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Moyen-Orient - Focus

Pourquoi les Kataëb Hezbollah suspendent-ils leurs attaques contre les Etats-Unis ?

Dans l'attente de représailles américaines après la mort de trois soldats en Jordanie, le groupe pro-iranien a annoncé mardi soir adopter (temporairement) une posture de défense. 

Pourquoi les Kataëb Hezbollah suspendent-ils leurs attaques contre les Etats-Unis ?

Des combattants des Kataëb Hezbollah, brigades pro-iraniennes faisant partie des Hachd al-Chaabi en Irak. Photo d'archives Ahmad Al-Rubaye/AFP via Getty Images

C’est un virage à 180°. Les Kataëb Hezbollah ont annoncé mardi soir vouloir arrêter leurs attaques contre les « forces d’occupation », entendre américaines, « afin d’éviter un embarras au gouvernement irakien ». Washington avait déclaré plus tôt que la frappe qui a tué trois de ses soldats sur la base de Tower 22 en Jordanie dimanche matin, et blessé des dizaines d’autres, portait « l’empreinte » du groupe armé pro-iranien, prépondérant au sein des Hachd al-Chaabi en Irak. Peu avant l’annonce du mouvement, considéré comme terroriste par les Etats-Unis, Joe Biden avait annoncé avoir pris sa décision quant à une riposte à cette attaque. La réponse se fera « à plusieurs niveaux, viendra par étapes, et s’inscrira dans la durée », avait déjà prévenu la veille le secrétaire d’Etat Antony Blinken. Que signifie la décision inattendue du groupe armé ?

Pression iranienne, médiation irakienne ?

D’aucuns y voient une marque de la pression iranienne sur les Kataëb Hezbollah, alors que la République islamique, qui a nié toute implication dans l’attaque en Jordanie, pourrait craindre une frappe de représailles sur son territoire ou ses intérêts dans la région. De nombreux faucons républicains pressent depuis ce weekend le président de s’en prendre directement à Téhéran, qui a pour sa part averti qu’il répondrait rapidement à toute attaque contre son territoire, ses intérêts ou ses ressortissants. Semblant appuyer l’hypothèse d’une décision souhaitée par le régime iranien, le groupe a dans sa déclaration explicitement tenu à distance l’Iran de ses actions : « Nos frères de l’axe (de la résistance), et particulièrement la République islamique, ne savent pas comment nous pratiquons le jihad et s’opposent souvent à la pression et à l’escalade contre les forces d’occupation américaines ». « Cela indique clairement une pression de l’Iran », note ainsi sur X le chercheur Hamidreza Azizi, de la Stiftung für Wissenschaft und Politik. Les Kataëb Hezbollah ont en outre souligné qu’ils continueraient à se défendre si un acte hostile américain les visait. Une mesure qui replacerait leurs actions dans le cadre des règles d’engagement implicites entre les Etats-Unis et « l’axe de la résistance ».

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Selon les Irakiens, cette décision serait le fruit d’intenses efforts de la part du Premier ministre Mohammad Chia al-Soudani, qui avait été élu en 2022 grâce au Cadre de coordination chiite pro-iranien. Interrogé par Reuters, son conseiller aux Affaires étrangères, Farhad Alaaldin, a déclaré que le chef de cabinet « avait travaillé d’arrache-pied ces derniers jours, s’entretenant avec toutes les parties concernées en Irak et à l’étranger », enjoignant les parties prenantes à « soutenir les efforts du Premier ministre pour éviter une possible escalade ».

Juste avant la frappe de dimanche, le gouvernement irakien avait entamé des discussions avec les Etats-Unis pour évaluer leur présence dans le pays, où ils conservent encore environ 2 500 soldats dans le cadre de la coalition internationale contre le groupe Etat islamique, en vue de préparer un éventuel retrait. Un objectif des groupes pro-iraniens du pays, qui ont augmenté la pression en ce sens sur Mohammad Chia al-Soudani après une frappe américaine à Bagdad qui a tué début janvier deux responsables de la milice Harakat al-Nujaba, faisant partie des Hachd al-Chaabi. Selon un ancien responsable américain cité par le Middle East Eye, Washington pourrait essayer d’éliminer Mohammad Hussein al-Kawtharani, haut gradé du Hezbollah libanais, qui coordonne notamment les efforts pour faire partir les troupes américaines d’Irak.

