Après avoir déclaré dimanche que « l’internet au Liban était en danger » sur fond d’offensive israélienne élargie contre le Hezbollah depuis fin septembre, le ministre sortant des Télécoms, Johnny Corm, a indiqué lundi à L’Orient-Le Jour qu’il était en discussion avec deux entreprises européennes pour le déploiement d’un système alternatif par satellite, et non plus uniquement avec la compagnie SpaceX du milliardaire américain Elon Musk et son service internet Starlink.
L’adoption du système Starlink, par exemple activé en juillet dernier dans un hôpital de la bande de Gaza en guerre avec Israël, a été discutée avec les instances économiques, mais est empêchée par « deux obstacles majeurs », explique le ministre : « Le premier est d’ordre sécuritaire – je n’ai pas eu d’autorisation par écrit – et le second d’ordre commercial. » Au fil des négociations avec la compagnie américaine, « le discours a changé, tout d’abord sur les tarifications et les escomptes négociés au préalable, mais aussi sur certains aspects techniques », détaille-t-il. « La compagnie affirme désormais qu’elle ne peut pas nous fournir les données, et qu’il faut qu’on installe des serveurs au Qatar ou en Allemagne », précise Johnny Corm, ce qui serait contraire à la loi n° 81 qui régit la protection des données personnelles.
« Les services sécuritaires ont émis des réserves sur l’utilisation de Starlink notamment concernant la protection des données », explique à L’OLJ Abed Kataya, responsable du programme média à SMEX, une organisation dédiée à la promotion d’un internet libre au Moyen-Orient. Celui-ci affirme qu’il existe d’autres alternatives, notamment en Europe, que le ministre a mentionnées mais qui pourraient être plus coûteuses. Toutes les solutions satellites « seraient distribuées via (la compagnie libanaise de téléphonie fixe) Ogero, plutôt que de fournir des appareils individuels afin de sécuriser la connectivité pour le public ». « Nous négocions en ce moment avec d’autres compagnies, (la française) SES et (l’américaine) Oneweb », confirme le ministre à notre publication.
Droits internet exclusifs à l’État libanais
Pour des organismes comme SMEX, s’engager avec le système Starlink signifie le faire d’une manière qui ne viole pas la loi n° 431 de 2002, qui accorde des droits internet exclusifs à l’État libanais, la crainte étant que SpaceX, qui ne dispose pas de bureau au Liban et n’a pas de statut juridique, se voit accorder un accès aux données des utilisateurs sans aucun cadre juridique.
Dimanche, Johnny Corm a donc affirmé que « l’espace aérien libanais est ouvert et que les Israéliens s’y déplacent à leur guise », constituant une menace pour la cybersécurité du pays. Depuis l’offensive israélienne le 23 septembre dernier, des drones de surveillance survolent constamment de nombreuses régions du pays, tandis que les signaux de géolocalisation sont régulièrement brouillés. Lors d’une interview à la chaîne télévisée locale LBCI, le ministre a estimé que l’offensive israélienne au Liban avait mis hors service 175 stations de l’opérateur de téléphonie mobile Touch, dont 9 sont totalement détruites et 11 partiellement, et 161 stations de l’autre opérateur de téléphonie mobile Alfa. Il a précisé que les stations détruites se situent dans la banlieue sud de Beyrouth, au Liban-Sud et dans la Békaa, trois zones bombardées de manière intense par l’aviation israélienne.
Par ailleurs, le ministre a annoncé que l’État avait conclu un accord avec Microsoft afin que les écoliers et les enseignants du secteur public puissent travailler sur le logiciel Teams, même sans être connectés à internet. « Nous travaillons sur le mécanisme », a-t-il précisé. Il a également indiqué avoir soumis au Conseil des ministres un projet permettant de doubler la vitesse et la qualité d’internet au même prix que celui appliqué durant la pandémie de Covid-19, dans l’objectif d’améliorer le service à la population.
*Cet article a été modifié le 12 novembre 2024 suite à une erreur : les négociations avec la compagnie SpaceX pour l'installation du système satellitaire Starlink au Liban sont toujours en cours.
Rassurez-vous, l’Internet ne sera pas coupé au Liban, vu que c’est (partiellement) grâce à ça que nos voisins du sud arrivent à localiser leurs cibles… en tout cas tant qu’il leur restera des gens à cibler…
14 h 12, le 12 novembre 2024