
La journaliste Elsy Moufarrej. Photo de profil sur X
La chaîne de télévision privée libanaise MTV a informé la journaliste Elsy Moufarrej, qui est également coordinatrice du Syndicat alternatif de la presse (SAP), de sa décision de la licencier en raison de son travail syndical, précise la journaliste à L’Orient-Le Jour.
Cette décision de la chaîne intervient après un communiqué publié par le SAP le 16 décembre 2024, rejetant les mesures judiciaires prises suite à des plaintes déposées par la chaîne contre plusieurs journalistes et militants des réseaux sociaux pour incitation présumée à la haine.
Trois militantes, dont Sahar Ghaddar, fondatrice d’une agence de communication, ont été arrêtées le mois dernier suite à des plaintes déposées par la MTV, après que celles-ci ont accusé la chaîne de fournir des informations pouvant être utilisées par l’armée israélienne pendant sa guerre contre le Hezbollah au Liban, entre octobre 2023 et novembre 2024.
Le communiqué du syndicat avait souligné que les journalistes ne pouvaient être convoquées pour une enquête uniquement sur décision d'un juge d’instruction et non par la police judiciaire, estimant ainsi que l’arrestation des militantes constituait une atteinte aux principes de liberté d’expression.
La MTV a ainsi donné à Mme Moufarrej deux options pour conserver son poste : le retrait du communiqué par le syndicat ou sa démission de l’organisme. La journaliste a refusé ces deux options et a depuis intenté une action en justice contre la chaîne pour licenciement abusif.
« Selon le droit du travail et les accords internationaux dont le Liban est signataire, il est interdit à une entité de forcer une personne à choisir entre son emploi et son affiliation syndicale », a déclaré Elsy Moufarrej à L’Orient-Le Jour.
« Double discours »
S’adressant à la MTV, la journaliste a cité une phrase affichée à l’entrée du studio de l’émission Sar el-Waët : « Je peux ne pas être d’accord avec votre opinion, mais je me battrai pour votre droit de l’exprimer. »
« Il y a une évidente contradiction : nous disons une chose et faisons l’inverse », a-t-elle ajouté. Elle a conclu en s’adressant à ses collègues journalistes, soulignant l’importance de ne pas craindre le travail syndical, car « les syndicats existent pour protéger les droits des journalistes ».
Dans un reportage diffusé en soirée, la MTV a répondu aux accusations dont elle fait l'objet. La chaîne a notamment affirmé qu'Elsy Moufarrej aurait proféré des « menaces de mort » à son encontre. « La MTV ne s'est tournée vers la justice que pour dénoncer les menaces de mort dont elle fait l'objet, pas pour brimer la liberté d'expression de quiconque », a indiqué Marc Habka, avocat de la chaîne, interviewé durant le reportage.
Soutiens et condamnations
Le Syndicat alternatif de la presse a exprimé sa pleine solidarité avec sa coordinatrice, dans un communiqué publié vendredi. Il a aussi affirmé son soutien à toute action en justice qu’elle entreprendrait.
« [Nous] n’hésiterons pas à nous opposer à une telle mesure arbitraire qui vise à obliger les journalistes à choisir entre leur activité syndicale et leur emploi, en violation flagrante de la loi, et portant atteinte au droit d’adhérer à un syndicat et restreignant la liberté d’expression », peut-on lire dans le communiqué.
Le syndicat a par ailleurs promis de soutenir et de protéger Elsy Moufarrej « face à ce ciblage injuste après qu’elle s’est consacrée aux causes des journalistes ».
De son côté, l’organisation beyrouthine Legal Agenda, spécialisée dans la recherche et le plaidoyer, a fermement condamné le « comportement autoritaire affiché par MTV à l’égard de la journaliste Elsy Moufarrej, qui y travaille depuis plus de 10 ans, en raison de son travail syndical et de son engagement en faveur de la liberté d’expression ».
L’organisation a ajouté que la décision de la chaîne « souligne la priorité de réglementer les médias pour protéger les libertés des journalistes et garantir le respect de l’éthique professionnelle ». Enfin, Legal Agenda a conclu que cet incident « donnera un élan supplémentaire au Syndicat alternatif de la presse » pour renforcer son rôle en tant que référence en matière de liberté d’expression pour les journalistes.
Dans ce cas précis, il y a eu menace de mort ou incitation a la violence contre la chaîne et son personnel. Ces personnes contre lesquelles la MTV a réclamé l'intervention de la justice c'est parce que leurs actions sont politiques et menaçantes envers ses intérêts. Le syndicat n'aurait pas du s'en mêler car dans ce cas le sujet n'est pas social mais politique et potentiellement violant. Les syndicats ne sont pas censé faire de la politique mais leur combat devrait se concentrer sur leur rôle purement social. Si tout est comme narré, mme Moufarrej a eu tord.
15 h 02, le 27 janvier 2025