L’ambivalence de la guerre actuelle menée par le gouvernement israélien avec le soutien des États-Unis contre Gaza et les milices iraniennes réside dans le fait que les Israéliens comme les Américains sont en grande partie responsables de la configuration géopolitique explosive du Levant et de la mainmise iranienne sur la région.
Depuis l’invasion américaine de l’Irak en 2003, une grande partie des pays de la région ont vu leurs structures étatiques se disloquer. La volonté du président Obama de retirer les troupes américaines d’Irak, comme il l’avait promis durant la campagne présidentielle de 2008, a offert le pays au régime iranien sans que les Irakiens puissent retrouver leur souveraineté. Les manifestations populaires de 2019-2021, qui ont touché le pays et qui ont été écrasées dans le sang par les milices chiites pro-Iran dans l’indifférence, sont à l’image de ce qui s’est passé en Syrie et au Yémen après la vague révolutionnaire de 2011. La mainmise de l’Iran sur ces pays à travers ses milices terroristes s’est réalisée au nom de la lutte contre l’impérialisme états-uniens et le sionisme.
Quand « Bibi » protège Assad
Pour obtenir un accord sur le nucléaire iranien, Barack Obama a notamment mis un terme à l’opération Cassandre de la DEA, l’agence américaine chargée de lutter contre le trafic de drogue. La DEA avait réussi à établir une cartographie complète de la branche du Hezbollah responsable du trafic de drogue et était sur le point de démanteler la principale ressource financière de la milice chiite. Mais le président Obama en a décidé autrement, et l’opération a été avortée. Au Yémen, l’administration Obama ferme les yeux sur le coup d’État des houthis, alliés du régime iranien. En août 2013, malgré la ligne rouge qu’Obama avait fixée, il renonce à intervenir en Syrie après le massacre chimique de la Ghouta perpétré par Bachar el-Assad. Mais l’on connait moins l’intervention de Benjamin Netanyahu en faveur du président syrien : dans ses Mémoires, Michael Oren, ambassadeur d’Israël aux États-Unis en 2013, décrit l’action diplomatique du gouvernement israélien et explique que c’est Yuval Steinitz, ministre du Renseignement et des Affaires stratégiques, et Netanyahu lui-même qui ont mis en œuvre le processus diplomatique de sortie de crise. L’arsenal chimique syrien constituant une menace pour la sécurité d’Israël, cet accord représentait une formidable occasion pour l’administration américaine de renforcer la sécurité de l’État hébreu. Ce sont ces raisons qui ont poussé le gouvernement israélien à s’opposer à des frappes militaires américaines contre le régime de Damas. En favorisant le maintien d’Assad, Benjamin Netanyahu a par la même occasion renforcé la mainmise de l’Iran sur la Syrie.
L’ère Obama a été le point culminant de l’occupation iranienne du Levant, un des architectes de ce désastre géopolitique est Robert Malley, principal négociateur de l’accord sur le nucléaire iranien. En 2021, Joe Biden le nomme émissaire pour l’Iran et en 2023 il est débarqué de son poste à la suite de fuites de données confidentielles et trois de ses collaborateurs ont par la suite été limogés. Ces trois collaborateurs sont accusés par Iran International, un média d’opposition au régime iranien, d’être sous l’influence de la République islamique.
L’Iran prospère en s’imposant sur la faillite des structures étatiques, et le Liban n’échappe pas à cette règle. Liban, Syrie, Irak et Yémen ont toujours été des bases de soutien populaire aux Palestiniens, mais la quête de ces populations pour se défaire de l’occupation et des ingérences qu’elles subissent ne permet pas aujourd’hui de répondre à l’appel de Gaza martyrisée. Quant aux pays du Golfe, tétanisés par l’avancée iranienne au Levant, ils ont pactisé avec Israël sous le parrainage de Donald Trump à travers les accords d’Abraham.
Normalisation de la barbarie
En Syrie, la destruction de villes comme Homs ou Alep, ainsi que l’expulsion forcée de plus de la moitié des Syriens de leur foyer par Assad et les milices iraniennes, s’est effectuée sous le prétexte qu’il s’agissait d’une étape nécessaire à la libération de la Palestine. En 2015, Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah, affirmait que la route vers Jérusalem passait par Qalamoun, Zabadani et Homs, des localités syriennes alors contrôlées par les rebelles, et qu’il était donc nécessaire de combattre les opposants à Assad d’après le « sayyed ». Un comble pour les Syriens, qui ont toujours soutenu la cause palestinienne. À travers leur soutien à Assad, le Hezbollah et plus largement les milices iraniennes ont contribué à normaliser la barbarie. Si Benjamin Netanyahu se permet aujourd’hui ce niveau d’atrocité à Gaza, c’est grâce à une jurisprudence qui a fait de l’impunité d’Assad et de ses alliés la règle.
Dans ce Moyen-Orient décomposé par les ingérences, quel choix s’offrait aux Palestiniens sinon de se tourner vers le régime iranien par l’intermédiaire du Hamas ? Deux décennies de liquidation du processus de paix, orchestrée par la droite et l’extrême droite israélienne avec un soutien indéfectible des États-Unis, ont renforcé le Hamas. Et comme le rappelle le journaliste Charles Enderlin, M. Netanyahu a veillé à permettre le financement du Hamas par le Qatar pour empêcher la création d’un État palestinien. Dans ce Moyen-Orient sous l’influence de la République islamique, et alors que les pays du Golfe se sont détournés de la Palestine pour contrer l’avancée iranienne, le seul allié de circonstance du Hamas est le régime iranien. Cette situation est le résultat des inconséquences géopolitiques des différentes administrations américaines et de la volonté de la droite et de l’extrême droite israélienne de soumettre les Palestiniens à leur domination.
Lorsque la menace iranienne se rapproche d’Israël, l’inquiétude pousse les États-Unis à envoyer plusieurs navires de guerre dans la région, et la France ainsi que la Grande-Bretagne affirment qu’elles participeront à la défense d’Israël en cas d’attaque iranienne. Les populations arabes du Levant n’ont jamais bénéficié d’une telle attention, malgré les innombrables crimes commis par les milices de la République islamique, qui ont modifié en profondeur l’avenir du Moyen-Orient.
Opposant et essayiste syrien. Dernier ouvrage : « Syrie, la révolution impossible » (Aldeïa, 2023).
Arrêtez de parler de : "sionistes" et "sionisme"...s'il vous plaît...! Regardez vous dans un miroir..faites votre aggiornamento... remettez-vous en cause . !!! Vous êtes les Acteurs de Vos Malheurs..!! Le Cerveau Arabe n' arrête pas de m'accabler par son incapacité à se remettre en cause..! Tout est la faute des autres.. Vous êtes incapables de vous remettre en cause... C'est terrible...!!!
15 h 59, le 02 septembre 2024