Gisèle

« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. »

La fameuse phrase de Lamartine m’est revenue à l’esprit à l’annonce du décès de Gisèle Khoury. Car sa disparition n’a pas seulement laissé un vide chez sa famille et ses amis dont elle s’occupait si bien avec un dévouement exemplaire, elle représente aussi une immense perte pour la presse libre dont elle était le symbole avant d’en être le porte-drapeau. Motivée par Samir Kassir dans ses combats, elle a transformé son assassinat en cause, une cause pour la défense des journalistes persécutés et la protection de la liberté d’expression : « SKeyes tire la sonnette d’alarme au quotidien face au danger qui nous guette  ; face au risque réel de perdre la liberté d’expression émanant d’une équation qui nous donne le choix entre notre liberté et notre sécurité. Équation illusoire. Équation indigne », a-t-elle affirmé en recevant les insignes de chevalier de la Légion d’Honneur.

Son professionnalisme, sa spontanéité, son attachement aux valeurs, son respect, dans les émissions qu’elle animait, pour ses invités comme pour son audience, ont fait d’elle une figure de proue des médias dans le monde arabe. Son courage face aux adversités de la vie, comparable à celui de Ghassan Tuéni, l’a accompagnée durant sa maladie qu’elle a affrontée avec une sérénité incroyable. « Mon sillon ? Le voilà. Ma gerbe ? La voici », écrivait Victor Hugo. Le sillon qu’elle a tracé ne doit pas s’arrêter là. Au nom de Gisèle et de Samir, il nous faudra continuer à « labourer » pour que vive la liberté dans cette région du monde où elle est si souvent bafouée. L’assassinat récent de plusieurs journalistes au Liban-Sud et à Gaza nous commande de ne pas baisser les bras.