
Un homme passe devant les dégâts causés par les attaques israéliennes à Tayr Debba (Tyr), le 30 novembre 2024. Mohammad Yassine/Archives L’Orient-Le Jour
Le Liban a encore « beaucoup à faire » pour désarmer le Hezbollah, comme le prévoit l’accord de trêve conclu entre le mouvement chiite et Israël, a affirmé mardi à Doha l’émissaire américaine adjointe pour le Moyen-Orient, Morgan Ortagus, qui a dans le même temps tenu à envoyer un message positif à Beyrouth. Les autorités libanaises « ont fait davantage ces six derniers mois qu’elles n’en ont fait probablement ces 15 dernières années », a-t-elle affirmé en réponse à une question sur le désarmement du groupe pro-iranien, lors du Forum économique du Qatar. « Mais il y a encore beaucoup à faire », a-t-elle ajouté.
Le message de Washington est le même : il est nécessaire de se libérer de l’emprise du Hezbollah. Le Liban est conscient qu’une décision internationale majeure a été prise à ce sujet, et que la responsabilité est rejetée sur l’État et sur ce qu’il peut entreprendre pour atteindre cet objectif. Dans ce contexte, l’armée poursuit sa mission au sud du fleuve Litani, notamment les opérations de perquisition et de récupération d’armes. Il est attendu que la pression internationale pour étendre les opérations de perquisition et de démantèlement au nord du fleuve Litani augmente dans une seconde étape. Interrogé dimanche soir à la télévision égyptienne sur la pression internationale exercée sur le Liban concernant les armes du Hezbollah, le président Joseph Aoun a souligné que la réalité libanaise dirigeait l’action des autorités. « Nous ne voulons pas aller à la confrontation. Le dialogue contribue à résoudre tous les problèmes, notamment celui des armes (illégales) », a-t-il souligné. « Au sud du Litani, l’armée libanaise a déjà nettoyé 85 à 90 % du territoire et continue de faire son travail. Nous attendons que l’armée israélienne se retire pour que la mission poursuive son avancée. Il faut se hâter, mais sans se précipiter », a-t-il déclaré.
La réponse (indirecte) de Morgan Ortagus n’a pas tardé. « Les États-Unis ont appelé à un désarmement total du Hezbollah. Et cela ne veut pas dire seulement au sud du Litani. Cela veut dire dans tout le pays », a insisté la responsable américaine mardi, en appelant les dirigeants libanais à « prendre une décision ».
Frappe à proximité d’une école
Sur le terrain, neuf personnes ont été blessées mardi dans une nouvelle frappe de drone israélien qui a visé une moto à Mansouri (caza de Tyr), au Liban-Sud, selon notre correspondant dans la région Mountasser Abdallah. Dans un communiqué, le ministère de la Santé a précisé mardi que « la frappe menée par un drone de l’ennemi israélien, visant une moto » dans le caza de Tyr, a fait neuf blessés, dont deux enfants. « Trois des blessés sont dans un état critique », a-t-il ajouté. L’attaque a eu lieu à proximité d’une école, semant la panique parmi les élèves. La ministre de l’Éducation Rima Karamé a condamné cette attaque, affirmant avoir ordonné la fermeture de l’école pour permettre aux élèves de rentrer chez eux. Elle a également contacté le directeur de l’école, Mohammad Choueikh, pour s’assurer de la sécurité des élèves, des enseignants et de l’administration. Mme Karamé a enfin appelé les Nations unies et les pays influents à « faire pression sur Israël pour qu’il cesse ses attaques brutales contre des personnes sûres et innocentes, et pour qu’il écarte les écoles et les établissements éducatifs de ses attaques ».
« Comme d’habitude, l’ennemi sioniste (Israël) a commis une nouvelle folie en attaquant le Liban à travers un drone qui a ciblé un citoyen à proximité de l’école de Mansouri, provoquant une situation de panique, de peur et d’évanouissement parmi les enseignants et les élèves », ont de leur côté dénoncé les enseignants du primaire dans un communiqué. « Un climat de frayeur a régné dans l’établissement, créant un tel désordre que l’administration de l’école a été contrainte d’organiser le retour des élèves auprès de leurs familles », précise le texte. Les enseignants ont aussi « condamné et dénoncé avec la plus grande fermeté cette agression barbare » et appelé « la communauté internationale à faire pression sur l’entité sioniste (Israël) afin d’épargner aux écoles les conséquences de ces attaques ».
Une patrouille de la Finul bloquée par des habitants du Sud
Israël a également mené d’autres frappes au Liban-Sud mardi. Un drone israélien a largué deux bombes sur des pêcheurs à Ras el-Naqoura (Tyr), sans faire de blessés, et une autre sur Kfar Kila. Des tirs d’artillerie israéliens ont visé les abords de Kfarchouba (Hasbaya), provoquant des incendies.
Par ailleurs, une patrouille de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) a une nouvelle fois été arrêtée mardi par des habitants au Liban-Sud, cette fois-ci à Chaqra (caza de Bint Jbeil), rapporte notre correspondant dans la région. Alors que ce genre de scène oblige d’ordinaire les Casques bleus à faire demi-tour, l’intervention de l’armée libanaise a cette fois-ci permis à la patrouille de poursuivre son chemin. « Le problème a été rapidement résolu : une patrouille a été arrêtée, puis l’armée libanaise est intervenue peu après, ce qui a permis aux Casques bleus de poursuivre leur chemin », affirme à L’Orient-Le Jour le porte-parole de la Finul, Andrea Tenenti. « La résolution 1701 donne à la Finul l’autorité de se déplacer librement et de mener des patrouilles, avec ou sans l’armée libanaise », poursuit-il, rappelant que « cela fait partie de (son) mandat, et la liberté de mouvement est essentielle à l’accomplissement de (ses) missions mandatées ».
Théoriquement, la force onusienne peut se déplacer de manière indépendante « dans les secteurs où ses forces sont déployées » (article 12 de la résolution 1701 de l’ONU), mais, sous la pression du Hezbollah, la liberté de déplacement de la Finul au Liban-Sud sans l’armée libanaise a été remise en cause ces dernières années.
La résolution 1701, votée après la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël, a considérablement élargi les prérogatives de la Finul, présente au Liban-Sud depuis 1978. Cette résolution sert de cadre à l’accord de cessez-le-feu signé le 27 novembre 2024 entre le Liban et l’État hébreu. Les Casques bleus sont amenés à aider l’armée libanaise à démanteler l’infrastructure du Hezbollah au sud du Litani. Il y a une semaine, la Finul a déclaré avoir découvert plus de 225 caches d’armes dans le sud du pays depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, et avoir permis à l’armée libanaise de se « redéploye(r) sur plus de 120 positions permanentes au sud du (fleuve) Litani », situé à environ 30 km de la frontière israélienne.
On va pleurer auprès des USA et de l'ONU pour qu'Israël ne bombarde pas près des écoles, et peut-être, qui sait, les écoles elles mêmes. Comme à Gaza, sous prétexte de vouloir assassiner un type, combien d'innocents tués doit-on accepter ? Que fait l'armée libanaise ?
12 h 06, le 21 mai 2025