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Culture - Entretien croisé

« Avec ses cravates à motifs d’éléphant, le Dr Sara éclaire l’atmosphère monochrome de l’hôpital »

Deux projections exceptionnelles ont eu lieu, à la salle Montaigne (Institut français du Liban, Beyrouth), du film « De son vivant » au profit de la Fondation Liban Cinéma, et des associations Balsam et La Voix de la femme libanaise, en présence de la cinéaste Emmanuelle Bercot, du médecin/acteur Gabriel Sara et du producteur Denis Pineau. Un événement qui a marqué le public libanais. Ce dernier, la gorge serrée par l’émotion, a longtemps applaudi la réalisatrice et le médecin lors d’une rencontre postprojection, animée par la journaliste et critique de cinéma de « L’Orient-Le Jour » Colette Khalaf. Morceaux choisis.

« Avec ses cravates à motifs d’éléphant, le Dr Sara éclaire l’atmosphère monochrome de l’hôpital »

Discussion postprojection du film « De son vivant », à la salle Montaigne de l’IFL, entre (de gauche à droite) Denis Pineau, Emmanuelle Bercot, Colette Khalaf et le Dr Gabriel Sara. Crédit photo Institut français du Liban

Emmanuelle Bercot, vous êtes actrice (« Polisse » et « Mon roi »), réalisatrice (« La Tête haute » et « De son vivant » ) et scénariste. Durant tout votre parcours, vous avez sondé les blessures de l’enfance et de l’adolescence comme si vous tailliez avec le bistouri. Dans ce film, présenté d’abord à Cannes et qui atterrit ici au Liban, vous affrontez une douleur plus grande : la mort. Pourquoi avez-vous abordé ce sujet ?

Depuis longtemps, traiter du sujet du cancer me traversait l’esprit. J’ai des parents médecins et je connais bien le milieu hospitalier. La rencontre avec le Dr Gabriel Sara a été le déclencheur du projet et l’initiateur essentiel. Dès que je l’ai rencontré, je savais quel était l’angle exact à aborder dans l’histoire, qui est certainement une fiction.

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Gabriel Sara, diplômé de la faculté de médecine de l’Université Saint-Joseph (USJ) en 1980 et installé depuis presque 40 ans à New York, vous êtes aujourd’hui hématologue, oncologue et directeur de l’unité de chimiothérapie à l’hôpital Mount Sinai à New York. Pourquoi avez-vous abordé Emmanuelle Bercot et comment ?

Cela faisait un certain temps qu’un projet d’écriture me démangeait. Je le partageais avec mon épouse Nada qui m’encourageait à traduire dans un ouvrage ma démarche philosophique face au cancer et à la mort. Par ailleurs, j’aime beaucoup le travail d’Emmanuelle Bercot et j’ai vu tous ses films. Un jour, alors qu’elle était venue à New York présenter La Fille de Brest, je l’ai abordée en lui proposant de me suivre dans les tranchées du cancer (car, pour moi, c’est une rude bataille). Après quelques correspondances, elle est revenue et m’a fait la proposition de jouer mon propre rôle dans le film. Je n’en ai pas cru pas mes yeux. Aujourd’hui, le rêve d’écriture est devenu réalité par le truchement du cinéma.

Emmanuelle Bercot, comment vous êtes-vous préparée à ce film ? En quoi Gabriel Sara vous a-t-il inspirée ? Vous dites d’ailleurs que ce n’est pas un documentaire, mais un film bien documenté...

Comme c’est un sujet délicat et qu’il n’y a pas une famille au monde qui n’ait souffert du cancer, fatal ou pas, en la personne de l’un de ses membres, il fallait traiter cela avec beaucoup de délicatesse, de réel. Mais, en outre, ne pas oublier que c’est une histoire de fiction et que, même si c’est un mélodrame, elle ne devait pas sombrer dans le larmoyant gratuit. C’est pourquoi j’ai voulu un chirurgien dans le rôle du Dr Eddé. Il m’avait également étonnée lors du casting. J’ai donc été visiter l’hôpital où le Dr Sara traite ses malades et où il leur a instauré un programme très intéressant de soutien psychologique. Musique, thérapie par l’art, tango, etc., qui adoucissent l’humeur des patients. Un accompagnement qui les aide à avoir des pensées positives et à s’évader en esprit dans tout ce qui est beau. C’est cette immersion dans la réalité du service hospitalier qui m’a aidée à construire mon scénario. De plus, le caractère positif du Dr Sara avec sa panoplie de cravates à motifs d’éléphant, de nuages ou autres a réussi à éclairer l’atmosphère monochrome de l’hôpital.

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Et vous, Gabriel Sara, l’expérience d’acteur s’est-elle avérée trop difficile ?

J’avoue que oui. Mais après maintes hésitations, j’ai décidé d’être moi-même, mais aussi de faire le jeu d’acteur. J’ai donc joué mon propre rôle. Il faut dire que jouer sous la direction d’Emmanuelle Bercot, avec de longues discussions à l’appui, des allers-retours, des essais en toutes sortes et sous les regards bienveillants de Cécile de France, Benoît Magimel et Catherine Deneuve, est une expérience fabuleuse. Certes, quelques citations dans le scénario sont inspirées de mon parcours de médecin comme « nettoyer le bureau de sa vie », les cinq mots à dire à quelqu’un avant le grand départ : « Je t’aime », « Pardonne-moi » , « Je te pardonne », « Merci, au revoir » et d’autres pensées extraites de mon expérience, notamment le malade qui choisit (consciemment ou inconsciemment) la personne qu’il veut présente avec lui dans la pièce avant de mourir…

Denis Pineau, producteur (« Valenciennes », les Films du kiosque), vous êtes venu avec Emmanuelle Bercot au Liban, pays natal du Dr Gabriel Sara, pour présenter « De son vivant » au public libanais. Avez-vous appuyé dès le début le projet de l’auteure/réalisatrice et sans crainte aucune ?

Oui, car Emmanuelle Bercot a su avec le temps assurer et confirmer sa place dans le paysage cinématographique français. Nous croyons de plus que ses œuvres ont une certaine influence sur la marche de la société et qu’elles en sont le miroir authentique.

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