
Le président de la commission des Finances et du Budget, Ibrahim Kanaan. Photo ANI
La commission parlementaire des Finances et du Budget présidée par Ibrahim Kanaan, député du Courant patriotique libre, a tenu une réunion hier consacrée au projet de loi pour l’établissement d’un fonds souverain. Celui-ci aurait en théorie vocation à être alimenté par les revenus potentiellement issus de l’exploitation des réserves supposées d’hydrocarbures offshore du pays.
La loi en préparation devra garantir l’indépendance du fonds et consacrer son rôle de caisse d’épargne et d’investissement au service du pays, selon les « trois cahiers des charges » incontournables décrits par le président de la commission à la presse au sortir de la réunion. Le député a également assuré que la gouvernance de ce fonds sera conforme aux « principes de Santiago » établis en 2008 par le Fonds monétaire international (FMI) et qui dictent les bonnes pratiques à respecter concernant la gestion des fonds souverains.
Pour ce faire, les discussions d’hier ont notamment tenté de déterminer, mais en vain, l’acteur institutionnel qui serait consacré gestionnaire du fonds : « La présidence de la République, le ministère des Finances, une institution publique spéciale ou encore un système de rotation », a expliqué Ibrahim Kanaan. Il a enfin insisté sur la nécessité de sortir des quotas sectaires et partisans pour y répondre, au profit « de la compétence et du respect des normes internationales ».
Deuxième étape
Dans un contexte d’effondrement du pays depuis trois ans, il a même été suggéré en réunion que le fonds souverain soit géré de l’étranger afin d’éviter qu’il ne soit impacté par « l’échec des politiques financières et monétaires, ainsi que le gaspillage » de ces dernières années, a encore souligné le député. Enfin, il a annoncé la formation d’une sous-commission, qu’il présidera et qui se réunira « mercredi prochain », afin de préparer « une étude comparative » avec les pays ayant effectué cette démarche. « Même si le processus prend une centaine d’années, il faut passer par (toutes) les étapes », et ce fonds vient après la démarcation maritime, a-t-il conclu, ajoutant que l’indépendance et la transparence de ce processus « donneront un nouveau visage au pays » et renouvelleront « la confiance » avec la communauté internationale.
Comme beaucoup d’autres acteurs, le député tient donc pour acquis que le Liban va bien pouvoir profiter d’une manne issue de l’exploitation de réserves d’hydrocarbures contenues dans ses fonds marins. Sauf que non seulement le processus prend du temps, mais surtout ces réserves doivent encore être confirmées. Jusqu’ici, un premier forage d’exploration dans le bloc 4 de la zone économique exclusive (ZEE) du Liban, soit en face du caza de Batroun, a permis de déceler la présence de gaz, mais pas en quantités commercialisables au point d’extraction choisi. L’exploration du bloc 9, situé à l’extrémité sud de la ZEE, devait être lancée avant la crise qui a éclaté en 2019, mais elle a été retardée en raison du litige entre le Liban et Israël sur le tracé de la frontière maritime. Le contentieux a finalement été réglé par un accord signé fin octobre au terme de longues négociations pilotées par les États-Unis.
TotalEnergies, qui compose avec l’italien ENI le consortium qui a remporté en 2018 le droit de forer dans les blocs 4 et 9, a d’ailleurs annoncé mardi que le processus allait reprendre, tandis qu’Energean, l’opérateur qui explore les fonds marins côté israélien, a récemment commencé à exploiter un puits dont le potentiel avait été confirmé et a mis à jour les données en concernant deux autres. Des signes encourageants, bien qu’ils ne suffisent pas à eux seuls à confirmer le potentiel du Liban sans exploration, même si le secteur bancaire libanais compte déjà sur cette manne pour tenter de minimiser sa participation à la compensation des pertes financières du pays (plus de 72 milliards de dollars selon les dernières estimations, en comptant celles de l’État et de la Banque du Liban). Des pertes qui sont une des causes principales de l’effondrement du système financier libanais et de la crise qu’il a contribué à empirer.
Contrôle des capitaux
Par ailleurs, ce fameux retour de la confiance, tant espéré par les responsables, aurait déjà pu se concrétiser a minima si les autorités avaient réussi à mettre en œuvre les réformes exigées par leurs soutiens et créanciers internationaux afin de remettre sur pied une économie libanaise en perdition depuis trois ans. Parmi eux et en tête de peloton, le Fonds monétaire international avec lequel le Liban a conclu un accord préliminaire à hauteur de 3 milliards de dollars sur quatre ans en avril dernier.
Cependant, pour le débloquer, le FMI a exigé plusieurs réformes, dont seulement deux ont été adoptées jusqu’ici, mais avec des défauts majeurs : le budget de 2022 et la loi aménageant le secret bancaire. Un des autres chantiers porte sur l’adoption d’une loi imposant un contrôle formel des capitaux, un dispositif central depuis l’imposition de restrictions bancaires sur les comptes des déposants au début de la crise en octobre 2019. En suspens depuis l’été, l’examen du projet de loi par les commissions mixtes a redémarré au début de la semaine dernière, avec cependant peu de progrès réalisés depuis en dépit de trois réunions tenues sur le sujet, la dernière ayant eu lieu mardi. Hier, le chef du Parlement Nabih Berry a convoqué les députés de plusieurs commissions, dont celle des Finances et du Budget, à une séance commune à ce propos lundi prochain.
La gestion du fond souverain doit être confiée à l'ONU. Car aucune confiance dans ceux cités dans l'article, dans le contexte politique actuel. On a vu leur gestion de l'épargne des déposants qu'ils ont volatilisé.
17 h 15, le 17 novembre 2022