Poème d’ici

Poème d’ici de Mahmoud Darwich

Poème d’ici de Mahmoud Darwich

D.R.

Extraits du poème de Mahmoud Darwich (traduit de l’arabe par Elias Sanbar), « Le Dernier Discours de l’Homme rouge », composé en 1992 à l’occasion des célébrations du cinq-centenaire de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb…

« (…) Et il y a morts et colonies, morts et bulldozers, morts et hôpitaux, morts et radars surveillant des morts qui plus d’une fois s’éteignent dans une vie, des morts qui survivent après trépas, des morts qui enseignent la mort au monstre de civilisations, et des morts qui trépassent pour transporter la terre au-dessus des restes des défunts.

Ô maître des Blancs, où emportes-tu mon peuple et le tien ? Vers quel gouffre ce robot hérissé d’avions et de porte-avions entraîne-t-il la terre ? Vers quel gouffre béant montez-vous ? Et tout ce que vous désirez vous échoit. La nouvelle Rome, la Sparte de la technologie et l’idéologie de la folie. Quant à nous, nous fuirons un temps pour lequel nous n’avons pas encore apprêté notre obsession. Nous nous en irons vers la patrie de l’oiseau, volée d’humains avant-coureurs. Des gravats de notre terre, nous verrons notre terre  ; de trouées dans les nuages, nous verrons notre terre  ; de la parole des étoiles, nous verrons notre terre  ; et de l’air des lacs, du duvet du maïs fragile, de la fleur des tombes, des feuilles du peuplier, de tout ce qui vous encercle, ô Blancs, morts qui trépassent, morts vivants, morts qui ressuscitent, morts qui divulguent le secret. Laissez donc un sursis à la terre. Qu’elle dise la vérité, toute la vérité. Quant à vous, quant à nous. Quant à nous, quant à vous.

Il y a des morts qui sommeillent dans les chambres que vous bâtirez. Des morts qui visitent leur passé dans les lieux que vous démolissez. Des morts qui passent sur les ponts que vous construirez. Et il y a des morts qui éclairent la nuit des papillons, qui arrivent à l’aube pour prendre le thé avec vous, calmes tels que vos fusils les abandonnèrent. Laissez donc, ô invités du lieu, quelques sièges libres pour les hôtes, qu’ils vous donnent lecture des conditions de la paix avec les défunts. »

Extraits du poème de Mahmoud Darwich (traduit de l’arabe par Elias Sanbar), « Le Dernier Discours de l’Homme rouge », composé en 1992 à l’occasion des célébrations du cinq-centenaire de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb…« (…) Et il y a morts et colonies, morts et bulldozers, morts et hôpitaux, morts et radars surveillant des morts qui plus d’une fois...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut