
Des manifestants venus afficher leur solidarité avec William Noun, arrêté par la Sécurité de l'Etat, à Beyrouth, le 14 janvier 2023. Photo Joao Sousa
L'arrestation, depuis vendredi de William Noun, dont le frère Joe est décédé dans la double explosion du 4 août 2020, a provoqué des réactions contrastées samedi de la part des différentes formations politiques. Le Courant patriotique libre (CPL, aouniste) dont est proche Tony Saliba, le chef de la Sécurité de l'Etat, organe sécuritaire qui a fait arrêter M. Noun, a ainsi appelé les parents des victimes à ne pas diriger leur colère contre M. Saliba, tandis que le parti Kataëb a, lui, pointé du doigt l'influence du Hezbollah dans cette affaire.
William Noun a été arrêté vendredi par la Sécurité de l'Etat pour enquête après des propos tenus jeudi soir lors d'un programme télévisé au cours duquel il menaçait de "faire exploser le Palais de Justice".
Si certains observateurs ont pointé du doigt un rôle initiateur de Tony Saliba dans cette arrestation, une source sécuritaire a rejeté cette lecture. "C’est le juge Zaher Hamadé qui a chargé la sécurité de l’Etat de cette mission. Il aurait pu désigner un autre appareil qui aurait agi de la même façon", a-t-elle indiqué. Tony Saliba est soupçonné de manquements aux devoirs de sa fonction, et poursuivi dans le cadre de l’enquête sur le 4 août 2020. Il a été reconduit dans ses fonctions en mars dernier. Le juge Zaher Hamadé est, pour sa part, considéré comme proche du mouvement Amal du chef du législatif. Deux députés et ex-ministres membres du mouvement Amal, Ali Hassan Khalil, qui est le bras droit de M. Berry, et Ghazi Zaïter, font l'objet de poursuites de la part du juge Tarek Bitar, en charge de l'enquête et avaient déposé des demandes pour dessaisir le juge du dossier. Ces demandes bloquent l'instruction depuis des mois.
Du côté du CPL, on affiche également un soutien à Tony Saliba . Contacté par L’OLJ, Jimmy Jabbour, député du Akkar (Liban-Nord) a pris fait et cause pour le chef de la Sécurité de l'Etat. Ce dernier "ne fait qu’exécuter un ordre émis par le pouvoir judiciaire", a affirmé le parlementaire, assurant que "les appareils de sécurité ne sont pas des milices qui exécutent des agendas politiques". Il a appelé les parents des victimes à "bien orienter leur bataille contre ceux qui bloquent l’enquête sur le drame du port", dans une pique au président de la Chambre, Nabih Berry, principal adversaire politique du camp aouniste.
Juges fantoches vs. juges patriotes
Un tweet du chef du CPL, Gebran Bassil va également dans ce sens : "Peu importe votre arrogance, vous ne pourrez pas arrêter la justice", a-t-il écrit. "Nous continuerons à lutter pour découvrir la vérité sur le port, et pour faire libérer ceux qui ont été injustement arrêtés, a-t-il ajouté. Vous pouvez manipuler certains juges fantoches, mais le Liban aura toujours des juges patriotes désobéissants".
L’arrestation de William Noun est intervenue alors que les rapports entre le Hezbollah - qui s’en était pris à plusieurs reprises au juge Bitar - et le CPL sont au plus bas. "Dans ce dossier, nous n’avons pas d’alliés. Nous sommes contre la détention de William Noun et voulons savoir la vérité sur le drame du port", a commenté Jimmy Jabbour.
De l’autre côté de l’échiquier, le chef des Kataëb, Samy Gemayel, estime que l'arrestation s’inscrit dans le cadre d’un "plan visant à clore le dossier du port, et faire taire les parents des victimes". "C’est une bataille que nous mènerons jusqu’au bout. D’autant plus que nous avons perdu plusieurs proches tués dans l’explosion", affirme le député du Metn à L’OLJ. Il pointe encore du doigt l'influence du Hezbollah dans ce développement, rappelant que certains médias proches du parti chiite, notamment le quotidien al-Akhbar, menaient campagne contre les parents des victimes.
Hamiha haramiha un point c’est tout et en plus ils sont assassins et sans scrupules.
11 h 53, le 16 janvier 2023