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Moyen-Orient - ENTRETIEN EXPRESS

Libye-Israël : « On a planté un couteau dans le dos de Dbeiba »

La rencontre secrète des chefs de la diplomatie libyenne et israélienne annoncée par Eli Cohen a écarté la possibilité d'une normalisation, selon Jalel Hachraoui, chercheur au Royal United Services Institute.

Libye-Israël : « On a planté un couteau dans le dos de Dbeiba »

La ministre libyenne des Affaires étrangères, Najla al-Mangoush, et son homologue israélien, Eli Cohen. Photos AFP. Photomontage Guilhem Dorandeu

Une réunion « historique » et « la première étape des liens entre Israël et la Libye ». Voilà comment le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen a qualifié sa rencontre secrète avec son homologue libyenne Najla al-Mangoush à Rome. Il n’en a pas fallu plus pour que des manifestants descendent dans les rues de Libye en brûlant des pneus, bloquant les routes et allant jusqu’à attaquer le domicile du Premier ministre. Côté politique aussi, les réactions ont été immédiates. Le Conseil présidentiel libyen a demandé au chef du gouvernement d’union nationale, Abdel Hamid Dbeiba, des « éclaircissements », soulignant que « cela est considéré comme une violation des lois libyennes qui criminalisent la normalisation avec l’entité sioniste ». Surtout, la cheffe de la diplomatie Najla al-Mangoush a été suspendue de son poste et aurait quitté le pays pour la Turquie. Son ministère a répondu en justifiant « une rencontre fortuite et non officielle, au cours d’un entretien avec son homologue italien (Antonio Tajani), qui n’a comporté aucune discussion, accord ni consultation ».

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Malgré la réaction épidermique des manifestants et les propos tranchants du Conseil présidentiel, certains signaux de rapprochement entre la Libye et Israël ont émergé ces dernières années. Le fils du chef de guerre libyen Khalifa Haftar se serait rendu en Israël fin 2021 pour une réunion secrète avec des responsables, alors que son père avait établi des contacts avec l’État hébreu. Une normalisation entre les deux pays est-elle alors envisageable, et dans ce cas, quels sont ses enjeux ? L’Orient-Le Jour fait le point avec Jalel Hachraoui, chercheur au Royal United Services Institute.

Un projet de normalisation est-il envisageable entre la Libye et Israël ?

Il existe une coopération entre Israël et l’Ouest libyen, mais aussi l’Est libyen, et ce depuis longtemps. Donc ce dialogue (entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays, NDLR) n’est pas surprenant. De plus, tous les États étrangers qui ont une influence en Libye, que ce soit la Russie, les États-Unis, la Turquie, les Émirats ou l’Égypte, sont proches d’Israël. Les acteurs politiques les plus puissants de Libye, les plus ambitieux, savent ainsi que pour plaire à ces partenaires internationaux, il faudra à un moment donné faire preuve de réalisme et travailler avec Israël. Dbeiba pense que sa probabilité de survie au pouvoir va augmenter du fait de dynamiques et de facteurs internationaux et que les Occidentaux sont obsédés par cette idée de normalisation avec Israël. D’ailleurs, le fils du maréchal Haftar s’était rendu en Israël en 2021 et le Premier ministre actuel a établi des contacts avec l’État hébreu. Ce sont des informations qui avaient fuité et qui n’ont jamais provoqué une telle colère populaire. Ce qui caractérise l’incident de cette semaine, ce n’est pas le fait qu’il y ait un dialogue, mais que les Libyens l’aprennent, directement de but en blanc de la part d’un ministère israélien. Sans compter le fait que cela arrive à un moment où la pression onusienne est en train de monter, où le discours américain devient de plus en plus prompt à expliciter un désir de changement de gouvernement à Tripoli et où il existe une opposition en interne.


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L’incident diplomatique qui s’est déroulé à Rome a-t-il mis un coup d’arrêt au processus ?

Le ministre Eli Cohen a délibérément partagé l’information par petit calcul de politique intérieure, c’est-à-dire de haine et de rivalité à l’intérieur de la coalition de Benjamin Netanyahu. Il a estimé que les gains pouvaient justifier le fait de venir gâcher un dossier important qui, désormais, va avoir du mal à être repris parce qu’il va être considéré comme radioactif. Sans compter le mal que l’on fait à Rome, parce que l’Italie a été insultée dans l’histoire. Dbeiba aurait pu à terme mener le dossier s’il en avait contrôlé le timing, c’est-à-dire faire une telle annonce (de normalisation) en même temps que des revenus pétroliers supplémentaires, des subventions supérieures pour l’année suivante, ou encore une baisse de l’inflation, car c’est comme cela que les populistes fonctionnent. Mais là, il a été pris au dépourvu. On lui a planté un couteau dans le dos.

Peut-on imaginer une coopération sur les ressources naturelles entre Israël et la Libye ?

Vous allez beaucoup trop vite. Pour qu’une telle coopération ait lieu, il faudrait d’abord une normalisation entre la Libye et Israël. Mais si l’on avait atteint cette étape, le premier sujet sur la table serait la démarcation maritime. Sur le dossier du gaz sous-marin, Israël est du côté de l’Égypte, de Chypre et surtout de la Grèce, alors que la Libye est du côté de la Turquie, c’est-à-dire l’ennemi de ces gens-là. Sur le dossier gréco-turc, Tripoli est complètement du côté anti-Grèce, c’est-à-dire anti-israélien. Donc son premier soutien, c’est la Turquie, et Dbeiba a été très audacieux en rentrant en contact avec Israël. Parce que la Turquie va considérer cela comme une trahison. Ensuite, un autre sujet à évoquer serait l’échange de renseignements sur les groupes extrémistes. Mais la case départ, c’est la normalisation. Et au vu de l’ampleur qu’a prise l’incident et de la balle dans le pied qu’Israël s’est tirée, celle-ci n’adviendra pas avant quinze ans.

Une réunion « historique » et « la première étape des liens entre Israël et la Libye ». Voilà comment le ministre israélien des Affaires étrangères Eli Cohen a qualifié sa rencontre secrète avec son homologue libyenne Najla al-Mangoush à Rome. Il n’en a pas fallu plus pour que des manifestants descendent dans les rues de Libye en brûlant des pneus, bloquant les routes...

commentaires (1)

Allez, trahissez la Palestine. Normalisez vos relations avec Israël. Le sionisme vous sucera le sang jusqu’à la moelle épinière et vous vous en apercevrez pas. Bon DIEU. Quel intérêt avez vous? Vous avez assassiné Khadafi pour avoir les rênes du pouvoir. Et en quoi vous profites Israël. Bandes d’ignorants.

Mohamed Melhem

05 h 47, le 30 août 2023

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Commentaires (1)

  • Allez, trahissez la Palestine. Normalisez vos relations avec Israël. Le sionisme vous sucera le sang jusqu’à la moelle épinière et vous vous en apercevrez pas. Bon DIEU. Quel intérêt avez vous? Vous avez assassiné Khadafi pour avoir les rênes du pouvoir. Et en quoi vous profites Israël. Bandes d’ignorants.

    Mohamed Melhem

    05 h 47, le 30 août 2023

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