Dans le jeu des nations (The Game of Nations de Miles Copeland, 1969), il existe un mélange d’activités politiques, économiques, biologiques guidées par des personnages politiques au profil particulier. Il s’y ajoute une certaine amoralité dans les rapports humains, surtout parmi les grands États. De la Société des nations jusqu’à l’Organisation des Nations unies (ONU) après 1945, les grandes puissances avaient la mainmise sur toutes les décisions par un veto de blocage. L’objectif de l’ONU était de maintenir la paix internationale, résoudre les conflits et quelquefois l’envoi de soldats pour séparer les belligérants en cas de guerre entre États (telle la Finul entre le Liban et Israël). Cela n’a pas empêché les guerres meurtrières et des millions de morts, de handicapés et des dégâts matériels variés.
Mais pourquoi les guerres ?
C’est une question qui a préoccupé l’humanité depuis le début de l’existence. C’est cette question que va poser Albert Einstein à Sigmund Freud espérant un éclairage sur la nature humaine.
Pour Einstein il existe des forces psychologiques tel l’« appétit politique de puissance » chez les dirigeants. Une minorité, un parti ou un dirigeant va mettre la main sur le pouvoir et va dominer la majorité. Parfois il y a une aide extérieure pour renforcer ce pouvoir. Einstein termine en disant : l’homme a en lui un besoin de haine et de destruction. C’est une psychose collective qui entraîne des guerres civiles, la persécution des minorités nationales ou l’agression de pays voisins. Les mobiles sont variables, allant de conceptions politiques, d’appartenance religieuse ou de raisons économiques. Et on retrouve toujours des chefs avec des personnalités particulières. La réponse de Freud était l’existence d’un flot de haine et de destruction chez les chefs qu’il faut canaliser. L’humain est toujours tiraillé entre les pulsions de vie et les pulsions de mort. Les conflits surgissant entre les humains sont souvent résolus par la violence. En utilisant la force nous essayons de faire taire l’autre, de l’éliminer, d’empêcher le dialogue et de le dominer. Or pour vivre en paix il faut déléguer la violence à la communauté de l’État afin de protéger les individus. On doit accepter la loi pour éviter de recourir à la violence et brider les penchants destructifs des humains.
Notre Moyen-Orient brûle de tout bord. Aucun pays n’est épargné, soit par l’instabilité, soit par l’éclatement. Le Liban traîne et s’engouffre par les soins des équipes politiques d’un passé récent. Des politiques aveuglés par des passions guerrières oublient les rapports de force et le jeu des grandes puissances. Aveuglés par les passions du martyre et l’aspiration au sacrifice. Le pays tout entier était la victime innocente d’une haine réactionnelle du côté israélien. Les grands pays soutiennent Israël en armes et en finances. Le Liban était soutenu par des conseils de prudence et de retenue et des miettes en finances et en matériels.
Un grand pas a été fait par des politiques et des responsables rationnels, cherchant la stabilité du pays. Mais à bien regarder, la situation reste instable, la région continue à brûler. Le Liban reste perturbé à tous les niveaux politiques, structurels, économiques à l’intérieur. Quant à l’extérieur, des voisins agressifs nous envahissent d’un côté par une occupation militaire meurtrière ou bien par un déplacement de population hors normes. Tous ces problèmes proviennent par les soins de personnalités égocentriques, déviantes, qui gouvernent nos voisins. Par ailleurs l’Amérique était le « grand Satan » par le passé, que dire de l’Amérique du président Trump ? Ce dernier, personnalité atypique et hors norme qui ne tolère que des « trumpolâtres ». Il bouleverse tous les codes, dénonce tous les traités et les accords. Il déconstruit l’Amérique, démantèle le ministère de l’Éducation. Il se désolidarise de l’OTAN, de l’OMS, de l’Unesco, de l’accord du Commerce et de l’Unrwa. Il investit largement dans l’intelligence artificielle et veut annexer (le Canada, le Groenland et le Panama). Il subit le « kompromat » (chantage à la sex tape) d’un Poutine maître chanteur. Il est considéré comme étant de l’alt-right qui est l’extrême droite du Parti républicain (antiféministe, sexiste, antisémite, opposé à l’immigration et militant pour le suprématisme blanc). Nous vivons une période, des décennies où rien ne se passe, et des fois on assiste en quelques mois à un grand basculement. Mais où sont les grands principes qui ont fait la réputation, la gloire du monde libre ? Les principes de liberté des peuples, la démocratie, le respect des lois, l’État de droit, la liberté d’expression, l’alternance du pouvoir. Où en est le dialogue constructif pour sauver l’État ?
Quand on fait taire les hommes comme dans les pays totalitaires et avec des despotes, il faut s’attendre à des explosions. Des explosions toujours meurtrières. Pour faire « État » il faut des concessions, de la tolérance et de la hauteur dans l’esprit des responsables. Ça implique qu’on reconnaisse l’autre dans son identité, dans ses choix nobles. À ce stade il faut des responsables visionnaires, bâtisseurs et respectueux des principes démocratiques. Il faut éviter le déclin et la décadence des personnages politiques. Disons que l’avenir n’est jamais inéluctable ou fatal. Car des responsables réfléchis respectant le choix des peuples peuvent échapper au mauvais sort. Notre monde est tourmenté, et le Liban un petit pays doit rechercher la paix et éviter les aventures meurtrières. Espérons que l’ordre international pourra fonder la paix et la prospérité sur le droit et non sur le rapport de force.
Psychiatre, psychanalyste
Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.
J'ai bien aime la perspective mentale des conflits humains.
16 h 24, le 09 avril 2025