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Politique - Décryptage

Pourquoi le Hezbollah n’a pas revendiqué l’attaque contre la base de Safed

Le mystère de l’attaque contre la base militaire israélienne à Safed, à 15 km de la frontière libanaise, qui a fait des morts parmi les soldats mercredi dernier, reste entier. Les Israéliens attendaient en effet le discours du secrétaire général du Hezbollah vendredi pour voir s’il allait aborder ce sujet ou même revendiquer cette attaque, mais il ne l’a pas évoqué, ni de près ni de loin, et les Israéliens continuent à se demander qui est derrière cette attaque qui les a surpris et poussés à mener de violentes représailles à Nabatiyé et ailleurs. De l’avis d’experts militaires, cette attaque était surprenante non seulement par son audace, mais aussi en raison des dégâts humains et matériels qu’elle a causés et de la nature des missiles utilisés. Mais ils sont catégoriques pour affirmer que, dans le paysage militaire actuel au Liban, seul le Hezbollah détient des armes aussi sophistiquées. Dans ce cas, pourquoi le Hezbollah ne revendique-t-il pas cette attaque, comme il le fait en général pour chaque opération ? De fait, depuis le 8 octobre 2023, date de l’entrée du Hezbollah dans la bataille qui se joue à Gaza, en tant que « front de soutien » selon les propres termes de Hassan Nasrallah, cette formation est en train d’utiliser un même type de missiles, les Katioucha et les Cornet, qu’ils soient traditionnels ou « revisités » de manière à être améliorés. Mais ils restent des armes qui ont une portée limitée à un maximum de 8 km (en général entre 5 et 7 km) et à effet tout aussi limité dans le sens qu’ils n’ont pas une grande puissance destructrice et ils ne sont pas non plus des missiles téléguidés de haute précision. Les rares fois, au cours des mois précédents, où le Hezbollah n’a pas utilisé ces missiles pour aller vers des armes plus sophistiquées, il ne s’est pas privé de le dire, qu’il s’agisse des drones dits « suicides » ou même du missile Falak, qui a une portée de 8 à 10 km. Cela a été notamment le cas après l’assassinat du numéro deux du Hamas Saleh el-Arouri, dans l’attaque contre la base de surveillance aérienne de Meron. C’était d’autant plus important que le Hezbollah voulait, à travers le changement dans la nature des armes, adresser un avertissement aux Israéliens. Cet échange de messages par le biais de la nature des armes utilisées est un langage que tous deux comprennent à la perfection et qui a fonctionné avec efficacité depuis le début du Déluge d’al-Aqsa. Pourquoi, dans ce cas, le Hezbollah ne veut-il pas reconnaître qu’il a utilisé un nouveau type de missiles contre Safed dans un souci de dissuader les Israéliens d’aller plus loin et d’élargir le champ de leurs attaques contre le Liban ?

Selon des experts stratégiques, proches de la « résistance », plusieurs considérations poussent le Hezbollah à ne pas revendiquer cette attaque qui a pourtant atteint ses objectifs. D’après eux, ce qu’on appelle « les règles d’engagement », établies depuis des années et qui continuent à être en vigueur en dépit de certains couacs, reposent sur trois points. D’abord, l’espace géographique. Depuis 2006 et l’adoption de la résolution onusienne 1701, il est convenu d’une manière tacite que les attaques de part et d’autre de la frontière sud du Liban ne doivent pas dépasser les 5 km, au plus 8 km. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle toutes les propositions de solutions émises par les Français et même par les Américains parlent d’une zone démilitarisée de 5 à 10 km, au moins du côté libanais. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si le Hezbollah, tout en rejetant toute négociation avant la fin de la guerre à Gaza, laisse entendre qu’il pourrait accepter cela le moment venu, à condition qu’il y ait aussi une zone démilitarisée de la même profondeur du côté israélien. Le second point sur lequel reposent les règles d’engagement, c’est la nature des armes utilisées. Sur la base d’un accord tacite, les deux parties ne devraient pas utiliser des armes de longue portée ni des missiles de haute précision. Or, justement, dans l’attaque contre Safed, c’est un nouveau type de missiles qui a été lancé. Il a, à la fois, une plus longue portée (10 à 15 km) et une tête téléguidée d’une très haute précision. On a ainsi parlé de missiles de fabrication iranienne qui sont très ciblés, au point de n’exploser que lorsqu’ils touchent la cible visée, tout en causant beaucoup de dégâts. D’ailleurs, à ce sujet, certains observateurs ont estimé que la raison du silence du Hezbollah serait justement la volonté iranienne de ne pas montrer qu’ils ont donné ce type de missiles à la formation chiite et le fait que les Iraniens n’auraient pas donné leur accord pour leur utilisation. Cette allégation est démentie par les experts précités qui affirment que lorsque les Iraniens donnent ces missiles au Hezbollah, c’est bien pour qu’ils les utilisent et que la coordination est totale entre les deux parties. Enfin, le troisième élément sur lequel reposent les règles de la confrontation, c’est la nature des cibles visées. En principe, celles-ci ne devraient pas être aussi précises et elles ne peuvent l’être que lorsqu’il s’agit de missiles sophistiqués de haute précision, que le Dôme de fer autour des bases militaires israéliennes devrait intercepter, ce qui n’était pas le cas lors de l’attaque contre Safed.

Il est clair après cet exposé que l’attaque contre la base militaire de Safed n’a pas respecté les trois principes en vigueur. Pour cette raison, les experts précités estiment que le Hezbollah ne souhaite pas revendiquer l’attaque, l’essentiel pour lui étant que le message parvienne à ses destinataires.

Le mystère de l’attaque contre la base militaire israélienne à Safed, à 15 km de la frontière libanaise, qui a fait des morts parmi les soldats mercredi dernier, reste entier. Les Israéliens attendaient en effet le discours du secrétaire général du Hezbollah vendredi pour voir s’il allait aborder ce sujet ou même revendiquer cette attaque, mais il ne l’a pas évoqué, ni de près...

commentaires (5)

Excellente analyse !

nabil samir

22 h 50, le 20 février 2024

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Commentaires (5)

  • Excellente analyse !

    nabil samir

    22 h 50, le 20 février 2024

  • Un article qui passe le mur du son de l’incrédulité. Comme si les israéliens ne connaissaient pas en détail la composition de l’arsenal de cette milice… Et dans la course a la technologie militaire, il ne faut pas Einstein pour comprendre qui va être le grand perdant… Malheureusement Scarlett répète ce que certains croient dur comme fer, et c’est ce qui est le plus tragique dans cette triste histoire.

    Mago1

    15 h 37, le 20 février 2024

  • Les performances dans la fabrication des armes n’ont pas de limites. Et cet article richement détaillé nous a donné des informations qu’on ignorait complètement.

    Hitti arlette

    13 h 37, le 20 février 2024

  • Combien de bêtises peut on écrire dans un seul article. Demandez à Mme Haddad qui détient ce record et à la direction de l’OLJ qui les publie

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 08, le 20 février 2024

  • PROMOTION A L,OLJ DE LA DESINFORMATION ! CENSURE DES VERITES ECRITES PAR LES ABONNE(E)S DOMMAGE OLJ ! DOMMAGE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 37, le 20 février 2024

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