Un autre militant de la première heure a-t-il été chassé des rangs du Courant patriotique libre ? Des informations dans ce sens ont fuité mercredi dans les médias, selon lesquelles le conseil de discipline au sein du parti orange a décidé d’exclure l’ancien député de Jezzine Ziad Assouad. Figure controversée, M. Assouad est connu pour ses relations en dents de scie avec le leader du parti Gebran Bassil, mais aussi pour sa rivalité acerbe avec Amal Abou Zeid, également ancien député de Jezzine, proche du CPL. Il a d’ailleurs récemment intenté une action en justice contre OMT, la société de transfert d’argent dirigée par M. Abou Zeid, qu’il accuse d’avoir manipulé le taux de la monnaie nationale face au dollar.
Semer la désunion
Contactée, May Khoreiche, vice-présidente du CPL, nie que M. Assouad ait été exclu du parti, du moins pour le moment. « Ziad Assouad est un ancien député. Ainsi, son exclusion ne relève pas du conseil de discipline, mais d’un conseil spécial, celui des sages », précise-t-elle. Mais une procédure est-elle tout de même en cours contre le « tigre de Jezzine » ? « Je préfère ne pas parler des sujets internes du parti », se contente de répondre Mme Khoreiche. M. Assouad n’était pas joignable hier pour commenter ces informations. Il a toutefois déclaré à la presse qu’il n’était pas en contact avec le CPL depuis plusieurs mois et qu’il se « désintéresse de cette décision ». Sur son compte Twitter, il continue de critiquer son rival Amal Abou Zeid, qu’il appelle à « présenter ses excuses aux gens de Jezzine et du Liban dont il a volé l’argent ». Lors des législatives de mai, dans la circonscription du Sud I (Saïda-Jezzine), la liste formée par le CPL et le mouvement Amal a failli imploser des suites du désaccord entre ces deux candidats.
Si le CPL finit par exclure Ziad Assouad, ce dernier se rajoutera à la longue liste de militants aounistes écartés ces dernières années. L’un d’eux, l’avocat Antoine Nasrallah, affirme que M. Assouad serait une nouvelle victime des « purges » menées par Gebran Bassil contre ceux qu’il n’apprécie pas. « Bassil veut se débarrasser de Ziad Assouad, il a donc lancé la rumeur de son expulsion pour lui indiquer la porte. Toutefois, il fait face à une résistance considérable de la part de certains membres du parti proches de M. Assouad, comme Alain Aoun ou Ibrahim Kanaan », affirme-t-il. Après la fuite de l’information sur l’expulsion de Ziad Assouad, Alain Aoun avait en effet publié un commentaire sur son compte Twitter. « Je suis surpris de voir la nouvelle sur l’expulsion d’un pilier du CPL fuiter dans les médias sans que personne n’informe les membres au préalable... On pourrait penser qu’il s’agit d’une tentative pour semer la désunion au sein du parti en s’attaquant à un de ses symboles », a-t-il écrit. En 2015, Alain Aoun avait présenté sa candidature contre Gebran Bassil pour succéder à Michel Aoun à la tête du CPL. Il s’est finalement retiré de la bataille à la demande de Michel Aoun, son oncle.
Quel candidat pour la présidentielle ?
L’éventuelle suspension de Ziad Assouad en ce timing pose plusieurs questions, surtout que le pays vit actuellement les cinq dernières semaines du mandat de Michel Aoun, dont la course à la succession est lancée. Si Gebran Bassil se décrit comme un « candidat logique » au poste du fait de son poids parlementaire (il affirme diriger le plus grand bloc de la Chambre, ce que ses rivaux contestent), son isolement politique de plus en plus croissante pourrait lui barrer la route de Baabda. « En amont de l’élection, Gebran veut se débarrasser des nuisances au sein du parti et s’entourer de sbires obéissants », affirme un membre du parti sous couvert d’anonymat. Et de poursuivre : « Il souhaite remplacer les militants de la première heure, comme Ziad Assouad, avec lesquels il doit traiter intelligemment, par de nouveaux venus attirés par l’appât du gain et les postes ministériels. » Toujours selon ce membre, des dissidents au sein du CPL ne comprennent pas pourquoi le parti ne peut pas présenter un autre candidat que Gebran Bassil à la magistrature suprême. « Si Gebran n’est pas le bon candidat pour Baabda, pourquoi ne pas choisir quelqu’un d’autre du bloc ? » se demande-t-il. Les dissidents au sein du CPL pourraient-ils mettre leur propre candidat en avant ? Selon de nombreux observateurs, l’unité du parti prendra un coup après la fin du mandat de Michel Aoun, d’autant plus que de nombreuses figures aounistes se sont éloignées de Gebran Bassil pour des raisons idéologiques ou à la poursuite de leurs ambitions politiques. Mais du côté du CPL « officiel », on affirme que l’unité du parti tient bon. « Le seul candidat des aounistes, c’est Gebran Bassil. À moins qu’il annonce qu’il ne veut pas être candidat », lâche May Khoreiche, alors que M. Bassil a déjà fait entendre à plusieurs reprises qu’il ne se lancera pas dans la course à Baabda.
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A leader who cannot unite his Party and his Parliamentary caucus around a common agenda, picks fights with everyone he’s supposed to work with, cannot unite the country. Mr. Bassil proves once again that he is not qualified to be President. The Aoun-Bassil Presidency is going down in flames.
Mireille Kang
20 h 02, le 11 septembre 2022