
« Gothique » pourrait résumer l’atmosphère particulière de cette ligne. Photo CIN
Cindy Abi Chala est une terreur dans son genre. Cette créatrice de mode née de parents libanais à Paris – et qui y vit toujours – a grandi dans l’univers d’une mère artiste-peintre qui nourrit en elle et son frère une passion pour toutes formes d’expression. Très vite, alors qu’elle est étudiante en communication, forte d’un master en communications de la mode obtenu à l’EFAP, elle prend conscience que « la mode est la forme d’art la plus audacieuse », du moins pour elle. La forme que prend l’urgence de tester ce médium la pousse à s’emparer des anciens pyjamas et chemises de son père pour les transformer, « en refaire de nouvelles pièces modernisées », dit-elle. Sa mère craint alors, à juste titre, pour ses propres vêtements. La jeune créatrice complète alors sa formation en design de mode à L’Istituto Marangoni de Milan, où elle développe sa première collection.
Sobre et romanesque, chaque vêtement incarne un savoir-faire. méticuleux .Photo CIN
Ce qu’elle sait, dès le départ, c’est qu’elle va prendre pour base de travail des tissus de stocks dormants et des textiles recyclés. « Je ne voulais pas créer juste pour créer à une époque où l’industrie de la mode est l’un des principaux contributeurs au changement climatique », affirme-t-elle, ajoutant : « C’est un défi, mais je crois qu’il existe des moyens pour les marques de produire mieux, plus lentement, de manière plus consciente et d’offrir aux consommateurs la possibilité de consommer mieux tout en étant “stylé”. » Elle fonde alors sa marque, CIN, comme Cindy, avec pour principe l’image d’une maison de couture « qui respecte les créations élaborées, le luxe conscient et la fluidité des genres ». Sa première collection est livrée le 25 avril, jour de son anniversaire. Elle la baptise « Naissance ».
Sombre, romanesque, cette petite ligne de dix pièces touille avec un charme éthéré le mystique et le mythique, le sombre et le mystérieux. « Gothique » pourrait résumer cette atmosphère particulière, n’était l’interprétation personnelle de ce genre un peu trop galvaudé. « Chaque vêtement est une symphonie de textures et de silhouettes, conçue pour transporter celui qui le porte dans un voyage de découverte de soi et de romance sombre », détaille la créatrice. « Confectionné à Paris même, chaque vêtement incarne un savoir-faire méticuleux et une attention sans faille aux détails, élevant chaque point au rang de l’art portable », ajoute celle qui tente désormais de faire de chacune de ses créations « une œuvre d’art audacieuse ».
Cette « Naissance » est soulignée par la délicate dentelle, également issue de stocks dormants, de la maison Sophie Hallette. S’y entremêle laine et maille de grande qualité sourcées chez Nona Source, également issues de stocks en fin de course. Talent à suivre, Cindy Abi Chala voit la mode comme une musique tactile « de textures qui enveloppent la personne dans un cocon de luxe conscient ». L’idée d’insuffler une nouvelle vie à des matériaux oubliés, de défendre la durabilité, la poursuit dès ses premières expériences. Le résultat se détaille en pièces sensuelles, de l’ensemble lingerie Porte-Jarretelle au haut dentelle à col montant, dos nu et manches surdimensionnées, au Panta-corset et au Panta-jupe, en passant par une veste de costume sans manches, une veste de costume kimono ou un haut déstructuré à manches amovibles, ou encore, pièce maîtresse de cette « couture mystique », une robe maxi en dentelle noire près du corps, à manches extralongues, à elle seule une danse.