
Hussein Khalil et Wafic Safa reçus par Walid Joumblatt à Clemenceau, jeudi. Photo fournie par le service de presse du PSP
Walid Joumblatt était l’un des premiers à le comprendre : le Liban en chute libre n’est pas la priorité de la communauté internationale qui a le regard ailleurs. Il faut donc qu’une dynamique interne soit sérieusement mise sur les rails pour débloquer la présidentielle. Conscient de cette équation, le chef du Parti socialiste progressiste ne reste pas les bras croisés. Il poursuit ses efforts en quête de ce qu’il appelle un « compromis » autour du nom du futur chef de l’État. Une démarche qui suppose un dialogue avec le Hezbollah, sans pour autant lâcher le candidat soutenu par une large frange de protagonistes hostiles au parti chiite, Michel Moawad, du moins pour le moment.
« En attendant les miracles arabes et internationaux, j’essaie – à ma façon – de transmettre un message à tous les protagonistes, y compris le Hezbollah, selon lequel nous pouvons atteindre un compromis autour de la présidentielle au niveau interne sans attendre que les grandes puissances se tournent vers nous ». C’est par ces termes que Walid Joumblatt résume à L’Orient-Le Jour sa réunion jeudi soir à Clemenceau avec une délégation du Hezbollah. Cette seconde rencontre entre les deux partis en l’espace de cinq mois s’est déroulée en présence de Taymour Joumblatt, député du Chouf, et Ghazi Aridi, ancien ministre joumblattiste. Il y avait aussi Wafic Safa, haut responsable au sein de la formation chiite, et Hussein Khalil, conseiller du secrétaire général du parti Hassan Nasrallah. Une des personnalités présentes à la réunion confie à L’OLJ que la rencontre a eu lieu à l’initiative du chef druze. Selon les informations de notre chroniqueur politique Mounir Rabih, les discussions ont porté sur les efforts à déployer pour parvenir à un accord politique élargi autour du futur président de la République. Toujours selon lui, les représentants du Hezbollah ont exposé devant le leader de Moukhtara leur vision de l’échéance. Celle-ci est axée sur l’appui – pas encore déclaré – à la candidature du leader des Marada Sleiman Frangié. Une option à laquelle s’oppose catégoriquement le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, l’autre allié chrétien du parti de Hassan Nasrallah.
La susdite personnalité indique à L’OLJ que la délégation du parti de Dieu a discuté avec ses interlocuteurs de certains noms de présidentiables auxquels s’appliquent les critères déjà définis par Hassan Nasrallah. « Nous ne voulons pas d’un président de défi. Il faut qu’il soit ouvert à tous les protagonistes et qu’il puisse nous rassurer, c’est-à-dire un chef de l’État qui, comme l’avait dit le secrétaire général (du Hezbollah), ne poignarderait pas la résistance dans le dos », affirme un proche du parti chiite présent à la réunion avec Walid Joumblatt, sans pour autant dévoiler les noms dont il a été question.
Si le Hezbollah est confiant du fait que le zaïm de Zghorta ne le poignardera pas dans le dos, Sleiman Frangié reste un candidat de défi aux yeux du camp adverse. Une équation délicate dont le Hezbollah est conscient. Serait-il donc prêt à lâcher du lest ? « Il faut que tous les protagonistes optent pour un dialogue élargi autour de deux ou trois candidats pour que l’on puisse élire le futur chef de l’État », se contente de dire un haut responsable du Hezbollah sous couvert d’anonymat, sans s’attarder sur la candidature de Sleiman Frangié, qui demeure donc sur la table jusqu’à nouvel ordre.
L’option Pierre Daher ?
De même, Moukhtara ne semble pas disposé à abandonner Michel Moawad à ce stade. « Je n’ai pas encore de nom de candidats consensuels », affirme Walid Joumblatt, dans ce qui sonne comme une réponse aux spéculations médiatiques sur un appui joumblattiste à l’élection de Pierre Daher, PDG de la chaîne locale LBCI, à la magistrature suprême. Jeudi, des médias locaux rapportaient que Joey Daher, fils de Pierre Daher et gendre de Walid Joumblatt, aurait rencontré Wafic Safa loin des projecteurs pour discuter de (l’hypothétique) candidature de son père à la présidence de la République. « Je ne me suis pas entretenu avec M. Safa », assure Joey Daher à L’OLJ.
Le bloc parlementaire joumblattiste continuera donc d’accorder son appui à Michel Moawad jusqu’à ce qu’une « autre solution soit discutée avec lui », d’après Walid Joumblatt. Des propos qui interviennent au lendemain d’une déclaration de Hadi Aboul Hosn, député de Baabda, lors de la onzième séance parlementaire dédiée à l’élection d’un président. Le député avait agité le spectre d’un boycottage par son bloc des réunions électorales « si les choses continuent de la même façon ». Une allusion à la farce à laquelle se livrent les députés du 8 Mars place de l’Étoile tous les jeudis. Un éventuel boycott joumblattiste des réunions parlementaires ferait perdre au candidat de l’opposition un appui significatif, alors que les protagonistes de l’opposition n’ont toujours pas de plan B. C’est ce qui aurait poussé M. Aboul Hosn à rectifier le tir hier. « Notre prise de position est intervenue après 11 tentatives d’élire un président sans succès. Il ne s’agit pas d’une façon de bloquer l’échéance, mais d’un pas en avant pour exhorter (l’opposition) à ouvrir une brèche dans le mur de la crise », a-t-il écrit sur son compte Twitter, annonçant qu’« un nouveau round de contacts en vue d’élire un président a débuté hier ».
De l’autre côté de l’échiquier, les rapports entre le Hezbollah et le CPL sont au plus bas depuis la mise en place de l’accord de Mar Mikhaël (2006). Et c’est dans ce contexte tendu qu’est intervenue la réunion de Clemenceau. Quel message a donc été adressé à Gebran Bassil par son allié chiite ? « Il n’y a pas de divorce entre le CPL et le Hezbollah et nous n’avons pas besoin d’adresser des messages à qui que se soit », se contente de répondre le haut responsable au sein de la formation chiite, annonçant prochainement des rencontres entre le Hezbollah et des représentants du courant aouniste.
Walid Joumblatt était l’un des premiers à le comprendre : le Liban en chute libre n’est pas la priorité de la communauté internationale qui a le regard ailleurs. Il faut donc qu’une dynamique interne soit sérieusement mise sur les rails pour débloquer la présidentielle. Conscient de cette équation, le chef du Parti socialiste progressiste ne reste pas les bras croisés. Il...
commentaires (11)
On comprend que jumblat et "le" hezb décident de déblayer la voie... pierre "sortant" va s'y aventurer apparement, mais... le sait-il? yalla pierro, allah maa dwélibak
Wlek Sanferlou
17 h 45, le 22 janvier 2023