L'ex-Premier ministre libanais, Saad Hariri, s'est offert un bain de foule mercredi à Beyrouth, où il était de passage pour se recueillir sur la tombe de son père, Rafic Hariri, également ancien président du Conseil, assassiné il y a 19 ans dans un attentat.
Saad Hariri s'était mis en retrait de la politique libanaise en janvier 2022 et réside désormais aux Émirats arabes unis. Mais son retour à Beyrouth cette année est scruté de près, autant par les figures politiques que par les partisans du Courant du Futur, le parti qu'il dirigeait. Certains espèrent en effet qu'il réintégrera la scène politique libanaise, alors que la communauté sunnite ne parvient pas à s'unir autour d'un leader depuis son départ.
A Beyrouth, sous les vivats de la foule, M. Hariri a salué les milliers de ses partisans présents sur la place des Martyrs et serré quelques mains, entouré d'une horde de militaires et policiers. Après s'être recueilli devant la tombe de Rafic Hariri, aux côtés de sa tante Bahia Hariri, il s'est contenté de déclarer : « Le pouls du pays est ici. Préservez-le. Préservez le pays. » Ajoutant : « Chaque chose en son temps ».
Avant son arrivée, la place des Martyrs, ornée de grands portraits des deux anciens Premiers ministres, s'était noircie de monde, malgré la pluie. La foule scandait des slogans à la gloire du père et du fils Hariri, tandis que des feux d'artifice étaient tirés dans les environs. Des chants partisans étaient également diffusés par des haut-parleurs.
« Tout le Liban aime » Rafic Hariri
« Saad Hariri est absent depuis deux ans, mais tous ces gens sont ici malgré tout, sans que l'on ait besoin d'appeler à un rassemblement. Cela nous rend fiers. Je demande à Saad Hariri de revenir sur sa décision concernant la suspension de ses activités politiques. Qu'il revienne parmi nous pour que nous puissions sauver le Liban de l'effondrement », a déclaré Ahmad Ali, présent à Beyrouth, à L'Orient-Le Jour. « Le cheikh Rafic était le seul à aimer ce pays, et c'est le cas de son fils. Lors de la révolution de 2019, il est le seul à avoir répondu au peuple », a ajouté ce partisan. Saad Hariri avait annoncé la démission de son gouvernement quelques jours après le début des manifestations d'ampleur contre le régime politique, en octobre 2019. Il avait toutefois été à nouveau désigné président du Conseil en octobre 2020, mais avait échoué à former un nouveau cabinet.
« Aujourd'hui, nous nous souvenons de notre bien-aimé » Rafic Hariri, « Tout le monde, tout le Liban l'aime », a de son côté affirmé Ali Nasser, un soldat à la retraite.
« Je vais lui demander de rester »
Pour assister à son passage à Beyrouth, des centaines de personnes se sont rendues dans le centre-ville, afin d'exprimer leur volonté d'un retour politique de M. Hariri, certains ayant fait la route depuis les régions périphériques pour l'occasion. Des centaines de voitures et de bus des fenêtres desquels flottait le drapeau bleu du mouvement du Futur ont ainsi été observées sur l'autoroute au nord de Beyrouth. Des convois de partisans du courant du Futur sont également partis de Saïda (Sud). Avant de monter dans l'un de ces bus, Ibrahim el-Sabeh a confié à L'Orient-Le Jour : « Je vais participer à la commémoration, renouveler mon engagement envers le cheikh Saad et lui demander de rester au pays. Je veux lui dire qu'après son départ, la situation économique s'est effondrée ». Une autre femme présente dans la grande ville du Sud, Arabiya el-Qodsi, a affirmé se rendre à Beyrouth pour « rencontrer Saad Hariri, la lumière du Liban, et lui dire qu'on ne veut pas qu'il parte ».
S'adressant à nouveau succinctement à la foule à la Maison du Centre, sa résidence dans le quartier beyrouthin de Koraytem, Saad Hariri a affirmé : « Où que je sois, je suis avec vous. Saad Hariri n'abandonnera pas les gens ». « Chaque chose en son temps », a-t-il réitéré avant d'appeler ses partisans à « dire à tous que vous êtes de retour et que sans vous, rien ne fonctionne dans ce pays ».
