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Idées - Commentaire

L’avenir de l’ordre mondial sous Donald Trump

L’avenir de l’ordre mondial sous Donald Trump

Volodymyr Zelensky, Donald Trump et J.D. Vance dans le Bureau ovale à la Maison-Blanche, vendredi 28 février 2025. Andrew Harnik/Getty Images via AFP

Le président américain Donald Trump a jeté de sérieux doutes sur l’avenir de l’ordre international d’après-guerre. Dans ses récents discours et lors de votes aux Nations unies, son administration s’est rangée du côté de la Russie, qui a lancé une guerre de conquête contre son voisin pacifique, l’Ukraine. Ses menaces tarifaires ont soulevé des questions sur des alliances de longue date et sur l’avenir du système commercial mondial, et son retrait de l’accord de Paris sur le climat et de l’Organisation mondiale de la santé a mis à mal la coopération sur les menaces transnationales.

Le « siècle américain »

La perspective d’un désengagement total et d’un repli des États-Unis sur eux-mêmes a des implications troublantes pour l’ordre mondial. Il est facile d’imaginer la Russie profiter de la situation pour tenter de dominer l’Europe par l’exercice ou la menace de la force. L’Europe devra faire preuve d’une plus grande unité et assurer sa propre défense, même si le soutien des États-Unis restera important. De même, il est facile d’imaginer la Chine s’affirmer davantage en Asie, où elle cherche ouvertement à dominer ses voisins. Ces derniers en auront certainement pris note.

En fait, tous les pays seront touchés, car les relations entre les États et les autres grands acteurs transnationaux sont interconnectées. Un ordre international repose sur une répartition stable du pouvoir entre les États, sur des normes qui influencent et légitiment les comportements et sur des institutions communes. Un ordre international donné peut évoluer progressivement sans conduire à un changement clair de paradigme. Mais si la politique intérieure de la puissance prééminente change trop radicalement, les jeux sont faits.

Étant donné que les relations entre les États varient naturellement au fil du temps, l’ordre est une question de degré. Avant l’avènement du système étatique moderne, l’ordre était souvent imposé par la force et la conquête, sous la forme d’empires régionaux tels que la Chine et Rome (parmi beaucoup d’autres). Les différences de guerre et de paix entre les empires puissants étaient davantage une question de géographie que de normes et d’institutions. Parce qu’elles étaient contiguës, Rome et la Parthie (la région de l’Iran actuel) se sont parfois affrontées, alors que Rome, la Chine et les empires mésoaméricains ne le faisaient pas.

Les empires eux-mêmes dépendaient à la fois du « hard power » et du « soft power ». La Chine était unie par des normes communes fortes, des institutions politiques très développées et des avantages économiques mutuels. Il en allait de même pour Rome, en particulier pour la République. L’Europe post-romaine disposait d’institutions et de normes sous la forme de la papauté et de monarchies dynastiques, ce qui signifiait que les territoires changeaient souvent de gouvernance par le biais de mariages et d’alliances familiales, sans tenir compte des souhaits des populations concernées. Les guerres étaient souvent motivées par des considérations dynastiques, bien que les XVIe et XVIIe siècles aient vu naître des guerres de ferveur religieuse et d’ambition géopolitique, en raison de la montée du protestantisme, des divisions au sein de l’Église catholique romaine et de l’intensification de la concurrence entre les États.

À la fin du XVIIIe siècle, la Révolution française a bouleversé les normes monarchiques et les contraintes traditionnelles qui avaient longtemps soutenu l’équilibre des pouvoirs en Europe. Bien que la poursuite de l’empire par Napoléon ait finalement échoué après sa retraite de Moscou, ses armées ont balayé de nombreuses frontières territoriales et créé de nouveaux États, ce qui a conduit aux premiers efforts délibérés pour créer un système d’État moderne, lors du Congrès de Vienne de 1815.

Le « Concert de l’Europe » post-Vienne a subi une série de perturbations au cours des décennies suivantes, notamment en 1848, lorsque des révolutions nationalistes ont balayé le continent. À la suite de ces bouleversements, Otto von Bismarck a lancé plusieurs guerres pour unifier l’Allemagne, qui a pris une position centrale et puissante dans la région, comme en témoigne le congrès de Berlin de 1878. Grâce à son alliance avec la Russie, Bismarck instaure un ordre stable jusqu’à ce que le Kaiser le renvoie en 1890.

C’est alors que survient la Première Guerre mondiale, suivie du traité de Versailles et de la Société des Nations, dont l’échec ouvre la voie à la Seconde Guerre mondiale. La création ultérieure des Nations unies et des institutions de Bretton Woods (la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et le précurseur de l’Organisation mondiale du commerce) a marqué l’épisode le plus important du XXe siècle en matière de renforcement des institutions. Les États-Unis étant l’acteur dominant, l’ère post-1945 est devenue le « siècle américain ». La fin de la guerre froide en 1991 a ensuite entraîné une répartition unipolaire du pouvoir, permettant la création ou le renforcement d’institutions telles que l’OMC, la Cour pénale internationale et l’accord de Paris sur le climat.

