Le peuple est soulagé, mais la caste politique aiguise ses couteaux en se préparant au combat. Tous les Libanais se sont réjouis en écoutant le discours d’investiture du président. Les politiques en majorité auraient préféré jouer sur un terrain sans limites et sans lois ou règle et sans morale. Le discours d’investiture du président mérite d’être enseigné, commenté dans un cadre universitaire. C’est un discours qui reflète les principes d’une bonne gouvernance. C’est ce plan dont le pays a besoin. Il faut espérer que certains politiques ou un grand nombre puissent se hisser à un niveau de compréhension de ces principes, noyés qu’ils sont dans un individualisme pervers et une profonde corruption. Le président pourra aider les hommes politiques à s’élever au niveau des hommes d’État.
Comment ont-ils fait pour voter massivement ?
Pendant des années ceux-là mêmes et sans nuances étaient subjugués par l’axe iranien et avaient les arguments valables et notoires pour agir.
Le peuple ne pouvait que subir tous les engagements des tenants de la force. Soit de bonne grâce, soit par l’intimidation ou bien par les assassinats. Il a fallu l’intervention des grandes puissances régionales et internationales pour inciter les politiques à se décider. C’est la faillite de la caste politique qui a alerté le monde et les amis du Liban pour choisir la personne capable de guider le pays.
Et quelle décision ?
Mais c’est une décision du bout des lèvres. C’est une décision presque forcée comme dans un accouchement difficile qui nécessite l’utilisation d’un appareil appelé forceps (instrument d’extraction d’un enfant vivant au cours d’un accouchement). Cela n’a pas empêché certains groupuscules de jouer la fine bouche en exigeant quelques faveurs ou quelques avantages. D’autres groupuscules plus nuancés se sont drapés du respect de la souveraineté et de la dignité nationale. Répétons que toute la caste politique ou la majorité des politiques étaient à l’origine du désastre du pays. Des morts par milliers, des ruines dans les maisons et les immeubles, une faillite économique. Cette dernière par manque de contrôle ou par excès de corruption.
Bien entendu chacun peut s’accrocher à sa vérité, il peut la défendre mais dans un cadre étatique et d’un consensus accepté par une majorité et une entente globale. Quant à vouloir imposer ses choix, ses croyances idéologiques ou religieuses, on tombe dans un excès inacceptable. C’est un autre registre où on passe de l’intime à une politique globale. C’est à quoi on a abouti. Certains clans ne cessent de manœuvrer pour obtenir des avantages ou pour échapper à des poursuites. Ici vient le rôle de la justice mais disons des juges pour aider au redressement du pays. Il faut un rempart épais contre la corruption qui prédomine dans la caste politique. Les juges en France dans le procès de Jacques Chirac, maire de Paris, concluent : « Monsieur Chirac a manqué à l’obligation qui pèse sur les personnes publiques, chargées de la gestion des fonds ou des biens qui leur sont confiés, cela au mépris de l’intérêt général. »
Il faut surtout l’aide des pays amis et surtout la rigueur et la surveillance en cas de prêts ou de dons et leur bonne utilisation
Le président, malgré sa bonne volonté et son approche claire de tous nos problèmes, doit travailler avec une équipe ministérielle. Cette équipe, on l’espère, sera composée de responsables compétents, intelligents, ayant le sens de l’État, capables de décisions rationnelles pour le bien du pays. Ces personnes existent.
Mais attention !
Dans les cercles politiques, et c’est devenu une norme, il y a beaucoup de profiteurs, beaucoup d’affairistes et beaucoup de fromagistes, comme toujours c’est le « mais » que le président risque de trouver sur son chemin. Il y a les grands sujets que le président a soulevés, il y a les grands principes démocratiques. Il y a la liberté des croyances et le respect des lois, et tant d’autres.
Le président doit sa place à sa personnalité, son caractère honnête, sa rigueur, sa non-compromission dans les magouilles habituelles. C’est un président de défi, un défi de travailler avec une équipe pour affronter le chantier dont le pays a besoin. Devant un pays éclaté, il y a un grand besoin d’organisation, loin de toute idéologie, c’est un grand défi, surtout dans une région en ébullition où les volcans sont en éruption et les vents sont contradictoires, évitons les responsables de mauvais augure. Il y a place pour la diplomatie et non la guerre. Ces responsables qui ont l’art de parler juste mais qui pensent faux, on doit les écarter des problèmes politiques qui soufflent sur la région. Le président et une équipe cohérente pourront nous éviter les dérives, les dialogues de sourds comme c’était avant.
Adel AKL
Psychiatre, psychanalyste
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