"J"ai déjà mis en garde que la crise au Liban peut exploser à tout moment", a prévenu le Premier ministre sortant Nagib Mikati dans une interview publiée dimanche, dans laquelle il plaide pour "l'élection rapide" d'un président de la République, tout en se disant "très satisfait" du rétablissement des relations diplomatiques entre l'Iran et l'Arabie saoudite et estimant que cela pourrait avoir des répercussions positives au Liban.
Le chef de l'Eglise maronite, Béchara Raï, a de son côté salué le début d'une "réconciliation politique" entre Riyad et Téhéran, dressant un parallèle avec la crise libanaise et appelant à une réconciliation entre les différentes forces politiques.
Sans chef d'Etat depuis la fin du mandat du président Michel Aoun en octobre dernier, le Liban souffre d'une crise économique profonde doublée d'une crise politique, avec une vacance totale de l'Exécutif.
Réformer "avant que la crise ne dégénère"
Dans un entretien accordé au quotidien Al-Sharq Awsat, M. Mikati affirme qu'il a toujours dit, avant même d'accéder à la présidence du Conseil, que la crise libanaise "reste dans un goulot d'étranglement et peut exploser à tout moment. Il faut rapidement effectuer les réformes structurelles demandées avant que la crise ne dégénère et n'atteigne le point de non-retour", a-t-il poursuivi. "Il faut donc rapidement élire un nouveau président, ce qui permettra au Liban d'entrer dans une phase de répit avec la formation d'un nouveau gouvernement et le démarrage d'un chantier de réformes", a-t-il poursuivi. Le cabinet Mikati est seulement chargé de l'expédition des affaires courantes depuis mai 2022, après les dernières élections législatives.
Le Premier ministre sortant s'est également dit "très satisfait des derniers développements entre l'Arabie saoudite et l'Iran", assurant que "le Liban soutient spontanément tout processus de consensus dans la région, d'autant que l'Arabie saoudite représente une partie de poids, arabe et islamique, et a une vaste influence régionale". Il a ajouté que ce développement "doit se traduire dans toute la région, y compris au Liban" et constitue "une opportunité pour un nouveau souffle dans la région, pour aller de l'avant".
M. Mikati a également salué les propos de Fayçal Ben Farhan, ministre saoudien des Affaires étrangères, qui avait estimé que le Liban a plutôt besoin d'un rapprochement libanais et non irano-saoudien. "En tant que Libanais, nous ne devons pas attendre l'étranger, nous devons accomplir notre devoir d'élection d'un président et de reconstruction des institutions", a-t-il insisté. Le chef de la diplomatie saoudienne appelle régulièrement à l'élection rapide d'un président libanais et a récemment insisté sur le besoin de "sécurité et de stabilité" au Liban avec son homologue française, Catherine Colonna.
Raï fustige "le crime des députés"
Pour sa part, le patriarche maronite Béchara Raï s'est également félicité dimanche du rétablissement des relations diplomatiques entre l'Iran et l'Arabie saoudite, saluant une "réconciliation politique" et plaidant dans ce contexte en faveur d'une réconciliation entre les différents partis libanais.
"Nous bénissons cette étape qui s'inscrit dans un cadre de réconciliation politique", a déclaré le chef de l'Eglise maronite lors de son homélie dominicale, à Bkerké. Dans ses propos rapportés par l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), il a ajouté : "Nous espérons que cette réconciliation aura lieu au Liban afin de retrouver notre identité naturelle, celle de la neutralité par rapport aux conflits et aux guerres extérieures". Il a rappelé que le pays est "le lieu de rencontre et de dialogue des religions et des civilisations".
S'exprimant en outre sur l'élection présidentielle, Mgr Raï a estimé que "le crime commis par les députés de la nation, c'est la non-élection d'un président à cause des divisions". Le pays reste toujours privé de président depuis le 31 octobre dernier, date du départ de Michel Aoun. Après onze séances électorales successives, les parlementaires n'arrivent toujours pas à lui trouver un successeur.
"Qui a un droit de veto ? De quel droit peut-on imposer quelqu'un ? Si vous voulez le dialogue, venez et traitez simplement des besoins du pays", a fustigé le prélat. Au cours des derniers jours, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a appelé à un dialogue autour de la présidentielle, après avoir annoncé le soutien officiel de son parti à la candidature du chef des Marada, Sleiman Frangié.
Geagea ouvert sur d'autres candidats
Selon certains observateurs, le rapprochement entre l'Iran et l'Arabie saoudite pourrait significativement influencer l’issue de l’élection présidentielle, dans un sens ou dans l'autre, alors que le Hezbollah, allié de l'Iran, soutient officiellement la candidature de M. Frangié, connu pour sa proximité avec le régime syrien. En face, les partis d'opposition, dont certains sont proches de l'Arabie saoudite, sont hostiles à cette candidature. Certains d'entre eux, comme les Forces libanaises (FL), soutiennent la candidature du député de Zghorta, Michel Moawad.
"Nous continuons de soutenir la candidature de Michel Moawad, pour le moment, mais nous sommes ouverts au dialogue avec les forces d'opposition autour de tout candidat alternatif qui aurait les critères requis et qui pourrait unifier les rangs de l'opposition (...)", a affirmé Samir Geagea, chef des FL, lors d'un événement partisan dimanche, selon des propos rapportés par l'Ani.
commentaires (19)
Mieux vaut débarrasser le plancher si c’est pour venir nous annoncer les catastrophes que vous avez tous provoqués en toute conscience.
Sissi zayyat
12 h 29, le 14 mars 2023