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Société - Liban

Malgré les obstacles, la ruée vers les passeports continue

Devant les centres de la Sûreté générale, où la règle est au premier arrivé, premier servi, certains n’hésitent pas à camper durant la nuit pour obtenir un document de voyage. 

Malgré les obstacles, la ruée vers les passeports continue

Un passeport libanais. Photo Mohammad Yassine

Alors que les touristes et expatriés libanais affluent à l’aéroport de Beyrouth cet été, les centres de la Sûreté générale (SG) font face à des files d’attente interminables et une administration débordée. La demande de documents de voyage au Liban ne faiblit donc pas depuis le début de la crise économique il y a près de quatre ans, et ce malgré les assurances de la SG qui répète à l’envi disposer de 800 000 passeports prêts à être imprimés.

Une plateforme en ligne avait pourtant été créée en parallèle de ce début de crise pour répondre à la forte demande, mais le temps d’attente pour obtenir un rendez-vous a rapidement atteint un an ou plus. Alors, en sus d’une ruée des Libanais sur le site, y provoquant des dysfonctionnements intempestifs, la SG a finalement décidé, au début de l’année, de fermer cette plateforme et de revenir à un système sans rendez-vous préalable.

Afin d’obtenir ce graal, ou plus précisément ce ticket de sortie du pays en crise dans le cas où le contexte général s’aggraverait, certains Libanais sont prêts à camper la nuit devant les centres de la SG. C’était notamment le cas la semaine dernière de Hovig*, 35 ans, qui s’est rendu à 2h30 du matin au bureau de la SG, dans le quartier de Sodeco à Beyrouth, afin de garantir l’obtention d’un rendez-vous à l’ouverture des lieux à 8h. Et la règle du premier arrivé, premier servi n’y a pas dérogé : selon lui, seules une vingtaine de personnes ont été admises.

« On a passé la nuit agglutinés sur le trottoir, en face des locaux. Vers 5h, un policier est venu s’assurer que chacun avait les papiers nécessaires. Il nous a ensuite attribué des numéros », raconte-t-il. « Mon tour est arrivé à 8h30. J’ai demandé à obtenir un passeport urgent, parce que je devais partir en voyage, mais on m’a dit qu’il n’était pas certain que je puisse avoir mon nouveau passeport en une semaine. J’ai laissé tomber », poursuit-il.

Ceux qui ont besoin d’obtenir un passeport rapidement se tournent pourtant vers l’option du « passeport urgent », censé être délivré en une semaine à 10 jours ouvrables. À condition d’ ajouter 2 800 000 livres libanaises supplémentaires aux 12 millions facturés pour un passeport normal, dit de seconde classe, soit un total de près de 160 dollars au taux actuel (autour de 92 000 livres le dollar). Sinon, il faut attendre environ un mois pour pouvoir récupérer le « précieux » sésame – pourtant classé à la 100e place (sur 199) mondiale en termes de facilité d’accès (nombre de destinations exemptées d’un visa d’entrée – 42 pour le Liban), selon le dernier classement annuel de Henley Passport.

30 000 passeports non récupérés

Tarek*, un expatrié de 40 ans, a profité de ses vacances pour renouveler son passeport à Marjeyoun, sa ville d’origine au Liban-Sud. Il s’est rendu sur place à 3h30 du matin et il a patienté parmi une cinquantaine de personnes. « Seuls les 15 premiers arrivés ont été admis à l’intérieur, raconte-t-il. Plus tard, 10 autres ont également pu entrer. Vingt-cinq personnes en tout ont pu effectuer leurs démarches ce jour-là. Les autres ont été priées de revenir le lendemain. Ils avaient des ordres, ils ne pouvaient pas faire entrer tout le monde. Ils faisaient passer les cas les plus urgents en premier. » Même expérience du côté d’Edgar*, qui raconte avoir dormi dans sa voiture devant les bureaux de la SG à Rayfoun (Kesrouane), où seuls les 30 premiers candidats ont finalement été admis.

« Je ne comprends pas pourquoi les gens se ruent sur les passeports. Nous sommes une administration publique. Nous allons continuer à fournir des documents de voyage », rassure pour sa part un haut gradé de la SG contacté par notre publication. « Ce comportement irresponsable nuit à ceux qui ont vraiment besoin d’obtenir ce document. Quelle sécurité vous apporte un passeport si vous n’avez pas de vrais projets de voyage ? » s’interroge-t-il, critiquant ceux qui cherchent à se munir de ce document juste pour s’assurer d’avoir un passeport « au cas où ».

