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Économie - Focus

Pourquoi les tarifs des services d'enregistrement des véhicules vont changer

La durée du contrat d’Inkript, qui fournit notamment les permis de conduire, va être prolongée pour compenser les périodes de fermeture des centres d’enregistrement des véhicules.

Pourquoi les tarifs des services d'enregistrement des véhicules vont changer

Un homme portant des plaques d'immatriculation de véhicules au centre d'enregistrement des véhicules (Nafaa) de Dékouané. Photo Mohammad Yassine

Après plusieurs mois de fermeture, les centres d’immatriculation des véhicules au Liban, connus sous les noms de Nafaa ou « mécanique » – à ne pas confondre avec les centres d’inspection mécanique –, ont rouvert mardi dernier mais en assurant seulement une partie de leurs services habituels. Ses cinq centres, situés à Dekouané (Mont-Liban) Zahlé (Békaa), Saïda (Liban-Sud), Nabatiyé (dans le gouvernorat du même nom) et Tripoli (Liban-Nord), avaient été fermés à plusieurs reprises pendant la crise multiforme qui ravage le Liban depuis 2019, ou suite aux retombées de deux dossiers distincts :

- Le lancement d’une enquête sur une corruption présumée de fonctionnaires, qui a provoqué une fermeture de six mois à partir de la fin 2022 ;

- Un conflit opposant l'Autorité de gestion du trafic et des véhicules à son prestataire spécialisé dans la sécurité informatique, la société Inkript Indentification Technologies SAL, qui a fait l‘objet de négociations durant une semaine ayant abouti à la réouverture de la Nafaa.

L’Orient-Le Jour récapitule les grandes lignes de ce dossier qui devrait se conclure dans quelques jours par un ajustement à la dépréciation de la monnaie nationale sur les prix des nouveaux permis de conduire, des cartes grises et d’autres services assurés par Inkript pour le compte de la Nafaa.

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Permis de conduire

Une des filiales libanaises du groupe d’investissement Resource Group Holding, Inkript a remporté plusieurs marchés mis en jeu par les autorités libanaises dans les années 2010.

L’un de ces marchés, mis en jeu via un appel d’offres de l’Autorité de gestion du trafic et des véhicules, un établissement public rattaché au ministère de l’Intérieur et des Municipalités, visait à assurer plusieurs prestations spécifiques pour le compte de la Nafaa. Il s’agit cette fois d’assurer plusieurs prestations pour les comptes de la Nafaa. « L’appel d’offres dont le cahier de charges était approuvé par le Conseil des ministres a été remporté par Inkript face à cinq autres candidats, dont des sociétés internationales ayant présenté le prix le plus bas et l’offre technique la plus adéquate », a assuré à L’Orient-Le Jour Nathalie Haddad, responsable de la communication d’Inkript.

Etalé sur sept ans et évalué à 174 millions de dollars (TVA incluse), le contrat prévoit la fourniture de quatre produits spécifiques, soit des permis de conduire biométriques, des cartes grises, des plaques d’immatriculation, et des puces RFID (acronyme d’indentification par radiofréquences), ainsi que d’un service, le déploiement de l’infrastructure informatique nécessaire pour tous ces produits avec une équipe de plus de cent employés sur le terrain. « Il y a d’autres prestations prévues, mais qui sont accessoires aux prestations principales », détaille encore Nathalie Haddad.

Elle précise aussi que la décision de l’Autorité de gestion du trafic s’inscrit dans le sillage de la mise en œuvre du nouveau code de la route voté en 2012, mais qui n’est entré en vigueur que trois ans plus tard, le temps que tous les règlements nécessaires soient émis. Le début effectif de la mission d’Inkript est retardé pour les mêmes raisons. Bien que la société ait signé son contrat en 2015, ce n’est qu’en septembre 2016 que la première plaque d’immatriculation a été émise et que la période de 7 ans imposée par le contrat a commencé à courir.

L’impact de la crise

Tout se passe sans histoires jusqu’en 2021. La crise bat son plein, la livre libanaise s’effondre et creuse l’écart avec le taux officiel de 1 507,5 LL pour un dollar qui sert toujours de base au calcul des commandes de plaques, de permis, de cartes et de puces qu’Inkript doit livrer. « Nous avons alors demandé à l’autorité de préciser la quantité de produits qu’elle souhaitait commander dans les limites des montants prévus, vu que les ordres d’exécution étaient en livres, mais que nous devions régler nos fournitures en dollars frais », nom donné aux dollars qui ne sont pas bloqués dans les banques libanaises, explique Mme Haddad.

Mais l’autorité ne répond pas aux demandes d’Inkript, qui continue de livrer une petite partie des produits demandés pour 2021 et 2022, la livre ayant alors perdu la plus grande partie de sa valeur à ce stade. Pour le reste, il faudra ajuster le montant des redevances versées à la société par l’autorité et dont le versement est suspendu depuis début 2020, soit depuis plus de trois ans. Entretemps, le Conseil des ministres a tenté de faire bouger le dossier par une décision rendue le 14 avril 2022, mais sans y parvenir.

