La Libye ferme son poste-frontière avec la Tunisie après des affrontements

La Libye a fermé mardi son principal poste frontalier avec la Tunisie après des affrontements entre groupes armés et forces de sécurité du côté libyen de la frontière, a annoncé le ministère de l'Intérieur à Tripoli.

Dans un communiqué, le ministère a indiqué avoir ordonné la « fermeture immédiate » du poste-frontière de Ras Jedir « à la suite d'une attaque menée par des groupes hors-la-loi » impliqués notamment dans des activités de contrebande qu'ils « considèrent comme un droit acquis ». Cette fermeture vise à permettre « la mise en place de dispositions sécuritaires » et à assurer son bon fonctionnement « sous l'autorité de l’État », selon le texte.

Certains comptes de réseaux sociaux libyens ont affirmé que l'attaque avait été menée par un groupe armé appelé du nom de la ville de Zouara, où vit une population majoritairement berbère amazigh à l’est de Ras Jedir, contrôlé par le gouvernement d'unité nationale libyen basé à Tripoli. Des tensions émaillent régulièrement cette zone, certains responsables locaux s’opposant au déploiement des forces de sécurité envoyées par le Premier ministre Abdel Hamid Dbeibah près de Zouara.

« Nous ne tolérons plus ce chaos » à Ras Jedir, a averti le ministère, ajoutant que les groupes « hors-la-loi », qu'il n'a pas identifiés, seront « poursuivis en justice et punis sévèrement ».

Lundi, le ministre de l'Intérieur, Imad Trabelsi, avait chargé la « Force de l'application de la loi », rattachée à son ministère, d'intervenir à Ras Jedir afin de « combattre la contrebande et les abus » et assurer la sécurité des voyageurs.

Les autorités tunisiennes ont également fermé leur côté du passage dans la nuit de lundi à mardi, à la suite d'«escarmouches» sur le territoire libyen. 

Situé dans le nord-ouest de la Libye, à quelque 170 kilomètres à l'ouest de Tripoli, Ras Jedir est le principal point de passage entre l'ouest de la Libye et le sud-est de la Tunisie, un territoire qui vit en grande partie du commerce transfrontalier, y compris de la contrebande. Récemment, la zone transfrontalière a connu un afflux de migrants coincés du côté libyen après que le président tunisien Kais Saied a durci sa répression contre l'immigration clandestine. Le pays est devenu en 2023 le principal point de départ des migrants tentant de rejoindre l’Union européenne (UE) via l’Italie.

En juillet dernier, la Tunisie et l'UE ont signé un « migrant deal » (accord sur les migrants) pour limiter l'arrivée de ceux d'entre eux qui sont en situation irrégulière sur le sol européen. Dans cette optique, Tunis et Tripoli avaient convenu d'en héberger conjointement des centaines à Ras Jedir. Mais l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a alerté en décembre sur les agissements de la la Garde nationale tunisienne, détenant arbitrairement et expulsant vers les frontières, libyenne et algérienne, les personnes interceptées.

Des groupes issus des villes libyennes dans la zone contrôlent depuis des années le poste frontalier qu'ils considèrent comme leur chasse gardée, étant situé dans leur région et qui leur permet de se livrer à un commerce informel très lucratif. 

La fermeture de ce poste interrompt le passage des marchandises dans les deux sens mais également le déplacement de nombreux ouvriers tunisiens qui travaillent en Libye et celui des Libyens se rendant en Tunisie, notamment pour s'y faire soigner.