La délégation du Fonds monétaire international menée par Ernesto Ramirez-Rigo a achevé mercredi sa visite de trois jours dans un Liban en crise, qui sollicite une assistance financière pour en sortir.
Depuis lundi, la délégation, à laquelle s’est joint le représentant résident du FMI au Liban Frederico Lima, s’est entretenue avec deux des trois principaux hauts responsables : le chef de l’État Michel Aoun, mercredi à Baabda, et le président du Parlement Nabih Berry, à Aïn el-Tiné. Le Premier ministre désigné Nagib Mikati s’est pour sa part entretenu mardi à New York, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, avec la directrice générale du FMI Kristalina Georgieva, qui lui a assuré que l’institution financière « tenait à conclure un accord avec le Liban au plus tôt ».
Mais, dans un communiqué publié à l’issue de sa visite, la délégation du FMI a exposé avec un ton beaucoup plus sévère son sentiment réel. Au cours de sa visite à Baabda, Ernesto Ramirez-Rigo a en effet affirmé qu’il s’attendait à ce que des mesures concrètes soient adoptées après les législatives de mai, de sorte que le Liban et le Fonds monétaire international s’entendent définitivement « entre fin septembre ou début octobre » sur le déblocage d’un programme d’assistance financière. À noter que les réunions annuelles d’automne entre le FMI et la Banque mondiale sont programmées à Washington du 10 au 16 octobre, ce qui peut vouloir dire que le Fonds monétaire espérait s’y rendre en ayant au préalable bouclé le dossier libanais.
Dépression sévère
L’argumentaire publié par le FMI sur son site développe le constat de l’institution financière, qui regrette en premier lieu que l’économie libanaise traverse une « dépression sévère » et que, « malgré l’urgence », peu de progrès aient été réalisés pour mettre en place les réformes nécessaires, dont une partie a été listée dans l’accord préliminaire du 7 avril conclu entre le Liban et l’organisation.
Le FMI note aussi le retard considérable accumulé dans le processus d’adoption du budget 2022, qui n’a toujours pas été adopté par le Parlement, et appelle les dirigeants libanais à se focaliser sur l’élaboration d’un nouveau budget pour 2023 qui soit « crédible » et basé sur des projections macroéconomiques « réalistes ». Le nouveau budget devra permettre à l’État d’augmenter ses recettes de « manière significative » afin de financer des dépenses sociales et des investissements conséquents par rapport aux enjeux, poursuit le Fonds monétaire international.
Il préconise de plus que le taux de la plateforme Sayrafa de la Banque du Liban devienne le seul taux en vigueur et serve donc de base au calcul du budget. « L’existence de taux de change multiples provoque d’importantes distorsions de l’activité économique », argumente encore le FMI, pour qui le système actuel alimente la corruption et les arbitrages (le fait de pouvoir bénéficier de la différence entre un taux et un autre), et épuise ce qui reste des réserves de devises de la BDL. « L’intervention sur le marché pour stabiliser le taux de change s’est avérée inefficace en l’absence de réformes indispensables », martèle encore l’organisation. Plus tôt dans la journée, le député Georges Adwan, qui préside la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, avait estimé que 3 milliards de dollars avaient été injectés à cette fin depuis le début de l’année.
L’initiative de la présidence saluée
Le FMI répète ensuite que le Liban doit absolument se doter d’une loi instituant un contrôle formel des capitaux pour réduire la pression sur ces réserves de devises. Il est également revenu sur les défauts de la loi aménageant le secret bancaire adopté par le Parlement fin juillet, mais qui lui a été renvoyée un mois plus tard par la présidence libanaise pour une seconde lecture, une initiative que le FMI a d’ailleurs saluée. Ces critiques ont été exposées à plusieurs reprises ces dernières semaines, notamment par le représentant résident de l’institution financière.
L’organisation considère enfin que la stratégie de résolution du secteur financier préparée par le gouvernement doit être mise en œuvre de manière à relancer la confiance des acteurs économiques envers le secteur bancaire. À ce niveau, le FMI maintient que les « petits déposants doivent être pleinement protégés (une ultime version du plan de redressement du gouvernement prévoit de protéger tous les dépôts à hauteur de 100 000 dollars) » et que le recours aux actifs de l’État doit être « limité ». Une position qui sous-entend que le Fonds monétaire international prévoit toujours de faire supporter aux banques une part conséquente des pertes financières que le pays doit absorber, qui sont estimées à environ 73 milliards de dollars et que les banques sont toujours réticentes à accepter.
Dans la colonne des points positifs, le FMI a simplement jugé que les discussions avaient malgré tout été « fructueuses » et que l’institution financière restait engagée aux côtés des autorités pour « faire avancer le programme de réformes ».
Un programme dense
La visite de la délégation du FMI a été courte mais dense. En 72 heures, elle a ainsi rencontré le vice-président sortant du Conseil des ministres Saadé Chami, le ministre sortant des Finances Youssef Khalil, celui de de l’Économie et du Commerce Amine Salam, ou encore les députés Ibrahim Kanaan et Georges Adwan, présidents respectivement des commissions parlementaires des Finances et du Budget, et de l’Administration et de la Justice. Lui-même ancien du FMI, Saadé Chami dirige la cellule chargée par le Liban de coordonner avec l’organisation et qui inclut le gouverneur de la BDL Riad Salamé, en plus des ministres des Finances et de l’Économie. Une réunion avec la Banque du Liban a également eu lieu ainsi qu’avec les organismes économiques, l’organisation patronale dirigée par l’ancien ministre Mohammad Choucair. Selon un communiqué publié par Baabda, des contacts ont aussi eu lieu avec des membres des « secteurs financier et bancaire ».
Depuis lundi, la délégation, à laquelle s’est joint le représentant résident du FMI au Liban Frederico Lima, s’est entretenue avec deux des trois principaux hauts responsables : le...
commentaires (7)
Franchement, ces experts ne comprennent rien à la réalité de la crise. Ils veulent que l'état (voleur), ramasse ce qu'on lui doit au taux de Sayrafa ! Donc, après avoir dilapidé nos dépôts dans les banques, ils veulent que l'état voleur nous assassiné avec les taxes, etc.. Ces experts ne doivent pas ignorer qu'avant de réduire le lot des fonctionnaires d'au moins 30%,car inutiles et imposés par les corrompus responsables, rien ne peut corriger les finances publiques, et rien ne peut être imposé aux gens démunis de leurs ressources. Un conseil, ne revenez plus.
Esber
22 h 18, le 22 septembre 2022