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Sport - Mondial

En Argentine, le mouvement féministe a réveillé le football féminin

Quasiment érigé au rang de religion au pays de Messi et Maradona, le football demeure un sport peu accessible pour les femmes argentines qui luttent pour rendre le "sport roi" plus inclusif à l'heure où la sélection Albicéleste s'apprête à disputer sa 4e Coupe du Monde.

Les joueuses argentines célébrant leur victoire face au Pérou en match de préparation pour le Mondial 2023 à San Nicolas, le 14 juillet. Agustin Marcarian/Reuters

La tardive inclusion sociale des femmes en Argentine au cours des deux dernières décennies a réveillé le football féminin d’une léthargie de près d’un siècle vécue à l’ombre de l’hégémonie masculine au pays de Lionel Messi et de Diego Maradona.

Si la sélection féminine argentine dispute en Océanie sa quatrième Coupe du monde (20 juillet-20 août), elle le doit à une longue lutte. Les mouvements tels que « Ni Una Menos » (pas une de moins) contre la violence de genre ou en faveur de l’avortement, légalisé en 2020, ont poussé la Fédération argentine de football (AFA) à porter enfin le regard sur le football féminin déclaré semi-professionnel en 2019.

Ignoré dans le pays des triples champions du monde où le ballon rond occupe pourtant tout l’espace public, « le football féminin a pu grandir ces dernières années grâce à l’avancée du mouvement féministe, aux transformations politiques, culturelles, sociales et économiques, ainsi qu’à l’approbation de lois telles que le mariage pour tous », explique Ayelen Pujol, ancienne footballeuse, féministe, journaliste et auteure du livre Quelle joueuse, lors d’une conférence à l’école de journalisme Deportea, à Mar de Plata (Nord-Est).

Si le premier match de football féminin en Argentine a été joué en octobre 1913, elle rappelle qu’il a fallu attendre un siècle « l’articulation entre le mouvement social dans les rues et (la reconnaissance) des footballeuses sur les terrains ».

Mais la visibilité des femmes dans le football en Argentine ne se limite pas qu’aux terrains. Jamais elles n’avaient été aussi nombreuses à garnir les tribunes des stades du championnat masculin, et elles ont festoyé autant que les hommes pour la victoire en décembre de la bande à Leo Messi au Qatar.

« Viriles »

L’équipe nationale féminine, qui entame le 24 juillet face à l’Italie sa Coupe du monde en Nouvelle-Zélande et en Australie, n’a certes jamais galvanisé les foules après trois participations en 2003, 2007 et 2019 sans la moindre victoire à la clé.

Mais la grande majorité des supporters vient seulement d’apprendre que l’édition Mexique 1986 n’était pas la première fois qu’une équipe albiceleste battait l’Angleterre en Coupe du monde grâce à une « main de Dieu » et un « but du siècle » signé Diego Maradona (2-1).

Quinze années plus tôt, en 1971, lors d’une Coupe du monde féminine non organisée par la FIFA mais par des entreprises privées, les Argentines l’avaient largement emporté sur la sélection anglaise, sur le score de 4-1, grâce à un quadruplé d’Elba Selva. Le tout devant près de 100 000 spectateurs, sur la pelouse du même stade Azteca de Mexico.

« Au Mexique, j’ai été encensée, mais quand on est revenues ici, il n’y avait personne pour nous accueillir, personne ne savait rien », raconte aujourd’hui Elba Selva, âgée de 75 ans. Le football féminin était invisible aux yeux du grand public, les joueuses étaient même critiquées car « viriles », selon Ayelen Pujol.

Mais en 2006 allait enfin survenir un début de reconnaissance après la conquête du championnat d’Amérique du Sud.

Manque de volonté politique

Le mouvement « Pibas con pelotas » (jeunes filles avec ballon), qui regroupe nombre de footballeuses et d’entraîneuses, est né dans le but de dénoncer l’absence de volonté politique de promouvoir le sport féminin en Argentine, et en particulier à l’école.

Ce collectif, créé en 2019, pointe entre autres le faible nombre de terrains mis à disposition des équipes féminines ou encore le manque de maillots, l’inexistence de contrats professionnels et de couverture médicale en cas de blessure.

Dans un plaidoyer, les membres de Pibas con pelotas expliquent le retard du football féminin par « le manque de revenus des joueuses en club pour pouvoir s’entraîner tous les jours ». Elles s’estiment également « maltraitées » et considèrent « leurs droits pas respectés ».

« Si tu te lèves à 6h du matin et que tu travailles toute la journée, tu ne pourras pas devenir professionnelle », explique Camila Gomez Ares, ancienne milieu de terrain de Boca Juniors, aujourd’hui à l’Universidad de Concepcion, au Chili.

« Quand je jouais pour Boca, personne ne venait nous regarder. Nous jouions sur des terrains en gazon synthétique. Mes maillots étaient beaucoup trop grands », raconte Julia Paz Dupuy, aujourd’hui joueuse de futsal en Espagne.

En Océanie, les Albiceleste espèrent recevoir un petit peu de soutien populaire. Et qu’enfin les victoires des hommes, avec la troisième étoile décrochée au Qatar en 2022, puissent servir de catalyseur au football féminin argentin.

La tardive inclusion sociale des femmes en Argentine au cours des deux dernières décennies a réveillé le football féminin d’une léthargie de près d’un siècle vécue à l’ombre de l’hégémonie masculine au pays de Lionel Messi et de Diego Maradona.

Si la sélection féminine argentine dispute en Océanie sa quatrième Coupe du monde (20...
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