Fadi Khatib lors de l'une de ses dernières apparitions sous le maillot de l'équipe nationale du Liban de basket. Photo FIBA
« Je souhaite que le Liban puisse être prêté aux Émirats arabes unis pendant dix ans pour qu'ils dirigent et reforment le pays afin de le rendre avec des structures saines et un leader approprié. C'est ce que j'espère pour le Liban. » Ces mots de Fadi Khatib, tenus lors d'une interview donnée à un podcast intitulé « The Insight Track with Luca Allam », un entrepreneur britannique, et publiée sur sa chaîne YouTube vendredi, ne sont pas passés inaperçus auprès des internautes libanais.
Alors qu'il était interrogé sur son image d'icône au Liban et les raisons de sa participation à la « thaoura » en octobre 2019, l'ancien capitaine de la sélection nationale de basket s'est largement épanché sur la situation politique du pays. Après avoir dénoncé la « corruption » du système et l'influence des partis confessionnels dans le basket, il a également donné son avis sur ce que pourrait être un avenir souhaitable pour le pays du Cèdre.
« La question n'est pas de savoir ce que je peux apporter au Liban. Le pays a besoin de plus car dès que quelqu'un essaie de faire quelque chose de bien pour le pays, il y a tout un ensemble de gens qui vont te tirer vers le bas », estime-t-il à propos des multiples propositions qui lui ont été faites de devenir ministre des Sports.
Et de déclarer : « Je souhaite que le Liban puisse être donné ou loué aux Émirats arabes unis pendant dix ans pour qu'ils dirigent et reforment le pays afin de le rendre avec des structures saines et un leader approprié. Comme lorsqu'un entrepreneur va voir une institution financière parce que son entreprise a fait faillite pour lui demander de tout restructurer. Pour faire cela, je choisirais sans aucun doute les dirigeants émiratis car ils ont mis sur pied l'un des meilleurs pays au monde ».
« Nouvelle occupation »
Isolé puis publié sur les réseaux sociaux, cet extrait a suscité pléthores de réactions. De nombreux internautes ont ainsi dénoncé le fait que l'ancien joueur de Sagesse, avec qui il a remporté sept titres de champion du Liban d'affilée et deux Coupes d'Asie, propose en substance une nouvelle « occupation » ou un nouveau « mandat » sur le Liban à une puissance étrangère. « À l’heure où tout le monde espère que le Liban devienne véritablement indépendant, Fadi Khatib propose une solution géniale en appelant à nouveau à occuper le Liban », écrit par exemple une utilisatrice de X. « C'est le même discours que ceux qui disaient vouloir un retour du mandat français », commente un autre, en référence à la pétition qui avait été lancée après la double explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020.
D'autres ont également accusé les « dirigeants émiratis » qu'ils souhaitent voir « prendre le relais » au Liban d'être des « alliés d'Israël », avec lequel le Liban est au bord de la guerre dans un contexte de regains de tensions régionales, et que le basketteur tienne ce genre de propos en étant « confortablement installé à Dubaï ».
Le natif de Chhim dans le Chouf s'est en effet définitivement installé aux Émirats arabes unis depuis 2020, notamment après avoir été blessé lors d'une manifestation de la « thaoura ». « J'aime Beyrouth à la mort, mais ils nous ont poussés dehors », regrette-t-il dans cette même interview, dont l'extrait en question a été retiré du replay visionnable sur YouTube. Contacté par L'OLJ, Fadi Khatib n'a pas répondu à nos sollicitations.
Officiellement retraité du basket professionnel depuis mai 2023, à 43 ans, après un retour avorté à Sagesse, Fadi Khatib a remporté onze titres de champion du Liban avec trois clubs différents, Sagesse, Riyadi et Homenetmen. Il compte également trois participations à la Coupe du monde de basket avec la sélection libanaise, dont il fut le capitaine le plus emblématique. Il a lancé plusieurs affaires au Liban et à l'étranger en parallèle de sa carrière, dont une académie sportive baptisée Champs, dont l'un des établissements se situe à Hazmieh, près de Beyrouth.
Tant qu'a faire, si le Liban devait se retrouver sous mandat, il vaudrait mieux choisir un pays comme, disons, l'Allemagne ou encore l'Espagne, plutot que les vulgaires Emirs du golfe....
17 h 30, le 06 août 2024