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Sport - Polémique

L'affaire Kharlan, derniers feux de l'influence russe dans l'escrime ?

La Fédération internationale d'escrime, sous la pression du Comité international olympique, s'est résolue à lever la suspension de l'Ukrainienne Olga Kharlan et à amender son règlement.

L'affaire Kharlan, derniers feux de l'influence russe dans l'escrime ?

L'Ukrainienne Olha Kharlan (g.) quitte la piste d'escrime après avoir refusé de serrer la main de la Russe Anna Smirnova (d.), enregistrée en tant qu'athlète individuelle neutre, après la victoire de Kharlan sur Smirnova lors des qualifications individuelles seniors de sabre féminin, dans le cadre des championnats du monde d'escrime de la FIE à la Foire Allianz MI.CO (Milano Convegni), à Milan, le 27 juillet 2023. Photo Andreas Solaro/AFP

En façade, l'oligarque russe Alisher Usmanov s'est mis en retrait de la Fédération internationale d'escrime (FIE), mais la disqualification de la sabreuse ukrainienne Olga Kharlan a mis au jour le poids que tentent de conserver ses proches qui occupent toujours des rôles-clés. Et si le coup d'éclat de la disqualification jeudi d'Olga Kharlan aux Mondiaux de Milan était l'ultime signe de l'influence russe persistante dans l'escrime mondiale ? À peine plus de 24 heures plus tard, la FIE, sous la pression du Comité international olympique et en première ligne son président Thomas Bach, lui-même ex-escrimeur, s'est résolue à lever la suspension de l'Ukrainienne et à amender son règlement.

Un revers cinglant pour les relais de la Russie dans l'escrime internationale. Ce sport était devenu le premier en mars à réintégrer Russes et Bélarusses dans ses compétitions. Un congrès extraordinaire de la FIE a voté leur réintégration, sous bannière neutre, sans même attendre les recommandations en ce sens du CIO. Un homme, Vitaly Logvin, s'est activé en coulisses, selon plusieurs sources proches des instances, pour que soit disqualifiée Olga Kharlan, coupable de n'avoir pas serré la main de son adversaire russe Anna Smirnova qu'elle venait de battre. Sollicité par l'AFP, Vitaly Logvin n'a pas donné suite.

Un proche d'Usmanov

Champion du monde 1982 de fleuret avec l'équipe d'URSS, endeuillée par la mort lors du tournoi de Vladimir Smirnov, le masque transpercé par une lame brisée, Vitaly Logvin occupe désormais le poste de président de la Confédération panaméricaine d'escrime. Proche d'Alisher Usmanov et originaire d'Ouzbékistan comme lui, cet homme, enregistré comme ressortissant mexicain par la FIE, présidait autrefois la Fondation pour l'avenir de l'escrime créée par l'oligarque russe en 2005. Distribuant prize money et fonds pour le développement du sport dans des fédérations émergentes, cette fondation a servi de tremplin à Alisher Usmanov vers la présidence de la FIE. Élu en 2008, Usmanov a participé sur ses deniers personnels au budget de la fédération avant d'être contraint de se mettre en retrait à la suite de l'invasion de l'Ukraine. Ce proche du président russe Vladimir Poutine a été placé sur la liste des sanctions de l'Union européenne, de Londres et des États-Unis.

« Des années d'influence russe ont placé des pions aux nœuds stratégiques de la fédération, cela laisse une marque et l'on voit la difficulté de les remplacer », commente l'Italien Giorgio Scarso. Nouveau président de la Confédération européenne d'escrime, il a remplacé, après l'invasion de l'Ukraine, le Russe Stanislav Pozdniakov, actuel chef du comité national olympique russe. « Pourquoi un représentant de la fondation pour l'avenir de l'escrime fait le tour du monde pour distribuer de l'argent, soi-disant aux administrateurs (de Fédérations) pour pouvoir assister à des compétitions et des réunions mais avec comme contrepartie : “Voici le discours que je veux que vous prononciez au Congrès, voici le vote que je veux que vous preniez et voici l'argent que j'ai offert” ? », avait tempêté l'Américain Sam Cheris, président de la commission juridique de la FIE lors d'un congrès en novembre. La parole est rare dans ce sport où l'arbitre joue un rôle prépondérant en fleuret et plus encore en sabre, des armes dites de convention, où l'interprétation d'une action peut faire basculer des matches et faire la différence entre une médaille et une place d'honneur.

Conseil du fair-play

Vitaly Logvin est désormais actif au Salvador, où il fait des affaires, explique Douglas Farah, président du cabinet de conseils en sécurité IBI Consultants, spécialisé dans les activités russes en Amérique latine et par ailleurs ex-journaliste du Washington Post dans cet État d'Amérique centrale. Logvin a d'ailleurs pris la tête de la confédération panaméricaine d'escrime, adoubé par son prédécesseur David Munguia Payes qui présidait la fédération en parallèle de son poste de ministre de la Justice et de la Sécurité avant d'être condamné à 18 années de prison dans son pays, notamment pour son appartenance aux « maras », ces bandes criminelles qui faisaient régner la terreur dans son pays.

Autre proche d'Usmanov, le Kazakhstanais Oleg Peskov, ex-vice-président de la Fondation pour l'avenir de l'escrime, siège comme Vitaly Logvin au comité exécutif de la FIE qu'il représente au conseil du fair-play. « Même si la Russie n'est plus là, je pense qu'elle a quand même du poids et qu'elle fait peur à la Fédération internationale, commente la sabreuse française Manon Apithy-Brunet, médaillée de bronze aux JO de Tokyo. C'est aussi pour ça qu'Olga a été sanctionnée. » Mais la rapide réintégration de l'Ukrainienne a montré que cette influence avait atteint ses limites. 

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