Dans la longue série spéciale dédiée aux cent ans de L’Orient-Le Jour, un pas de côté. Pour ce numéro spécial, nous avons fouillé notre mémoire numérique. Car nous en avons une aussi. Elle n’est pas centenaire, évidemment, mais elle a presque trente ans déjà, puisque notre présence en ligne remonte à 1997.
Grâce à certains sites spécialisés, il est possible de retrouver d’anciennes versions du site de L’Orient-Le Jour qui a vécu plusieurs mues depuis sa naissance. Des mues auxquelles, étant donné la jeunesse de notre histoire en ligne, nombre d’entre nous, au sein de la rédaction, ont activement participé, tandis que d’autres faisaient la moue face à ce qu’ils considéraient comme du sous-journalisme menaçant notre héritage. Que de chemin parcouru, alors qu’aujourd’hui, pour une large portion de la rédaction, le jargon du papier tient de la langue morte…
Des voyages dans ces archives-là, nous sommes revenus avec deux conclusions. La première : les différentes versions du site dont nous étions si fiers, à chaque fois, au moment de leur mise en ligne, nous semblent aujourd’hui, au mieux, datées, au pire, affreuses. La seconde : l’essentiel est clairement – et heureusement – ailleurs.
L’essentiel est ce que disent nos archives numériques de l’évolution rapide et constante dans laquelle est happé le monde des médias depuis quelques décennies. L’histoire s’accélère, les possibles se multiplient, et avec eux les opportunités, les risques et les défis.
Aujourd’hui, la technologie nous permet, par exemple, de rassembler une masse colossale d’informations sur notre lectorat, c’est-à-dire vous. Rassurez-vous, nous ne vous suivons pas individuellement. En revanche, nous pouvons dessiner quatre ou cinq profils de lecteur de L’Orient-Le Jour selon les habitudes et supports préférés de lecture, la localisation géographique, les heures de connexion, l’engagement et l’avidité avec lesquels vous nous lisez, etc. Ce que l’on pouvait faire, avant, à l’échelle de la gazette de Locronan, nous pouvons le faire à toutes les échelles, de la nôtre à celle du New York Times.
Avec toujours le même objectif : répondre au mieux à vos attentes. Voilà pour les opportunités.
Aujourd’hui, la technologie, et plus spécifiquement l’intelligence artificielle, permet aussi de faire dire à Riad Salamé, en moldave, qu’il regrette ses ingénieries financières, ou à Nabih Berry, en ourdou, qu’il lâche le perchoir. Voilà pour les risques – cette si difficilement détectable duperie –, et ils sont majeurs pour l’avenir de nos sociétés.
Aujourd’hui, la technologie nous aide, nous interpelle, nous interroge, mais surtout elle nous met, nous journalistes, au défi. Au défi d’être toujours plus singuliers, plus créatifs, plus professionnels et plus exigeants, en tant que journalistes et en tant que journal, pour remplir notre mission première, essentielle dans un monde de plus en plus manipulable : donner à chacun d’entre nous la possibilité d’être un citoyen éclairé.
L’aventure, en somme, ne fait que commencer.