Nouveau déclin ou creux cyclique ?

Avant même Trump, certains analystes estimaient que cet ordre américain touchait à sa fin. Le XXIe siècle a apporté un nouveau changement dans la répartition du pouvoir, généralement décrit comme la montée (ou plus exactement la reprise) de l’Asie. Alors que l’Asie représentait la plus grande part de l’économie mondiale en 1800, elle s’est retrouvée à la traîne après la révolution industrielle en Occident. Et comme d’autres régions, elle a souffert du nouvel impérialisme que les technologies militaires et de communication occidentales avaient rendu possible.

Aujourd’hui, l’Asie retrouve son statut de première source de production économique mondiale. Mais ses gains récents se sont faits davantage au détriment de l’Europe que des États-Unis. Au lieu de décliner, les États-Unis représentent toujours un quart du PIB mondial, comme c’était le cas dans les années 1970. Si la Chine a considérablement réduit l’avance des États-Unis, elle ne les a pas dépassés sur le plan économique, militaire ou en termes d’alliances.

Si l’ordre international s’érode, la politique intérieure des États-Unis en est autant la cause que la montée en puissance de la Chine. La question est de savoir si nous entrons dans une période totalement nouvelle de déclin américain, ou si les attaques de la seconde administration

Trump contre les institutions et les alliances du siècle américain s’avéreront être un autre creux cyclique. Nous ne le saurons peut-être pas avant 2029.

Copyright : Project Syndicate, 2025.

Par Joseph S. NYE Jr

Professeur émérite à l’université de Harvard, ancien secrétaire adjoint à la Défense des États-Unis. Dernier ouvrage : « A Life in the American Century » (Polity Press, 2024).

Le président américain Donald Trump a jeté de sérieux doutes sur l’avenir de l’ordre international d’après-guerre. Dans ses récents discours et lors de votes aux Nations unies, son administration s’est rangée du côté de la Russie, qui a lancé une guerre de conquête contre son voisin pacifique, l’Ukraine. Ses menaces tarifaires ont soulevé des questions sur des alliances de longue date et sur l’avenir du système commercial mondial, et son retrait de l’accord de Paris sur le climat et de l’Organisation mondiale de la santé a mis à mal la coopération sur les menaces transnationales.Le « siècle américain » La perspective d’un désengagement total et d’un repli des États-Unis sur eux-mêmes a des implications troublantes pour l’ordre mondial. Il est facile d’imaginer la Russie profiter de...
commentaires (2)

Le fait que Trump ne veuille pas aider les européens parce qu’ils ne s’étaient pas suffisamment investis dans La Défense des pays qu’ ils avaient promis de protéger en s’appuyant sur les E.U est son droit le plus légitime. Mais de là à venir imposer ses conditions pour faire gagner un dictateur qui a toujours déclaré son ami liste pour son pays et pour l’Europe est une aberration qu’il ne nous fera pas avaler. S’il décide de se retirer qu’il le fasse mais qu’il laisse les eiroeens régler le problème de la région sans lui. Bas les pattes tu as assez fait de dégâts en quelques jours de presiden

Sissi zayyat

17 h 20, le 09 mars 2025

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Commentaires (2)

  • Le fait que Trump ne veuille pas aider les européens parce qu’ils ne s’étaient pas suffisamment investis dans La Défense des pays qu’ ils avaient promis de protéger en s’appuyant sur les E.U est son droit le plus légitime. Mais de là à venir imposer ses conditions pour faire gagner un dictateur qui a toujours déclaré son ami liste pour son pays et pour l’Europe est une aberration qu’il ne nous fera pas avaler. S’il décide de se retirer qu’il le fasse mais qu’il laisse les eiroeens régler le problème de la région sans lui. Bas les pattes tu as assez fait de dégâts en quelques jours de presiden

    Sissi zayyat

    17 h 20, le 09 mars 2025

  • Les Etats Unis de Trump se comportent en Empire. C'est normal et c'est légitime. L'étonnant est que ce ne soit pas arrivé plus tot. Les Européens sont les grands perdants : Ils ont eu 50 ans pour batir un Empire. L'Union Européene s'est construite avec l'idée d'etre une alternative " humaniste" au Capitalisme Americain. Ils sont rentrés dans le mur: A defaut d'avoir le courage de proner un liberalisme economique qui motive les individus, les dirigeants européens on proné le socialisme et donné aux incapables de la richesse créée par les capables. L'Europe est devenue une nouvelle URSS.

    Moi

    14 h 17, le 09 mars 2025

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