
Une des entrées secondaires de la Banque du Liban, à Beyrouth. Photo P.H.B.
La Banque du Liban (BDL) a demandé vendredi aux établissements bancaires de mettre un terme aux versements supplémentaires qui avaient été octroyés, à titre exceptionnel en raison de la guerre, aux clients bénéficiant des mécanismes de retrait mis en place par les circulaires principales n° 158 et 166. Une source de la BDL a confirmé à L’Orient-Le Jour « un retour à la normale » -soit sans les versements supplémentaires octroyés depuis octobre 2024- « jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement, avec lequel des discussions seront entamées pour augmenter les paiements mensuels ».
Il était déjà prévu que cette dérogation prenne fin en février, après une application en vigueur depuis octobre dernier. Une décision qui met fin à une période de quatre mois (octobre-janvier) durant laquelle des sommes supérieures à celles prévues initialement ont pu être retirées grâce aux circulaires intermédiaires n° 717 et 718. Ces montants équivalaient à deux retraits mensuels en novembre, décembre et janvier, tandis qu’en octobre, l'institution avait autorisé le retrait de l’équivalent de trois mensualités. Le gouverneur par intérim de la BDL, Wassim Manssouri, avait alors justifié en décembre ces mesures exceptionnelles par les « circonstances d’urgence », notamment la guerre ouverte de deux mois entre le Hezbollah et Israël, de fin septembre à fin novembre, et ses répercussions sur le pays.
Le financement de ces dérogations est partagé entre les banques et la BDL. Les réserves de change de cette dernière avaient diminué de plus d’un demi-milliard entre fin septembre et mi-décembre, bien qu’elles affichent un niveau en hausse de 9,1 % par rapport à mi-décembre 2023, selon BlomInvest. 431 448 déposants aurait bénéficié des deux mécanismes depuis leurs lancements respectifs, pour un total de 3,24 milliards de dollars retirés, avait fait savoir fin décembre la BDL.
Selon les derniers chiffres publiés dans le rapport hebdomadaire de la banque Byblos, les actifs de réserve en devises étrangères de la Banque du Liban ont atteint 10,34 milliards de dollars à la mi-janvier 2025, marquant une légère hausse par rapport à la fin de l'année 2024, où ils s'établissaient à 10,13 milliards. À la mi-décembre 2024, ces réserves avaient atteint 10,18 milliards de dollars.
Les circulaires 717 et 718
Valables jusqu’en juin 2025, sauf modification de leur date d’expiration, les circulaires n° 158 et 166 font partie des dispositifs mis en place par la BDL depuis le début de la crise bancaire, il y a cinq ans, afin de compenser partiellement les restrictions illégales imposées par les banques sur les comptes en « lollars » ouverts avant fin 2019.
Publiée le 8 juin 2021, la circulaire n° 158 a été prolongée à trois reprises. Les déposants qui y ont souscrit avant le 30 juin 2023 peuvent normalement retirer 400 dollars par mois (jusqu’à 4 800 dollars par an, avec un plafond total de 50 000 dollars), contre 300 dollars pour ceux ayant souscrit après cette date (soit 3 600 dollars par an). Avec la dérogation, ils ont donc pu retirer un total de 2 800 dollars depuis octobre, soit 1 200 dollars le premier mois (trois fois le montant initial), puis 800 dollars en novembre, décembre et janvier.
Quant à la circulaire n° 166, publiée le 3 février 2024 pour remplacer la circulaire n° 151, elle permet aux déposants non éligibles à la circulaire n° 158 de retirer 150 dollars « frais » par mois (avec un plafond total de 4 350 dollars). Grâce à la dérogation, ils ont donc pu retirer 1 050 dollars entre octobre et décembre : 450 dollars le premier mois, puis 300 dollars en novembre et décembre.
L'entrée en vigueur, le 27 novembre dernier, d'un cessez-le-feu de 60 jours, prolongé jusqu’au 18 février, a mis fin aux hostilités entre Israël et le Hezbollah. Un des grands chantiers du prochain gouvernement de Nawaf Salam sera la refonte du système bancaire, bloqué depuis le déclenchement de ce que la Banque mondiale considère comme l’une des trois pires crises économiques au monde depuis le milieu du XIXe siècle. L’exécutif devra également nommer un nouveau gouverneur à la tête de la Banque centrale et sera chargé de la commission de contrôle des banques.