
Le passager d'une voiture fait le signe de la victoire en brandissant un drapeau du Hezbollah, au second jour après la mise en place du cessez-le-feu avec Israël, le 28 novembre 2024 à Tyr, au Liban-Sud. Reuters/Aziz Taher/File Photo
Alors que les appels au désarmement du Hezbollah se multiplient, un haut responsable du parti chiite a affirmé mercredi à l'agence Reuters que le parti pro-iranien était prêt à discuter de son armement avec le président libanais si Israël se retirait du Liban-Sud et cessait ses frappes.
Le président Joseph Aoun s'est engagé lors de son entrée en fonction le 9 janvier à établir un monopole de l'État sur le contrôle des armes. Il a également l'intention d'entamer bientôt des discussions avec le Hezbollah au sujet de son arsenal, ont déclaré trois sources politiques libanaises à Reuters.
Les discussions sur le désarmement se sont intensifiées depuis que l'équilibre des forces a été bouleversé par la guerre qui a opposé le parti à Israël, entre le 8 octobre 2023 et le 27 novembre 2024, et l'éviction de l'allié syrien du Hezbollah, le président Bachar el-Assad. Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit de 2024, au cours duquel ses principaux dirigeants et des milliers de ses combattants ont été tués et une grande partie de son arsenal de roquettes a été détruite.
Le haut responsable du Hezbollah a déclaré que le groupe était prêt à discuter de ses armes dans le cadre d'une stratégie de défense nationale, mais que cela dépendait du retrait des troupes israéliennes de cinq collines jugées stratégiques et sur lesquelles il maintient une présence au Liban-Sud. « Le Hezbollah est prêt à discuter de la question de ses armes si Israël se retire des cinq points et met fin à son agression contre les Libanais », a indiqué ce haut responsable.
La position du Hezbollah sur d'éventuelles discussions concernant ses armes n'avait pas été rapportée auparavant. Les sources ont parlé sous le couvert de l'anonymat en raison de la sensibilité du sujet. Le bureau des médias du parti n'a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire. La présidence s'est refusée à tout commentaire.
Israël, qui a envoyé des troupes terrestres dans le Sud du Liban pendant la guerre, s'en est largement retiré, mais a décidé en février de rester dans cinq positions situées au sommet de collines. L'État hébreu a dit qu'il avait l'intention de remettre ces collines aux troupes libanaises une fois qu'il serait certain que les conditions de sécurité le permettraient.
Focus renouvelé sur les armes du Hezbollah
Malgré le cessez-le-feu, les frappes aériennes israéliennes ont maintenu la pression sur le groupe, tandis que Washington a exigé le désarmement du Hezbollah et se prépare à des négociations nucléaires avec les bailleurs de fonds iraniens du parti. Le Hezbollah a été le plus puissant des groupes paramilitaires soutenus par l'Iran dans la région, mais ses lignes d'approvisionnement iraniennes via la Syrie ont été coupées par l'éviction d'Assad.
Reuters avait rapporté, lundi, que plusieurs milices soutenues par l'Iran en Irak étaient prêtes pour la première fois à déposer les armes, afin d'éviter la menace d'une escalade du conflit avec l'administration Trump. Le Hezbollah a longtemps rejeté les appels de ses détracteurs au Liban à se désarmer, décrivant ses armes comme vitales pour défendre le pays contre Israël. Les profondes divergences concernant son arsenal ont débouché sur une courte guerre civile en mai 2008, lorsque des miliciens du parti avaient pris d'assaut les quartiers de la capitale, sur fond de tensions politiques et sécuritaires.
Les détracteurs du groupe affirment que celui-ci a unilatéralement entraîné le Liban dans des conflits et que la présence de son vaste arsenal en dehors du contrôle du gouvernement a sapé l'État. Le cessez-le-feu conclu avec Israël sous l'égide des États-Unis exige que l'armée libanaise démantèle toutes les installations militaires non autorisées et confisque toutes les armes, en commençant par les zones situées au sud du fleuve Litani, qui se jette dans la Méditerranée à une vingtaine de kilomètres au nord de la frontière israélienne.
