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Actualités - OPINION

Tribune Médecine, torture et droits de l'homme

Dans son édition du 15 janvier 1997, le journal «Le Monde» publie sous le titre «Médecine et Torture» un article du célèbre professeur Léon Schwartzenberg où il crie sa révolte, son indignation et sa tristesse de savoir que dans certains pays, la torture était pratiquée sous le contrôle de médecins qu’il refuse d’appeler des confrères, non respectueux du serment qu’ils ont prêté au début de leur carrière. Ces médecins dévoyés assistent les tortionnaires dans leurs besognes pour les avertir quand ils doivent arrêter la torture sous peine de risquer la vie des prisonniers, et de perdre ainsi la possibilité d’obtenir les aveux recherchés.
Dans un récent rapport, Amnesty International relève que c’est en Israël qu’a lieu la même négation de l’éthique médicale. Des médecins, promus à cet effet, doivent dire si le détenu est à même de supporter l’isolement, la menace, d’être attaché, de porter une cagoule, de rester debout pendant une période prolongée, de subir des sévices physiques etc., bref, d’évaluer sa capacité à supporter la torture. De plus, en Israël, une commission dirigée par un ancien président de la Cour suprême a utilisé l’argument légal de «nécessité» pour permettre le recours à des pressions physiques et psychiques, et même certaines formes de torture contre des détenus dits «terroristes». En somme, la commission légalise certaines formes de tortures... avec la participation de médecins à l’élaboration des directives et à la supervision des actes de torture (Voir dans «Le Monde Diplomatique» de janvier 1997 les articles: «Torture sous contrôle médical en Israël» et «Des bourreaux et de leur impunité» par Adolfo Perez Esquivel, prix Nobel de la paix).
Le professeur Schwartzenberg se demande: «A quand la Charte internationale de la médecine, qui interdit à tout médecin de participer d’une manière quelconque à la torture ou l’humiliation, même d’un ennemi, qui demeure de toute manière son semblable?».
Cette interrogation nous surprend, car conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme (résolution 217A de l’Assemblée générale de l’ONU), des pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme (résolution 2200A), de la Déclaration de l’Association médicale mondiale (Tokyo, 1975) et sous l’impulsion du Comité exécutif de l’OMS (janvier, 1979) et du Conseil économique et social de l’ONU (mai, 1981), l’Assemblée générale de l’ONU, dans sa 111e session plénière (décembre, 1982) a, par la résolution 3452, adopté à l’unanimité une «Charte des principes d’éthique médicale, applicable au rôle du personnel de santé, en particulier des médecins, dans la protection des prisonniers et des détenus contre la torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants».
Ces principes sont clairs et obligatoirement exécutoires pour tous les membres des Nations Unies. Dans cette charte, le terme «torture» désigne «tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aigües, physiques ou mentales sont délibérément infligées à une personne par des agents de la fonction publique, aux fins notamment d’obtenir d’elle des renseignements et des aveux, de la punir d’un acte qu’elle a commis ou soupçonnée d’avoir commis... la torture constitue une forme aggravée et délibérée de peines ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants».
En outre, dans l’article 7 de la résolution, il est stipulé que: «Tout Etat doit veiller à ce que tous les actes de torture, tels qu’ils sont définis, soient des délits au regard de sa législation pénale».
Quant au personnel de santé, et en particulier les médecins, les principes énoncent: «Qu’il y a violation de l’éthique médicale et délit, s’ils se livrent, activement ou passivement, à des actes par lesquels ils se rendent coauteurs, complices, ou instigateurs de tortures et autres traitements cruels et dégradants ou s’ils font usage de leurs connaissances pour aider ou soumettre des prisonniers et détenus à ces actes...» Et enfin, qu’il ne peut être dérogé aux principes de la Charte sous aucun prétexte, «même pour des raisons de danger public».
En conclusion, l’Assemblée générale demande à tous les gouvernements d’assurer, dans une langue officielle de l’Etat, la plus large diffusion possible aux principes d’éthique médicale, en particulier auprès des associations ou ordres, médicaux, paramédicaux et des établissements de détention et d’emprisonnement.
Suite à certains incidents anciens ou récents, la presse libanaise a beaucoup parlé ces derniers temps des droits de l’homme et en particulier des détenus ou prisonniers.
Nous lançons un appel aux responsables de la santé, aux ordres professionnels, aux syndicats paramédicaux, ainsi qu’aux facultés et écoles de santé, afin d’assurer une diffusion, la plus large possible, tant de la résolution 3452 que des principes d’éthique médicale, que nous tenons à leur disposition.

Fouad N. BOUSTANY
Professeur à la Faculté
Dans son édition du 15 janvier 1997, le journal «Le Monde» publie sous le titre «Médecine et Torture» un article du célèbre professeur Léon Schwartzenberg où il crie sa révolte, son indignation et sa tristesse de savoir que dans certains pays, la torture était pratiquée sous le contrôle de médecins qu’il refuse d’appeler des confrères, non respectueux du serment...