Cette situation se prolonge jusqu’en 2023, et les désaccords atteignent un point culminant en juillet. L’autorité reproche à Inkript de faire prendre en otage la Nafaa pour être payée en dollars, tandis que la société assure ne pas être en mesure de poursuivre l’exécution de ses obligations avant que l’autorité ne spécifie les quantités et services à fournir et adapte le mode de paiement. Le 31 août, la Cour des comptes rend un avis consultatif dans lequel elle affirme que la société peut être poursuivie au pénal, mais juste pour avoir arrêté les systèmes et coupé l’électricité dans les locaux de la Nafaa, mais pas pour la non-exécution des prestations principales du contrat.

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Charge parlementaire

Le dossier se retrouve finalement devant la commission parlementaire des Travaux publics qui s’enflamme sur le sujet lors d’une réunion organisée le même jour que la publication de l’avis de la Cour des comptes. Particulièrement virulent, le président de la commission, le député Sajih Attié, a déclaré à L’Orient-Le Jour que « les dirigeants d'Inkript (…) devraient actuellement être en prison, car ils travaillent sans contrat officiel ni accord avec le gouvernement », une accusation rejetée en bloc par la société. M. Attié a aussi considéré que le montant du contrat était trop élevé.

Le parlementaire a également assuré que la commission des Travaux publics avait tenté d'engager le dialogue avec la société afin de « clarifier leur statut juridique et de négocier les montants exorbitants qu'ils réclament » mais que sa direction avait « catégoriquement refusé » avant de promettre de lancer une enquête. Le jour même, la commission a annoncé qu’un appel d’offres serait bientôt lancé pour trouver un remplaçant à Inkript.

Interrogé dans la foulée, l’ancien président du Conseil d'État, le juge Chukri Sader, n’a pas souhaité donné son avis sur le fond du dossier, mais s’est étonné que l’option d’un nouvel appel d’offres n’ait pas été mise sur la table bien avant que le contrat d’Inkript n’arrive à échéance. En réalité, si celui-ci était en principe supposé expirer en septembre, sa durée doit en réalité être prolongée d’au moins deux ans pour compenser les différentes interruptions et retards dans l’exécution du contrat.

Alors que tout semblait indiquer que le bras de fer était parti pour durer, l’Autorité de la gestion du trafic a finalement pris tout le monde de court lundi en annonçant la réouverture de la Nafaa dès le lendemain et la réactivation progressive de l’ensemble de ses services accessibles aux citoyens. Contactée, la société Inkript nous avait indiqué que des négociations avaient été entamées avant le week-end et qu’elles avaient débouché sur un accord qui prévoit normalement un amendement des tarifs à payer pour chaque catégorie de produits fournis par la Nafaa.

« Les nouveaux tarifs sont actuellement à l’étude et le processus pourrait prendre plusieurs jours », a affirmé le directeur général par intérim de l’autorité, le mohafez de Beyrouth Marwan Abboud, lundi dernier suite à une réunion avec les représentants de la société Inkript. Il n’est donc pas certain à ce stade que la procédure d’immatriculation des véhicules et d'autres opérations soient de nouveau accessibles la semaine prochaine, comme annoncé lundi par l’autorité.

Après plusieurs mois de fermeture, les centres d’immatriculation des véhicules au Liban, connus sous les noms de Nafaa ou « mécanique » – à ne pas confondre avec les centres d’inspection mécanique –, ont rouvert mardi dernier mais en assurant seulement une partie de leurs services habituels. Ses cinq centres, situés à Dekouané (Mont-Liban) Zahlé (Békaa), Saïda...

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Les montants de tous les contrats conclus au Liban sont exorbitants et pour cause. En cherchant bien vous trouverez toujours un élu ou un responsable politique nommé ou imposé ou placé à son poste pour bénéficier des pots de vin et des commissions illicites qui font grimper les prix que le contribuable paie pour nourrir les mafieux. Un grand coup de balai s’impose et le plus vite serait le mieux. Un pays gangrené par la corruption ne peut que disparaître

Sissi zayyat

15 h 44, le 09 septembre 2023

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Commentaires (1)

  • Les montants de tous les contrats conclus au Liban sont exorbitants et pour cause. En cherchant bien vous trouverez toujours un élu ou un responsable politique nommé ou imposé ou placé à son poste pour bénéficier des pots de vin et des commissions illicites qui font grimper les prix que le contribuable paie pour nourrir les mafieux. Un grand coup de balai s’impose et le plus vite serait le mieux. Un pays gangrené par la corruption ne peut que disparaître

    Sissi zayyat

    15 h 44, le 09 septembre 2023

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