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Économie - Trois questions

Assaad Mirza : « Pour les compagnies d’assurance, le Liban est déjà en guerre »

Le président de l’Association des compagnies d’assurance au Liban confie à L’OLJ  les logiques d’actions des compagnies d’assurance libanaises en ces temps troublés.

Assaad Mirza : « Pour les compagnies d’assurance, le Liban est déjà en guerre »

Des obus tirés par l'armée israélienne explosent du côté du village de Dhaira, au Liban-Sud, le 16 octobre 2023. Photo AFP

Depuis le déclenchement de la guerre entre le Hamas et Israël le 7 octobre et le regain des tensions à la frontière sud, le Liban avance à vue face au risque d’être entraîné dans ce conflit, mais en affaires l’incertitude n’est pas de mise et les compagnies d’assurance ont pris les devants, affectant ainsi d’autres secteurs, à l’instar du transport aérien.

Lors d’une allocution télévisée vendredi, le PDG de la compagnie Middle East Airlines (MEA), Mohammad el-Hout, a assuré réduire les vols de moitié, précisant que les compagnies d’assurance ne couvriraient désormais que 20 % de la valeur estimée des avions en cas d'accident lié à la guerre.

Dans ce contexte, le président de l’Association des compagnies d’assurance du Liban (ACAL), Assaad Mirza, confie à L’OLJ les logiques d’actions des compagnies d’assurances libanaise en ces temps troublés.

Assaad Mirza, président de l’Association des compagnies d’assurances au Liban. Photo fournie par Assaad Mirza

Quel est le positionnement des compagnies d’assurance depuis le 7 octobre ?

La situation délicate du pays a déjà des conséquences sur le secteur des assurances. Le changement majeur est que les risques de guerre ne sont plus couverts et ne figurent plus dans les lignes des nouvelles polices d’assurance. En d’autres termes, les dégâts subis par un citoyen libanais en rapport avec une guerre éventuelle au Liban ne seront désormais plus pris en charge dans les nouveaux contrats. Il est toutefois important de rappeler que, pour les clients ayant souscrit à un contrat antérieur mentionnant la couverture des risques de guerre, ces risques restent assurés. Pour les compagnies d’assurance, le Liban n’est plus un pays à risque, il est déjà en guerre.

En réalité, les jugements des assureurs libanais dépendent de ceux des réassureurs européens, allemands, français ou anglais, qui dictent la marche à suivre au niveau local. Les ordres viennent donc des réassureurs bien informés de la situation régionale et qui prennent leurs décisions en conséquence.

Quels sont les secteurs les plus touchés par ce changement ?

Le secteur le plus vulnérable au risque de guerre est le transport de marchandises. Les assureurs ont notifié aux importateurs qu’ils supprimaient les risques de guerre dans les nouvelles polices d’assurance. Or concrètement, chaque nouveau bateau équivaut à un contrat d’assurance à signer. Les changements de ces derniers jours ont donc rapidement impacté le secteur du transport de marchandises, bouleversant les chaînes logistiques des commerçants et industriels libanais. Beaucoup se demandent comment envisager l’importation de nouvelles marchandises sans des contrats d’assurance complets. Ils ont peur et savent qu’ils évolueront dans un contexte difficile ces prochains mois.

D’autre part, le renouvellement des assurances vie est aussi concerné par la suppression des clauses de couverture des risques de guerre. Mais ici, le risque est moindre que pour le commerce et dépend avant tout de la situation de l’assuré. Les polices vie pour des journalistes qui se déplacent au niveau du front sont, à ce titre, proscrites. Pour les citoyens libanais, le calcul se fait selon un gradient géographique et en conséquence du lieu de résidence et de travail de la personne. Toutefois, pour les réassureurs étrangers, il n'y a pas de différentiel, le Liban entier est logé à la même enseigne. Résultat, les primes d’assurances vie montent en flèche.

Quel impact sur la vie des Libanais ?

Tant que le risque d’une guerre imminente est présent, rien ne va changer du côté des compagnies d’assurance. Or, la situation ne semble pas se stabiliser, pour le moment. La temporalité de ce changement est à inscrire sur le long terme. Personne ne sait comment anticiper les événements et dans quelle direction va le pays. Pour ce qui est des perspectives, d’après les informations dont je dispose, les commerçants et industriels libanais devraient avoir assez de denrées pour que le marché ne soit pas trop bousculé durant les trois à quatre prochains mois.

Si ce statu quo sur les assurances persiste, les conséquences d’une réduction drastique de l’importation sont à prévoir, d’une part à cause de la baisse de l’offre de denrées de première nécessité, et d’autre part à cause d’une hausse des prix engendrée par celle des coûts du transport.

Depuis le déclenchement de la guerre entre le Hamas et Israël le 7 octobre et le regain des tensions à la frontière sud, le Liban avance à vue face au risque d’être entraîné dans ce conflit, mais en affaires l’incertitude n’est pas de mise et les compagnies d’assurance ont pris les devants, affectant ainsi d’autres secteurs, à l’instar du transport aérien. Lors d’une...

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