Deux sources au fait des réflexions du Hezbollah soutiennent que celui-ci envisageait de remettre à l'armée ses armes les plus puissantes au nord du Litani, notamment des drones et des missiles antichars.
Calendrier de désarmement
Les sources contactées affirment que le président Joseph Aoun considère que la question de l'armement du Hezbollah devrait être abordée par le dialogue, car toute tentative de désarmement du groupe par la force provoquerait un conflit.
Le patriarche maronite Béchara Raï a déclaré la semaine dernière qu'il était temps que toutes les armes soient entre les mains de l'État, mais que cela nécessiterait du temps et de la diplomatie car « le Liban ne peut pas supporter une nouvelle guerre ».
Des canaux de communication avec les parties prenantes concernées sont ouverts pour « commencer à étudier le transfert des armes » sous le contrôle de l'État, après que l'armée et les services de sécurité ont étendu l'autorité de l'État à l'ensemble du Liban, a déclaré un responsable libanais, précisant qu'il s'agissait d'une mesure visant à mettre en œuvre la politique de M. Aoun. La question est également discutée avec le président du Parlement, Nabih Berry, un allié de premier plan du Hezbollah, qui joue un rôle clé dans la réduction des divergences, a-t-elle ajouté.
Dans la journée de mercredi, et interrogé par la chaîne al-Jadeed, Ghaleb Abou Zaynab, membre du bureau politique du Hezbollah a déclaré pour sa part qu'il n'était « pas d'accord » pour le désarmement du parti. « Je ne suis pas d'accord pour la remise des armes (du Hezbollah). Je suis pour un dialogue, mais sur la façon de permettre au Liban d'avoir une position de force à travers laquelle il pourra préserver son existence au sein de ces grands changements », a-t-il répondu.
L'envoyée américaine pour le Moyen-Orient, Morgan Ortagus, qui s'est rendue à Beyrouth le week-end dernier, a réitéré la position de Washington selon laquelle le Hezbollah et les autres groupes armés devaient déposer leur arsenal militaire dès que possible et que l'armée libanaise devait s'acquitter de cette tâche.
« Il est clair que le Hezbollah doit être désarmé et qu'Israël n'acceptera pas que des terroristes lui tirent dessus, et c'est une position que nous comprenons », a déclaré Mme Ortagus dans une interview le 6 avril à la chaîne LBCI.
Plusieurs ministres du gouvernement de Nawaf Salam souhaitent un calendrier de désarmement, a déclaré Kamal Chéhadé, un ministre affilié aux Forces libanaises. M. Chéhadé a précisé à Reuters que le désarmement ne devrait pas prendre plus de six mois, citant comme précédent le désarmement des milices après la guerre civile du Liban (1975-1990). Un calendrier - qui imposerait vraisemblablement des échéances au processus - est, selon lui, « le seul moyen de protéger nos concitoyens des attaques récurrentes qui coûtent des vies humaines, des économies et des destructions ».
Le conflit le plus récent a commencé lorsque le Hezbollah a déclenché des affrontements quasi-quotidiens avec Israël pour soutenir le mouvement Hamas au début de la guerre de Gaza en octobre 2023.
Dans un discours prononcé le 29 mars, le chef du Hezbollah, Naïm Kassem, a déclaré que son groupe n'avait plus de présence armée au sud du Litani et qu'il avait respecté l'accord de cessez-le-feu alors qu'Israël le violait « tous les jours ». Israël a par ailleurs accusé le parti chiite de maintenir des infrastructures militaires dans le Sud.
Le Hezbollah a demandé à l'État libanais de faire en sorte qu'Israël se retire du Liban-Sud et mette fin à ses attaques. Selon M. Kassem, il est encore temps de trouver des solutions diplomatiques. Mais il a prévenu que « la résistance est présente et prête », ajoutant qu'elle pourrait recourir à « d'autres options » si Israël n'adhérait pas à l'accord.
*Cet article est une traduction d'une information de l'agence Reuters parue en anglais.
Il peut toujours rêver. Israël ne quittera pas le Liban tant qu’il n’est pas sûr que ses ennemis sont définitivement anéantis. A eux de décider qui ils veulent encore sacrifier de leurs commandants et de leurs citoyens.
10 h 59, le 10 avril 2025