
La patronne du FMI, Kristalina Georgieva, et le gouverneur par intérim de la Banque du Liban, Wassim Manssouri, à Dubaï lundi 10 février 2025. Photo P.H.B.
La patronne du Fonds monétaire international, Kristalina Georgieva, a indiqué dans un entretien donné lundi à Sky News Arabia que des « consultations intensives » avaient lieu « avec les amis du Liban pour fournir une assistance » au pays, en crise depuis fin 2019 et dont le passif s’est alourdi avec la facture des destructions et des pertes liées à plus de 15 mois de guerre entre le Hezbollah et Israël.
« Nous sommes prêts à agir rapidement », a-t-elle encore assuré, selon des extraits de l’entretien relayés sur X par la chaîne. Cet entretien, qui portait sur plusieurs dossiers, a eu lieu en marge du 9e Forum arabe des finances publiques organisé à Dubaï, à la veille de l’édition 2025 du Sommet mondial des gouvernements. « Le Liban a besoin de réformes économiques, et la situation est aujourd’hui favorable à leur mise en œuvre », a-t-elle ajouté.
Lors du forum, la patronne du Fonds s’est aussi entretenue avec le gouverneur par intérim de la Banque du Liban, Wassim Manssouri. Selon un communiqué de la BDL, les deux responsables ont discuté de l’évolution de la situation au Liban, où le vide présidentiel de plus de deux ans a été comblé par l’élection de Joseph Aoun le 9 janvier. Le Premier ministre Nawaf Salam a formé un gouvernement pour remplacer celui de Nagib Mikati, démissionnaire depuis les législatives de mai 2022.
À l’occasion de cet échange, la directrice générale du FMI s’est félicitée de ces étapes clés franchies par les « institutions constitutionnelles » du pays et du fait que le gouvernement « de la réforme et du sauvetage » soit composé d’experts choisis en toute indépendance par rapport aux grands partis qui se partagent habituellement la scène politique. Mme Georgieva a enfin réitéré le soutien du Fonds au Liban et à son gouvernement et a exprimé son souhait de se rendre prochainement dans le pays, conclut le communiqué de la BDL.
Relever les défis
Jeudi dernier, la porte-parole du FMI, Julie Kozak, avait déjà indiqué que le Fonds était enthousiasmé par l’élection de Joseph Aoun et « impatient de travailler avec lui et son nouveau gouvernement pour relever les défis auxquels l'économie libanaise est confrontée ».
« Pour rappel, le Liban reste confronté à de profonds défis économiques, et le conflit a exacerbé une situation macroéconomique et sociale déjà fragile. L’élection du président, la formation d’un nouveau gouvernement et le cessez-le-feu sont essentiels pour soutenir les actions politiques et les réformes qui permettraient un retour progressif à la normalisation de l’activité économique au Liban », avait encore expliqué la porte-parole.
Le FMI n’a pas encore mis à jour ses prévisions pour le pays, les données les plus récentes accessibles sur son site s’arrêtant à octobre dernier (contraction du PIB de 0,7 %), alors que le Liban-Sud, la Békaa et la banlieue sud de Beyrouth étaient lourdement bombardés par l’armée israélienne. En décembre, donc après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, la Banque mondiale avait actualisé sa prévision, tablant désormais sur une contraction de 5,7 %. Dans son évaluation provisoire des conséquences de la guerre, elle avait alors estimé à plus de 3,413 milliards de dollars les dégâts accumulés depuis le 8 octobre 2023, pour des pertes économiques chiffrées à près de 5,1 milliards.
Avant même la guerre, le pays était plongé dans une crise qui a paralysé son secteur bancaire et conduit au gel illégal de dizaines de milliards de dollars de dépôts. Le redressement du pays passe par des réformes visant à épurer plus ou moins 70 milliards de dollars de passif accumulé par le système financier, à travers des mesures que le pays s’est engagé à lancer en avril 2022 via un accord préliminaire avec le Fonds, sans réellement joindre le geste à la parole. La formation du gouvernement Salam laisse entrevoir un déblocage du processus qui, s’il suit son cours, devrait conduire à une profonde restructuration du secteur bancaire, une réforme de la fonction publique et une renégociation de la dette en dollars du pays, en défaut depuis mars 2020.
Syrie et Égypte
Sur le plan régional, Mme Georgieva a déclaré à Sky News Arabia que « les conflits en cours dans la région laissent planer une ombre sur la stabilité économique », espérant que l’accord de cessez-le-feu à Gaza contribuera à calmer la situation. Elle a assuré s’attendre à ce que la zone MENA affiche 3,6 % de croissance en 2025.
Sur le dossier syrien, qui a connu un bouleversement fin 2024 avec la chute du régime Assad et son remplacement par une coalition de rebelles islamistes soutenus par l’Occident, Mme Georgieva a affirmé à Sky News Arabia que le FMI n’avait pas eu de contact avec Damas depuis 2009 et qu’il était « prêt à aider le pays ». « Nous sommes prêts à aider la Syrie à se reconstruire lorsque les conditions le permettront », a-t-elle insisté. La patronne du FMI a également longuement abordé le dossier égyptien, précisant que le conseil d’administration du Fonds « devrait approuver un financement supplémentaire de 1,3 milliard de dollars dans le cadre du programme de stabilité et de viabilité, reflétant l'engagement du FMI à soutenir l'économie égyptienne au cours de cette période ».
Ce monsieur Mansouri a l’air d’un bon gestionnaire. J’espère qu’ils le garderont à son poste voire qu’il soit le gouverneur de la BDL et non seulement par interim.
17 h 16, le 10 février 2025