Autonomisation de « l'axe de la résistance »

Si le « déni plausible » entourant la responsabilité de l’Iran dans les actions de ses supplétifs régionaux vaut également pour la frappe de dimanche, de nombreux analystes estiment que les groupes pro-iraniens dans la région ont gagné en autonomie et en indépendance ces dernières années. Certains suggérant même que les groupes que les autorités iraniennes ont soutenus pendant des décennies commencent désormais à prendre des décisions stratégiques différentes, voire contraires aux intérêts de Téhéran.

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Se référant à un équilibre trouvé avant le 7 octobre entre l’Iran et son ennemi américain, formé de lignes rouges et de règles d’engagement bien définies, Arash Azizi, professeur à Clemson University, a écrit mardi dans The Atlantic que « les forces du soi-disant axe de la résistance menacent cet équilibre pour le régime de Téhéran, qui ne peut plus les contrôler complètement ». Une situation d’autant plus vraie dans le cas irakien, où la pluralité et la diversité des milices pro-iraniennes rendent un contrôle effectif plus ardu. D’autant qu’elles sont, selon le chercheur, « parmi les plus ancrées dans l'idéologie islamiste chiite de l'Iran », ce qui les rend paradoxalement plus difficiles à « convaincre des calculs stratégiques des franges plus pragmatiques de l’establishment iranien. » L’historien conclut enfin qu’« en liant le destin de l’Iran à celui d’un axe indiscipliné, (le guide suprême iranien Ali) Khamenei a mis son pays en danger et l'a exposé à un grave risque de guerre », ce qu’il a pourtant cherché à éviter jusqu’à présent.

C’est un virage à 180°. Les Kataëb Hezbollah ont annoncé mardi soir vouloir arrêter leurs attaques contre les « forces d’occupation », entendre américaines, « afin d’éviter un embarras au gouvernement irakien ». Washington avait déclaré plus tôt que la frappe qui a tué trois de ses soldats sur la base de Tower 22 en Jordanie dimanche matin, et blessé des dizaines...

commentaires (5)

Pourquoi les Kataëb Hezbollah suspendent-ils leurs attaques contre les Etats-Unis ? Tout simplement parce que les américains ont haussé le ton et ont menacé de frapper plus fort. That’s it

Sissi zayyat

13 h 43, le 01 février 2024

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Commentaires (5)

  • Pourquoi les Kataëb Hezbollah suspendent-ils leurs attaques contre les Etats-Unis ? Tout simplement parce que les américains ont haussé le ton et ont menacé de frapper plus fort. That’s it

    Sissi zayyat

    13 h 43, le 01 février 2024

  • Les iraniens ne cessent de provoquer les américains en attaquant pour tuer à travers leurs supplétifs implantés dans la région, pour ensuite ramper et nier toute implication de peur de la réaction des américains qui jusqu’alors se sont montrés frileux et indécis. Si la riposte était à la hauteur des provocations depuis le début, elle aurait mis fin à toute escalade voulue et organisée par les iraniens qui tirent leur force de la mollesse des puissances internationales alors que les iraniens persévèrent et frappent jusqu’à ce qu’on leur assène le coup fatal la où ils s’attendent le moins.

    Sissi zayyat

    12 h 17, le 01 février 2024

  • Non se serais pas une erreur de s en prendre directement à l'Iran, mais plutôt un bon retour des problemes vers la tête du serpent. Tous les pro Iraniens commencent a flipper??? Il est partit ou leur courage ? Plus de guerre sainte contre le grand satan ?

    Aboumatta

    19 h 30, le 31 janvier 2024

  • Ce serait une erreur de s’en prendre à l’Iran pour le plaisir d’israël Délaisser ou plutôt s’aligner 87 millions d’habitants en Iran pour le plaisir de défendre Netanyahu et sa clique d’ultras extrémistes sionistes de 9,7 millions d’habitants et des des ultras évangéliques qui votent pour la plupart républicains que la Russie et la chine ont réussi à soudoyer à son avantage. Les États Unis d’Amérique sont en train de se mettre à dos les trois quarts de la planète soit plus de 6 milliards d’habitants. Et tout récemment l’Arabie saoudite.

    Mohamed Melhem

    16 h 24, le 31 janvier 2024

  • Biden n'a aucun intérêt actuellement à engager l'armée américaine dans ce qui serait un second Vietnam , il doit remercier le ciel pour cette nouvelle qu'il a probablement lui-même contribué à faire passer par intermédiaire et nègociateurs aux iraniens , qui sont les plus futés de toute cette comédie .

    Chucri Abboud

    15 h 30, le 31 janvier 2024

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