, aspire à consolider ses rapports avec l’Europe. Et c’est avec des idées bien précises sur les secteurs dans lesquels la coopération austro-libanaise se concrétisera en matière économique, que Mme Ferrero-Waldner a regagné hier Vienne où elle doit communiquer aux organismes autrichiens — qui assureront le suivi de sa mission de quatre jours au Liban — les résultats de ses entretiens dans la capitale libanaise.
Mais sa visite au Liban, comme elle l’a souvent répété durant son séjour, avait un deuxième objectif, politique, en rapport essentiellement avec le processus de paix, qu’elle ne voit pas réalisée dans un proche avenir.
Lorsqu’elle parle des pourparlers de paix avec Israël, Mme Ferrero-Waldner n’hésite pas à souligner qu’ils seront «très longs». Elle se réfère essentiellement aux propos d’une «importante personnalité» qu’elle ne souhaite pas nommer et affirme ainsi ne pas exclure que le premier ministre israélien «pousse loin son dialogue» avec les Arabes, «dans le cadre toutefois d’un processus long et lent, pour avoir le temps de préparer ses partisans» du Likoud.
«Nous avons entamé de nouveau un dialogue politique avec le Liban et nous essayons en même temps de relancer les relations austro-libanaises dans le domaine du commerce et de l’économie»: c’est en ces termes que le ministre résume l’objet de sa visite à Beyrouth. A son retour à Vienne, Mme Ferrero-Waldner doit communiquer la liste de dossiers qu’elle a étudiés avec les autorités libanaises à la chambre fédérale économique, ainsi qu’à l’association autrichienne des industriels et des entrepreneurs, qui assureront le suivi de sa visite au Liban.
La chambre fédérale regroupe essentiellement des PME, alors que l’association est formée d’importantes sociétés du pays. Des missions spécialisées seront dépêchées dans les mois à venir à Beyrouth pour débattre avec les parties libanaises concernées des possibilités ou des moyens d’une coopération dans les domaines de la réhabilitation de l’infrastructure, de la préservation de l’environnement, du développement touristique et industriel. Ce sont ces quatre thèmes qui ont d’ailleurs été au centre des entretiens que Mme Ferrero-Waldner a eus avec les dirigeants libanais.
Le ministre autrichien souligne notamment l’intérêt que le chef de l’Etat, M. Elias Hraoui, a manifesté à un projet de gestion des ressources hydrauliques proposé par Mme Ferrero-Waldner et relatif essentiellement aux recherches sur les pertes et les fuites d’eau en surface. De manière générale, le ministre autrichien a débattu avec les responsables libanais des programmes de développement auquel son pays peut participer dans des domaines où l’Autriche dispose d’une technologie avancée: percement de tunnels, installations de ponts, traitement de l’eau, irrigation. Elle précise que les échanges commerciaux entre le Liban et l’Autrichie représentent un million de shillings autrichiens (environ 770.000 dollars) et estime qu’il y a «une grande possibilité d’accroître ce volume à l’avenir».

