Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole

Accord d’armistice : une piste pour la stabilité au Liban et en Israël ?

Alors que les tensions persistent entre Israël et le Hezbollah, les discussions autour d’une solution durable refont surface. Parmi les idées évoquées, un retour à l’accord d’armistice signé en 1949 entre le Liban et Israël. Cet accord, qui reste juridiquement en vigueur, pourrait offrir un cadre minimal pour stabiliser la frontière, mais sa faisabilité dans le contexte actuel est loin d’être garantie.

Signé après la guerre israélo-arabe de 1948, l’accord d’armistice établit des frontières internationales reconnues et prévoit un déploiement parallèle des forces militaires des deux parties avec une zone tampon. Mais cet outil juridique, longtemps oublié, peut-il être réactivé dans un contexte géopolitique totalement transformé ?

Adoptée en 2006, à la fin de la guerre entre Israël et le Hezbollah, la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies avait pour ambition d’instaurer une cessation des hostilités et d’établir un cadre de sécurité durable. Elle impose notamment le retrait des forces israéliennes, le déploiement de l’armée libanaise et de la Finul dans le sud du Liban, et le désarmement des groupes armés non gouvernementaux.

Si le Liban s’est engagé à respecter cette résolution, sa mise en œuvre reste partielle. Le Hezbollah et ses alliés politiques assurent que depuis 2006, aucune manifestation armée n’a été observée au sud du Litani. En revanche, Israël affirme que la situation a évolué, notamment après les récents affrontements d’octobre 2023, et considère que la 1701, dans sa version actuelle, n’est plus adaptée. L’idée d’une version étendue, surnommée « 1701+ », fait ainsi son chemin dans les cercles diplomatiques israéliens et américains.

Sur la scène internationale, les États-Unis continuent d’appuyer fermement les positions israéliennes. Qu’il s’agisse de l’administration Biden ou de celle de Donald Trump auparavant, le soutien américain à Israël reste constant. Si le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a exprimé des réserves sur la résolution 1701, ni Israël ni Washington ne l’ont officiellement rejetée. Toutefois, Israël milite pour une révision des termes, insistant sur des garanties supplémentaires pour sa sécurité.

Du côté libanais, la position est claire : le Liban est prêt à appliquer pleinement la résolution 1701, mais sans modifications ni ajouts, comme l’ont rappelé le président Nabih Berri et le Premier ministre Nagib Mikati lors de récents échanges avec des responsables internationaux.

Face à l’impasse autour de la résolution 1701, l’accord d’armistice de 1949 refait surface comme une piste à explorer. Ce texte, signé peu après la création de l’État d’Israël, repose sur un équilibre simple : le retrait des combattants du Hezbollah au nord du Litani serait accompagné d’un recul équivalent des forces israéliennes au sud. Une telle configuration pourrait réduire les frictions directes et offrir un cadre temporaire de stabilité.

Mais cet accord, bien qu’encore valide juridiquement, est loin de résoudre les problématiques sous-jacentes. Des questions territoriales, comme les fermes de Chebaa ou les collines de Kfarchouba, ainsi que les revendications israéliennes sur les ressources en eau du Litani, restent des points de discorde majeurs. Pour le Liban, céder sur ces sujets serait inenvisageable.

À ces tensions externes s’ajoutent des fractures internes au Liban. Certaines forces politiques appellent à coupler l’application de la résolution 1701 avec celle de la résolution 1559, qui exige le désarmement de toutes les milices. Mais dans un contexte où le Hezbollah est activement engagé dans des affrontements avec Israël, ces appels divisent profondément la scène politique libanaise.

Pour beaucoup, discuter d’une stratégie nationale de défense ne peut se faire que dans un cadre de dialogue global, après l’élection d’un nouveau président et la formation d’un gouvernement capable de rétablir un minimum de consensus.

Si l’accord d’armistice de 1949 est remis sur la table, c’est parce qu’il représente une option simple et existante pour limiter les tensions immédiates. Cependant, il ne saurait constituer une solution à long terme. Sans un règlement des différends territoriaux et des ambitions stratégiques, tant du côté libanais qu’israélien, les racines du conflit restent intactes.

À cela s’ajoute la question plus large de la cause palestinienne, indissociable de tout règlement régional. Le spectre d’un statu quo précaire, comme celui qu’a connu la région après 2006, reste donc probable. Les accords, qu’ils soient anciens ou nouveaux, ne pourront stabiliser durablement la frontière que si un véritable processus de négociation s’engage, avec des garanties pour toutes les parties.

Ce n’est pas la première fois que l’on évoque le retour à l’armistice de 1949, mais le contexte d’aujourd’hui en fait une option plus pressante que jamais. Reste à savoir si les acteurs impliqués sont prêts à faire les compromis nécessaires pour sortir de l’impasse actuelle.

Ibrahim CHAHINE

Doctorant en droit et enseignant – Université Paris Panthéon-Assas

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Alors que les tensions persistent entre Israël et le Hezbollah, les discussions autour d’une solution durable refont surface. Parmi les idées évoquées, un retour à l’accord d’armistice signé en 1949 entre le Liban et Israël. Cet accord, qui reste juridiquement en vigueur, pourrait offrir un cadre minimal pour stabiliser la frontière, mais sa faisabilité dans le contexte actuel est...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut