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Les proximités dangereuses

Qu’ils soient locaux, régionaux ou internationaux ; qu’ils opèrent à découvert ou dans les coulisses, bien nombreux sont les protagonistes de la crise du Moyen-Orient. L’on se demande dès lors comment font les gouvernants concernés pour gérer au mieux un tel fouillis de paramètres en constante évolution : l’urgence allant évidemment à ces dossiers à forte incidence interne, comme le suggèrent les évènements des derniers jours.


Le Liban paie bien cher en ce moment sa noble réputation de terre d’asile. Il regorge en ce moment d’hôtes étrangers, certains plus ou moins forcés, et certains autres absolument indésirables, tels ces milliers de soldats israéliens campant sur le sol national. Durablement installé au Liban sud, l’État hébreu poursuit implacablement ses raids ciblés, ne faisant en somme que faire obstruction au déploiement de l’armée régulière. Bourreau de Gaza, affameur de Gaza, sourd au concert de protestations internationales, Benjamin Netanyahu confirme de la sorte qu’il ne peut trouver d’autre salut politique et judiciaire que dans la perpétuation de la guerre, et pas seulement à Gaza. Voudrait-il nourrir l’irrédentisme affiché par un Hezbollah se refusant à céder son armement, que le Premier israélien n’agirait pas autrement. Non moins cynique est d’ailleurs l’attitude de l’Iran qui négocie volontiers avec l’Amérique sur le nucléaire, mais ne cesse pas d’inciter au martyre ses instruments libanais.


Ce lancinant cercle vicieux, une percée sur le dossier des arsenaux qu’abritent eux aussi les camps palestiniens du Liban a-t-elle vraiment quelque chance de le briser ? Charité bien ordonnée ne commence-t-elle pas au contraire par soi-même, c’est-à-dire par les Libanais érigés en État dans l’État ? C’est à ce débat que vient de donner lieu une visite à Beyrouth du président palestinien Mahmoud Abbas. Celui-ci a certes souscrit à l’exigence libanaise d’un monopole étatique sur la détention d’armements lourds ; ainsi se trouve enterré pour la deuxième fois ce funeste accord du Caire de 1969 qui légalisait la lutte armée palestinienne et qui avait déjà été abrogé par le Parlement. Il faut espérer que cette fois-ci est la bonne, du moment qu’un calendrier-programme démarrant dès le mois prochain a même été convenu pour la concrétisation de toutes ces excellentes dispositions. Reste néanmoins à savoir dans quelle mesure le président de l’Autorité autonome engage effectivement le Hamas ainsi que la kyrielle de groupes et groupuscules de tout poil parfaitement capables, à tout moment, d’ajouter leur grain de TNT à la poudrière qu’est le pays.


Non moins lancinante, en dépit des récents bouleversements, demeure par ailleurs la vieille, la sempiternelle question syrienne. Paraphrasant la célèbre formule de Metternich, on a pu dire que quand la Syrie s’enrhume, le Moyen-Orient prend froid. C’est alors, pourrait-on ajouter au vu des expériences malheureuses du passé, que le Liban est le premier désigné pour attraper une fièvre de cheval. En premier lieu, on n’a pas encore fini de déchiffrer cette stupéfiante énigme qu’incarne Ahmad el-Chareh, ancien jihadiste repenti, adoubé par Donald Trump mais bousculé à coups de bombes par Netanyahu : cela sans que soit exclue pour autant l’éventualité de contacts secrets entre Damas et Tel-Aviv.


Or si le sort de la Syrie pèse aussi lourd ici-même, ce n’est pas seulement parce que entrepreneurs et promoteurs libanais se pourlèchent déjà les babines à la perspective du gigantesque chantier de reconstruction. Ce n’est pas non plus parce que nos agriculteurs se languissent de faire transiter en toute sécurité leurs fruits et légumes à destination du Golfe. Et ce n’est pas davantage parce que l’effondrement du régime Assad laisse imaginer de manière plus sérieuse une solution du problème des déplacés et migrants syriens réfugiés ou installés au Liban. C’est surtout parce que la mosaïque de communautés religieuses que fut jadis la Syrie est gravement lézardée aujourd’hui, avec les violences commises contre les minorités alaouite et druze : brèches par lesquelles Israël, fidèle à ses thèses de fragmentation de son environnement immédiat, a vite fait de s’engouffrer.


Jusqu’à nouvel ordre et pour vivement souhaitable qu’elle fût, la chute de la tyrannie baassiste n’a pas remédié à un mal syrien qui, par simple phénomène de pendule, a seulement changé de cap.


Vaccin, et même re-vaccin, de haute rigueur pour le voisinage.

Issa GORAIEB

igor@lorientlejour.com

Qu’ils soient locaux, régionaux ou internationaux ; qu’ils opèrent à découvert ou dans les coulisses, bien nombreux sont les protagonistes de la crise du Moyen-Orient. L’on se demande dès lors comment font les gouvernants concernés pour gérer au mieux un tel fouillis de paramètres en constante évolution : l’urgence allant évidemment à ces dossiers à forte incidence interne, comme le suggèrent les évènements des derniers jours.Le Liban paie bien cher en ce moment sa noble réputation de terre d’asile. Il regorge en ce moment d’hôtes étrangers, certains plus ou moins forcés, et certains autres absolument indésirables, tels ces milliers de soldats israéliens campant sur le sol national. Durablement installé au Liban sud, l’État hébreu poursuit implacablement ses raids ciblés, ne faisant en somme que...