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Actualités - OPINION

Attention écoles !

Il y a de la démagogie, du manichéisme, mais surtout le cri de révolte d’un peuple exsangue dans l’affaire de la récente majoration des écolages.
A l’origine du problème: le vote, l’automne dernier, de la loi relative à la nouvelle échelle des salaires du corps enseignant, qui accorde une hausse de 22 à 37% des salaires avec effet rétroactif à partir du 1er janvier 1996.
En vertu de la loi 515 sur les budgets scolaires, les écoles ont le droit d’augmenter dans la même proportion leurs frais de scolarité et donc, dans le cas présent, de 35% en moyenne.

Certains établissements n’ont pas hésité à hausser leurs tarifs dans des proportions légales, mais excessives en cette période de marasme économique. C’est ainsi que dans une lettre adressée aux parents, un collège renommé annonce une augmentation de 35%, en relevant toutefois que «nos écolages (...) restent à un niveau très raisonnable par rapport aux grands établissements de même catégorie que le nôtre». «Maigre consolation», ajoute la lettre. Remarque inquiétante et prémonitoire, dirions-nous.

En revanche, une petite école de quartier a décidé de majorer de 18% seulement ses frais de scolarité, à la base très modérés. La direction a augmenté sa masse salariale de 9% et réduit d’autant ses charges et marges de bénéfice en vue d’équilibrer son budget. Régime d’austérité oblige.
Un grand collège catholique a haussé de 25% ses écolages par rapport à l’an dernier, «ce taux étant un minimum insuffisant pour couvrir les rétroactifs», souligne-t-il dans une circulaire aux parents. Le responsable de cet établissement déclare avoir un déficit d’un milliard de L.L. dans son budget. Comment le comblera-t-il? Le recteur répond: «Les frais seront réduits de 5%. Nous comptons aussi sur la formule des trois choix proposés aux parents: ils peuvent opter pour un tarif scolaire normal, pour un deuxième majoré de 20% et un troisième augmenté de 40% par rapport au premier». En d’autres termes, ce directeur compte sur la solidarité dont feront preuve les parents aisés à l’égard des moins nantis. Mais, parmi ceux qui, l’année passée, avaient choisi le deuxième ou le troisième tarif, certains ont opté pour le premier. Signe des temps... de paupérisation.

Un problème de fond

La crise dépasse l’adoption de la nouvelle échelle des salaires. En effet, dès le mois d’octobre, alors que les établissements privés n’avaient pas encore procédé à cette nouvelle majoration, un grand nombre de parents avaient déjà été contraints d’inscrire leurs enfants à l’école publique. Au point que celles-ci ont dû refuser beaucoup d’élèves, du moins dans la capitale. On s’en souvient.
Le ministre de l’Education a beau jeu de menacer de poursuites judiciaires les écoles privées qui se permettraient d’enfreindre la loi, d’autant plus que la législation les autorise à augmenter leurs frais et bénéfices dans la même proportion que leur masse salariale. Pas besoin donc de contrevenir à la loi. La solution ne réside pas dans les mises en garde stériles qui jettent de l’huile sur le feu dans les relations entre parents et écoles. Certes, il ne s’agit pas pour autant de disculper les établissements sans scrupules dont le seul but est le lucre à n’importe quel prix. Mais il convient aussi de faire la part des choses, de ne pas mélanger les torchons et les serviettes, et de ne pas condamner en bloc toutes les écoles privées.
En un mot, la crise à ce niveau exige bien plus que des invectives. Elle nécessite sans doute le renforcement de l’école publique mais aussi et surtout entraide et solidarité... tout ce qui fait qu’une société en crise est tout de même une société, et non une jungle.

José JAMHOURI
Il y a de la démagogie, du manichéisme, mais surtout le cri de révolte d’un peuple exsangue dans l’affaire de la récente majoration des écolages.A l’origine du problème: le vote, l’automne dernier, de la loi relative à la nouvelle échelle des salaires du corps enseignant, qui accorde une hausse de 22 à 37% des salaires avec effet rétroactif à partir du 1er janvier...