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Moyen-Orient - Conflit

Au Yémen, une trêve à reconduire dans l’interminable attente de la paix

Le dernier cessez-le-feu en date doit se terminer dimanche, et l’ONU s’efforce de le renouveler.

Au Yémen, une trêve à reconduire dans l’interminable attente de la paix

Une station d’essence à Taëz, troisième ville du Yémen, le 27 août 2022. Ahmad al-Basha/AFP

Loujaïn al-Ouazir travaille depuis trois ans sur son projet d’élevage de chèvres et de volailles à Sanaa, mais il n’a vu le jour que ces derniers mois, à la faveur d’une trêve temporaire dans la guerre qui ravage le Yémen depuis huit ans.

Jeune diplômée de la faculté d’agriculture, elle nourrit avec attention ses animaux puis trait les chèvres dans une petite ferme établie sur le toit de sa maison, l’une des bâtisses antiques qui ont fait la renommée mondiale de la capitale, tenue par les rebelles houthis depuis 2014.

Soutenu par l’Iran, ce mouvement a pris le contrôle d’une grande partie du Yémen dans une guerre acharnée contre les forces du gouvernement, appuyées elles par une coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite.

« Grâce à la trêve, les prix des aliments pour animaux et ceux de l’essence ont baissé. Et c’est plus facile de faire venir des aliments et des chèvres d’autres régions », dit Loujaïn al-Ouazir. Selon elle, la cessation relative des violences, et notamment des bombardements, a instauré un environnement plus sûr pour son activité, qui consiste principalement en la vente de lait et d’œufs via les réseaux sociaux.

« J’espère que la trêve continuera jusqu’à ce que la guerre s’arrête complètement pour qu’on puisse poursuivre nos petits projets », confie la jeune femme, disant rêver d’une ferme « au sol et pas sur le toit de la maison ».

Depuis le 2 avril, le Yémen vit au rythme relativement apaisé de trêves temporaires de deux mois, renouvelées à deux reprises. La dernière en date doit se terminer dimanche, et l’ONU s’efforce de la faire reconduire.

La vie reste difficile

Ces trêves temporaires ont apporté un certain répit à une population d’environ 30 millions d’habitants, épuisée par huit ans de guerre et par une crise humanitaire parmi les plus graves au monde.

Selon l’ONU, le conflit a fait des centaines de milliers de morts, des millions de déplacés et plongé les deux tiers de la population dans le besoin d’aide, avec une situation proche d’une famine à grande échelle.

Les trêves successives ont notamment permis le retour des vols limités depuis et vers l’aéroport de Sanaa. Elles ont également facilité l’acheminement des marchandises, des carburants et de l’aide humanitaire dont dépendent deux tiers de la population.

Mais les trêves sont loin d’avoir tout réglé, en particulier à Taëz, la grande ville du Sud-Ouest contrôlée par le gouvernement mais assiégée par les rebelles. Le cessez-le-feu devait permettre, en vain, la réouverture des grands axes routiers autour de la ville.

Dans le centre de Taëz, de vieux

4 x 4 font le plein de passagers qui veulent se rendre dans la ville voisine d’al-Hawbane, empruntant des routes alternatives cahoteuses à travers la montagne. Le simple trajet, qui était de 15 minutes avant le siège, est devenu un périple de plusieurs heures.

« J’avais l’habitude d’aller à al-Hawbane en peu de temps, et maintenant j’ai besoin de quatre ou cinq heures », déplore Bassem al-Sabri, un habitant de Taëz.

Diego Zorilla, coordinateur humanitaire adjoint de l’ONU pour le Yémen, constate que la trêve a certes amélioré la situation « à bien des égards », mais « la vie reste difficile pour la grande majorité ».

Pas d’alternative

« D’un point de vue humanitaire, le renouvellement de la trêve le 2 octobre est un impératif moral », affirme le diplomate. Mais, insiste-t-il, « seule une résolution du conflit peut permettre à l’économie de se redresser, de sortir la population de la pauvreté et de réduire les besoins humanitaires ».

Or les pourparlers pour mettre définitivement un terme au conflit restent au point mort, alors que, en août, l’émissaire de l’ONU pour le Yémen, Hans Grundberg, avait parlé de « consolider l’opportunité offerte par la trêve de s’orienter vers une paix durable ».

Sur le long terme, la trêve n’a donc « rien changé fondamentalement » et s’avère être « un échec à certains égards », puisque son « objectif certes très ambitieux était de voir des progrès dans les négociations » de paix, souligne Thomas Juneau, professeur à l’Université d’Ottawa. « Du côté des houthis, il n’y a pas de volonté sérieuse de négocier et donc de faire des compromis avec le gouvernement », observe ce spécialiste du Yémen.

Côté gouvernemental, « on a vu les lignes de fracture qui étaient très profondes s’élargir, les tensions empirer et dans plusieurs cas devenir violentes », entre les différentes factions antirebelles.

Pour Thomas Juneau, « il y a de l’absurdité à reconduire une trêve qui ne fonctionne pas » et ne fait que « retarder le retour d’une violence accrue ». « Mais je ne vois pas d’autre alternative. »

Source : AFP

Loujaïn al-Ouazir travaille depuis trois ans sur son projet d’élevage de chèvres et de volailles à Sanaa, mais il n’a vu le jour que ces derniers mois, à la faveur d’une trêve temporaire dans la guerre qui ravage le Yémen depuis huit ans.Jeune diplômée de la faculté d’agriculture, elle nourrit avec attention ses animaux puis trait les chèvres dans une petite ferme établie sur...

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