Pour la première fois depuis le début de la vacance présidentielle, le 1er novembre 2022, les contacts pour l’élection d’un nouveau président semblent sérieux et motivés par une volonté réelle d’aboutir à un résultat concret. C’est ce qui ressort du soudain emballement des réunions, certaines publiques et d’autres plus discrètes, entre plusieurs protagonistes, ainsi que de la soudaine prolifération des candidats annoncés, certains publiquement, d’autres selon des rumeurs véhiculées par leurs proches.
Au cœur de toute cette activité, il y a encore et toujours Aïn el-Tiné, où le président de la Chambre Nabih Berry mène la bataille pour la tenue de la séance électorale du 9 janvier. Certaines parties au Liban ont critiqué cette date, se demandant pourquoi le président de la Chambre a choisi de fixer ce rendez-vous à 11 jours de l’entrée en fonction du nouvel hôte de la Maison-Blanche, Donald Trump.
Mais à tous ses visiteurs, dont les ambassadeurs membres du Quintette et le chef du CPL Gebran Bassil ainsi que plusieurs blocs parlementaires, Nabih Berry a tenu le même langage : la séance doit se tenir au plus tôt pour préserver le Liban des développements possibles à venir. La date du 9 janvier a donc été fixée sciemment dès la fin des fêtes de Noël et du Nouvel An ainsi que du Noël arménien et après le retour au Liban des diplomates (la plupart d’entre eux rentrent chez eux pour la période des fêtes), pour gagner le maximum de temps. Aux yeux de Berry, il est impératif d’avoir un président et un nouveau gouvernement avant la fin de janvier pour que l’État libanais soit prêt à toutes les éventualités et puisse prendre les décisions nécessaires pour protéger le pays durant cette période de bouleversements qui pourraient s’étendre au-delà de la Syrie, dont le régime vient de chuter. Plusieurs parties craignent en effet que la vague s’élargisse à l’Irak et peut être même à l’Iran.
Selon des sources proches de Aïn el-Tiné, les diplomates présents étaient d’accord sur la nécessité d’élire un président au plus vite, et les sources du CPL affirment que Bassil est lui aussi d’accord avec l’approche de Berry. Il faut donc entamer les contacts pour trouver une entente minimale sur un nom qui ne donnerait pas l’impression à un camp d’avoir gagné au profit des autres, et qui serait aussi en mesure d’inspirer confiance aux Arabes et aux Occidentaux. Car, après toutes ces années de crise à plusieurs volets, l’État ne peut redémarrer qu’avec une aide extérieure.
Cela peut paraître simple, mais en réalité, ça ne l’est pas. Et pour cause : plus l’échéance électorale s’approche, plus les appétits s’ouvrent et plus chaque camp cherche à marquer des points. Le camp hostile au Hezbollah estime que c’est le bon moment pour faire arriver à Baabda un candidat issu de ses rangs ou proche de son point de vue, alors que le Hezbollah et Amal ne peuvent pas accepter un président qui leur serait hostile. En même temps, ils sont conscients de la nécessité de tenir compte des exigences étrangères pour ne pas amener à Baabda un président condamné à l’échec car privé de tout soutien arabo-occidental. Ils estiment aussi que le système libanais repose sur des équilibres délicats qu’il faut respecter.
Amal et le Hezbollah considèrent en tout cas qu’ils ont déjà fait de grandes concessions en acceptant de renoncer tacitement, car ils ne le disent pas ouvertement, à leur candidat déclaré, le chef des Marada Sleiman Frangié, puisqu’ils évoquent déjà d’autres noms. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, soudain, le député Farid el-Khazen, membre du bloc parlementaire de Frangié, entame des contacts avec différentes parties pour tenter d’obtenir leur appui à son éventuelle candidature. Frangié semble avoir donc accepté l’idée qu’il ne peut pas être élu dans ces circonstances et il proposerait la candidature de l’un de ses proches. Autre concession, le président de la Chambre a accepté lors de la rencontre avec les membres du Quintette l’idée de tenir une séance électorale à plusieurs tours successifs, autrement dit de voter autant de fois qu’il le faut jusqu’à l’élection d’un président. Berry préférait une succession de séances électorales indépendantes pour éviter que le Parlement se transforme en corps électoral et ne puisse plus légiférer si le besoin s’en fait sentir. C’est un grand pas en avant qui montre qu’il est cette fois-ci déterminé à aller jusqu’au bout.
Mais cette mission reste difficile à accomplir, en l’absence d’un véritable dialogue entre les différents protagonistes, d’autant que le candidat idéal n’a pas encore été trouvé. Berry et Bassil insistent sur la nécessité d’agir vite. Pour eux, si le président n’est pas élu le 9 janvier, il faudra peut-être alors attendre des mois avant de pouvoir de nouveau convoquer une nouvelle séance en raison de la complexité de la situation et des conséquences possibles des changements en Syrie sur l’intérieur libanais. Déjà, à Tripoli, les tensions montent entre les différentes factions sans parler de l’armée libanaise sollicitée aux frontières et à l’intérieur.
Pour de nombreuses parties, l’heure est donc grave, et le Liban a plus que jamais besoin de la relance de ses institutions étatiques. Mais dès qu’on commence à évoquer les noms, les clivages réapparaissent. Les parties concernées ont beau dire que les négociations avancent et qu’un grand pas a été accompli, il semble que les discussions sur les noms continuent d’être ardues. De plus, aucun camp ne se risque à annoncer publiquement son candidat pour ne pas griller ses chances. L’heure de vérité devrait toutefois sonner le 9 janvier.
L' election d' un president, faut-il le rappeler, sans pouvoirs de puis Taef, va preserver le Liban des risques à venir ? s' il est à l' image de celui qui en sort, ceci va l' enfoncer encore plus ! Mais on peut espérer qu' à la lumière des derniers développements dans la région et au Liban , une nouvelle ère se met en place pour la région , un peu comme la chute du mur de Berlin en Europe, après des décennies de communisme, et de totalitarisme I
16 h 13, le 14 décembre 2024