Boueiz à Vienne

Le dialogue austro-libanais se poursuivra également à la faveur d’une visite que le chef de la diplomatie, M. Farès Boueiz, doit effectuer dans quelques mois dans la capitale autrichienne, à l’invitation de Mme Ferrero-Waldner. La date de la visite n’a pas été encore officiellement fixée mais il est possible qu’elle ait lieu vers la fin du mois de juillet.
Le ministre d’Etat souligne que sa visite s’inscrit dans le prolongement de la conférence euro-méditerranéenne de Barcelone, précisant que son pays, même s’il n’est pas riverain de la Méditerranée, contribue au financement du programme de l’Union européenne pour le Moyen-Orient. Elle précise qu’elle a proposé aux responsables libanais la conclusion d’un accord de coopération tout en soulignant qu’en général, son pays ne signe pas d’accords. «Nous pensons, dit-elle, que dans des pays industrialisés, ce sont les sociétés qui doivent s’entendre entre elles. Mais nous sommes ouverts à un tel projet et je pense que nous allons emprunter cette voie parce qu’elle représente souvent une base plus assurée pour les investisseurs».
Mme Ferrero-Waldner justifie par ailleurs l’absence d’un ambassadeur au Liban, par des raisons financières et surtout par l’organisation de la présidence autrichienne de l’UE, une préparation qui lui a été d’ailleurs confiée. «C’est un grand défi pour Vienne. Pour la première fois et en tant que premier pays parmi les nouveaux venus au sein de l’UE, nous assurons la présidence. Cela veut dire que nous aurons à rappeler nos ambassadeurs pour pouvoir bénéficier d’une grande force dans l’administration centrale. Ce n’est donc pas le moment pour nous d’envoyer un ambassadeur» au Liban, déclare-t-elle. «Il ne faut pas surestimer l’absence d’un ambassadeur. Je ne dis pas que ce n’est pas important, mais il faut faire la part des choses et voir notre façon de dialoguer», ajoute-t-elle.
Mme Ferrero-Waldner souligne encore que les dossiers importants sont de plus en plus «discutés en direct» entre les Etats. Elle met l’accent sur l’importance de la présence d’un conseiller économique autrichien au Liban, «à l’heure où de nouvelles possibilités commerciales s’ouvrent entre nos deux pays».

Hébron, un premier pas

En ce qui concerne le processus de paix régionale, le ministre d’Etat autrichien insiste sur le fait qu’il «intéresse» et «préoccupe» l’Autriche et l’Europe en général. Elle exprime sa satisfaction devant la conclusion de l’accord de Hébron entre les Israéliens et les Palestiniens, estimant qu’il s’agit là d’un «premier pas sur la voie de la reprise des pourparlers». Mais Mme Ferrero-Waldner ne pense pas que le dialogue de paix aboutira rapidement au cas où il reprendrait. Pour elle, le processus sera «très long». Elle affirme ne pas exclure que Benjamin Netanyahu, puisse envisager de «pousser loin» les négociations avec les Arabes. Elle fait remarquer en citant une «importante personnalité» que «le premier ministre israélien s’est prononcé pour des négociations de paix mais qui seraient longues et lentes parce qu’il a besoin de temps pour pouvoir rallier sa coalition» à des points de vue qu’elle conteste, s’agissant notamment du principe de la terre contre la paix. Et d’ajouter: «C’est pourquoi nous gardons espoir que la paix demeure possible».
Le ministre autrichien estime que le rôle européen devrait être plus «positif» dans le cadre du processus de paix régionale; elle se prononce en faveur d’une plus grande complémentarité avec les Américains. «Du côté israélien, poursuit-elle, on note maintenant que cela est nécessaire. L’Europe ne peut pas être constamment présente seulement pour les besoins de la coopération économique». Selon Mme Ferrero-Waldner, si la percée européenne politique dans la région a «gêné les Américains à un moment donné, washington réalise aujourd’hui que l’Europe peut être un allié, en ce sens qu’elle peut espérer être écoutée par les Syriens. Parfois, les pays arabes se sentent mieux représentés par les Européens».
La responsable autrichienne rappelle que son pays a déployé des efforts appréciables en coulisses pour favoriser le dialogue israélo-arabe, lorsque le processus de paix avait été enclenché, avant de devenir moins actif au moment où Vienne a commencé à négocier son adhésion à l’Union européenne. Aujourd’hui, c’est dans le cadre de l’UE que l’Autriche agit de nouveau en faveur de la reprise des pourparlers.

Tilda ABOU RIZK
La visite que Mme Benita Ferrero-Waldner, ministre d’Etat autrichien aux Affaires étrangères, vient d’effectuer au Liban a jeté les bases d’une nouvelle étape dans les relations entre Vienne, qui présidera l’année prochaine l’Union européenne, et Beyrouth qui, à travers la conclusion d’un accord de partenariat avec l’UE, aspire à consolider ses rapports avec...