Les candidats au passeport, eux, revendiquent leur droit fondamental d’obtenir un document de voyage à n’importe quel moment et dénoncent les dysfonctionnements de l’administration, voire la bahdalé (« humiliation ») à laquelle ils sont soumis.

« Il n’est pas normal de devoir passer la nuit devant la SG. Et une fois à l’intérieur, on a l’impression que les choses se font de manière aléatoire, au bon gré des fonctionnaires présents », soupire Hovig. Après une première tentative ratée, il a essayé un autre bureau de la SG le lendemain, cette fois-ci dans le secteur de Adliyé, dans une tentative d’accélérer les démarches. « Impossible d’entrer, les gens se bousculaient et le seul employé présent à l’entrée était débordé. Je suis prêt à payer n’importe quelle somme, mais je ne sais même pas où aller ni à qui m’adresser. Ce pays est invivable ! » lance-t-il.

« Nous pouvons délivrer entre 3 000 et 3 500 passeports par jour, mais la demande est bien supérieure », réplique le responsable de la SG pour justifier la limitation du nombre de personnes admises quotidiennement dans chaque centre. Avant la crise, la SG fournissait 800 à 1 000 passeports par jour, indique encore ce responsable.

Selon ce haut fonctionnaire, la SG a déjà délivré 2 millions de passeports en deux ans, qu’il s’agisse de nouvelles commandes ou de renouvellements. Un record pour un pays dont la population est estimée à près de 5 millions de personnes. « C’est un chiffre surprenant. Les gens effectuent les démarches même s’ils n’ont pas vraiment besoin de ce document, et ça ne s’arrête pas », accuse-t-il.

Enfin, près de 30 000 passeports prêts, depuis un ou deux ans pour certains, n’ont toujours pas été retirés par leur propriétaire, tandis que 80 % des passeports délivrés n’ont jamais été utilisés, affirme par ailleurs ce haut fonctionnaire qui appelle les gens à la retenue. « Nous avons 800 000 passeports en réserve et nos imprimeries continuent de travailler. Nous allons également nous procurer un million de passeports supplémentaires bientôt. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter », ajoute-t-il, tout en refusant de livrer une date à ce sujet.

*Les prénoms ont été modifiés.

Alors que les touristes et expatriés libanais affluent à l’aéroport de Beyrouth cet été, les centres de la Sûreté générale (SG) font face à des files d’attente interminables et une administration débordée. La demande de documents de voyage au Liban ne faiblit donc pas depuis le début de la crise économique il y a près de quatre ans, et ce malgré les assurances de la SG qui...

commentaires (1)

Les gens veulent avoir un passeport au cas où des problèmes sécuritaires se passent. Ils oublient 2 choses : d’abord avoir un visa ensuite avoir beaucoup d’argent fresh sinon ils connaîtront ce qu’est la vraie bahdale a l’étranger. Ça m’étonnerait qu’il y ait actuellement 2 millions de libanais vivant au Liban qui remplissent les deux conditions. Donc arrêtez d’engorger inutilement les centres de la SG, c’est la seule administration qui fonctionne correctement et laissez les passeports pour ceux qui doivent impérativement voyager. Ah j’oubliais, l’individualisme et l’égoïsme du libanais orgueilleux et non civilisé, donc inutile d’essayer de les éduquer

Lecteur excédé par la censure

22 h 37, le 13 juillet 2023

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Commentaires (1)

  • Les gens veulent avoir un passeport au cas où des problèmes sécuritaires se passent. Ils oublient 2 choses : d’abord avoir un visa ensuite avoir beaucoup d’argent fresh sinon ils connaîtront ce qu’est la vraie bahdale a l’étranger. Ça m’étonnerait qu’il y ait actuellement 2 millions de libanais vivant au Liban qui remplissent les deux conditions. Donc arrêtez d’engorger inutilement les centres de la SG, c’est la seule administration qui fonctionne correctement et laissez les passeports pour ceux qui doivent impérativement voyager. Ah j’oubliais, l’individualisme et l’égoïsme du libanais orgueilleux et non civilisé, donc inutile d’essayer de les éduquer

    Lecteur excédé par la censure

    22 h 37, le 13 juillet 2023

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