A la Maison du Centre également, l'ex-Premier ministre s'est réuni avec une délégation du Courant du Futur, a indiqué s'être senti, au cours de son passage à Beyrouth « comme en 2005 », lors des grandes manifestations contre l'occupation syrienne du Liban. « Je compte sur vous, et je resterai avec vous », a ajouté M. Hariri, qui a assuré qu'il a « peut-être quitté la politique » mais qu'il ne quittera pas ses partisans. « Nous nous reverrons bientôt ».
Et à l'occasion de la 19e commémoration de l'assassinat de Rafic Hariri, plusieurs figures politiques lui ont par ailleurs rendu hommage.
Son autre fils, Baha' Hariri, qui s'était un temps lancé dans la politique en amont des législatives de 2022 et après le départ de son frère Saad, avant de s'en écarter, a ainsi célébré la mémoire de son père et appelé à « mener à bien son projet de développement économique et politique » au Liban. Ce projet « n'est pas mort » avec Rafic Hariri et « se réunir autour de la vision et du rêve » de l'ex-Premier ministre est, selon Baha' Hariri, « la clé pour résoudre tous les problèmes politiques, économiques, financiers et sociaux dont souffrent toutes les composantes du peuple ».
Combat pour la justice
Fouad Makhzoumi, député de Beyrouth, a salué sur X la mémoire du « martyr de la modération, du dialogue et des positions nationales ». « Nous réclamons une nouvelle fois justice pour les martyrs de la liberté, de l'indépendance et de la souveraineté du Liban », a-t-il ajouté.
Le Tribunal spécial pour le Liban avait condamné par contumace en avril 2021, Salim Jamil Ayache à la prison à perpétuité, avant de décréter en juin 2022 la même peine contre Hassan Habib Merhi et Hussein Hassan Oneïssi. Les trois hommes sont des membres présumés du Hezbollah et ne seront probablement jamais remis à la justice.
Achraf Rifi, député de Tripoli et membre du bloc du Renouveau, comme Fouad Makhzoumi, a pour sa part « promis au martyr et à tous ceux qui sont morts pour l'indépendance que nous continuerons notre combat jusqu'à ce que justice soit faite et que la souveraineté soit respectée ». Il a accusé « l'axe de la Résistance » d'avoir ordonné l'assassinat de l'ex-Premier ministre, rappelant que « ceux qui l'ont tué ont été condamnés par le Tribunal international » et que « des personnalités libanaises ont été assassinées pour que nous puissions obtenir justice ». Il a notamment mentionné « les deux Wissam », Wissam Eid, haut responsable des services de renseignement tué dans un attentat en janvier 2008, alors qu'il était chargé du volet technique de l'enquête sur l'explosion du 14 février 2005, et Wissam el-Hassan, ancien chef des renseignements tué en octobre 2012.
De son côté, le député Samy Gemayel, chef du parti Kataëb, a estimé que « la justice reste incomplète, malgré les condamnations du TSL, qui a prouvé l'implication du Hezbollah qui continue à protéger les coupables ». « Il ne peut y avoir de paix ou de stabilité au Liban sans justice et redevabilité pour tous les crimes commis ». « Nous appelons la famille Hariri, son courant et ses partisans à poursuivre la lutte pour restaurer l'Etat et libérer son pouvoir de décision de la domination des armes », a-t-il ajouté.
Le député Tony Frangié, fils du candidat à la présidence Sleiman Frangié, a lui déploré que « le Liban manque d'hommes d'Etat et de visionnaires, qui travaillent pour la renaissance » du pays. L'ancien ministre Michel Pharaon a pour sa part écrit sur X que « l'assassinat du Premier ministre Rafic Hariri avait pour objectif de tuer le Liban tel que nous le connaissons ». « Le départ de Saad Hariri est une perte nationale majeure », a-t-il poursuivi.
L'ex-chef de la Sûreté générale libanaise, Abbas Ibrahim, a évoqué dans une publication sur X le « souvenir douloureux » de l'assassinat de Rafic Hariri, dans une situation de « vacance mortelle » au Liban. « En ce jour d'amour et dédié à Rafic Hariri, l'espoir demeure que Saad Hariri rétablisse un semblant de l'équilibre que nous avons perdu il y a 19 ans. »
Demandez à la lignée Frangié et Hezbollah qui nous a mis sous tutelle Syrienne et qui nous envoyé deux millions se reposer chez nous sur le dos du contribudiable !
16 h 44, le 16 février 2024