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Politique - Législatives 2022

Les mégacentres de vote décidés pour 2026, le CPL prépare sa contre-attaque

Le gouvernement reconduit Tony Saliba à la tête de la Sécurité de l’État ; Ziad Makari nommé ministre de l’Information.

Les mégacentres de vote décidés pour 2026, le CPL prépare sa contre-attaque

Le Conseil des ministres réuni hier sous la présidence de Michel Aoun à Baabda. Photo Dalati et Nohra

Michel Aoun et son camp ont subi hier un nouveau camouflet : les mégacentres seront mis en place pour les législatives de 2026 et non de mai 2022, malgré tout le forcing du président de la République et du Courant patriotique libre qui ont fait de ce dossier leur cheval de bataille ces dernières semaines et qui semblent déjà préparer leur contre-attaque.

La décision a été prise lors du Conseil des ministres tenu à Baabda sous la houlette du chef de l’État Michel Aoun. Une séance qui est intervenue deux jours après la dernière réunion, mardi, de la commission ministérielle chargée d’examiner la question de ces bureaux de vote géants. Cette commission avait fini par déclarer que la mise en place des mégacentres exige un amendement de la loi électorale en vigueur. Une option rejetée par le président de la Chambre, Nabih Berry, grand adversaire du camp présidentiel. Appelé à trancher, le Conseil des ministres a examiné le dossier hier et décidé de ne pas donner son feu vert à la mise en place des mégacentres pour les législatives de 2022. Le cabinet a toutefois plaidé pour leur adoption dans la perspective du scrutin de 2026.

Eclairage

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« Nous avons fait barrage aux tentatives de reporter les élections », commente pour L’Orient-Le Jour un ministre proche du mouvement Amal, qui a souhaité garder l’anonymat, dans une critique à peine voilée au CPL, accusé par ses détracteurs de vouloir reporter l’échéance électorale alors qu’il est en déclin de popularité depuis la révolte d’octobre 2019. Comme pour répondre à ces accusations, le président Aoun a pris le soin d’affirmer, durant la séance gouvernementale, que « les élections doivent se tenir dans les délais impartis, indépendamment des prises de position concernant les mégacentres ». « Et que chacun s’acquitte de ses responsabilités sur ce plan », a ajouté le chef de l’État. « Je suis avec la mise en place de mégacentres parce qu’ils allègent la charge frappant les citoyens au vu des conditions économiques et financières difficiles et permet d’augmenter le taux de participation », a-t-il affirmé, comme pour justifier ce forcing en vue de leur adoption.

Pas d’unanimité

La question de ces centres géants qui permettent aux électeurs de voter en leur lieu de résidence plutôt que dans leur circonscription d’origine divise les composantes du gouvernement, et cela s’est traduit en Conseil des ministres. Une source ministérielle confie dans ce cadre à L’OLJ que plusieurs ministres gravitant dans l’orbite de la présidence – dont celui de la Justice, Henri Khoury – ont affirmé qu’il n’y a aucun besoin d’amender la législation électorale pour mettre en place les mégacentres. De son côté, le ministre du Tourisme, Walid Nassar (relavant lui aussi de la quote-part de la présidence), entendait présenter une étude détaillant les coûts de cette démarche, ainsi que les centres qui pourraient être adoptés en tant que bureaux de vote. « Mais le président de la République et le Premier ministre ont voulu épargner à l’équipe ministérielle une nouvelle secousse. Il a été donc demandé à M. Nassar de garder son étude en veilleuse », raconte un membre du gouvernement. Un autre ministre fait savoir de son côté que ses collègues de la Culture, Mohammad Mortada, de l’Éducation, Abbas Halabi, et de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, se sont prononcés contre les mégacentres, en arguant de la nécessité de modifier le texte de loi dans ce sens.

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Désormais, les regards sont rivés sur le duo présidence-CPL et son éventuelle contre-attaque. D’autant que le tandem mène seul la bataille des mégacentres. Ceux-ci sont rejetés par Nabih Berry et le Parti socialiste progressiste de Walid Joumblatt. Quant au Hezbollah, tiraillé entre ses deux alliés (Aoun et Berry), il tente de ménager la chèvre et le chou. Dans un communiqué publié hier à l’issue de sa réunion hebdomadaire, le groupe parlementaire du parti chiite a estimé que « l’adoption des mégacentres est une mesure qualitative requise et qui doit être adoptée pour les prochaines élections qui doivent se tenir à la date prévue ».

La prochaine étape aouniste

« Nous sommes sous le choc car nous ne nous attendions pas à ce que le Conseil des ministres prenne une telle décision, dans la mesure où nos alliés qui font partie du gouvernement affirmaient comprendre notre insistance pour les mégacentres », révèle à L’OLJ un parlementaire aouniste qui a requis l’anonymat. Selon lui, le comité politique au sein du CPL tiendra une réunion aujourd’hui pour décider de la prochaine étape. « Nous ne permettrons pas qu’on nous accuse d’œuvrer pour reporter les législatives », dit-il. Il affirme, dans le même temps, que son parti est prêt à « user de tous les moyens constitutionnels pour que soient mis en place les mégacentres ». Une façon de laisser la porte ouverte à la présentation d’une proposition de loi allant dans ce sens. Une démarche qui risque de se heurter au veto du chef du législatif.

En attendant, le chef du CPL, Gebran Bassil, n’a pas caché sa colère. « Torpiller les mégacentres est un coup à la démocratie, car cela va accroître l’argent électoral et réduire le taux de participation (aux législatives), et par conséquent la légitimité de la représentativité de la Chambre », a-t-il écrit sur Twitter. « Il est normal que la classe au pouvoir anéantisse toute réforme. Mais il n’est pas normal que nous soyons les seuls à nous y opposer », a-t-il ajouté. Et de poursuivre : « Tous ceux qui ne pourront pas se rendre dans leurs villages, à défaut de financement, pour voter vont se rappeler de nous, de même que ceux dont la dignité ne leur permet pas d’accepter qu’on paie pour eux (les frais du déplacement). » De son côté, un proche de la présidence se contente de souligner que le gouvernement va élaborer un projet de loi prévoyant un amendement de la législation électorale afin d’employer les mégacentres lors du scrutin de 2026.

Des nominations... avec l’aval du tandem chiite

Pour en revenir au Conseil des ministres, il a reconduit Tony Saliba (proche du président Aoun) au poste de directeur général de la Sécurité de l’État, alors qu’il est poursuivi en justice dans le cadre de l’enquête sur le drame du 4 août 2020 au port de Beyrouth. À son tour, Hassan Choucair (chiite, gravitant dans l’orbite de Aïn el-Tiné) a été désigné vice-directeur du même appareil de sécurité. Ces nominations sont passées comme une lettre à la poste, avec l’approbation du tandem Amal-Hezbollah qui s’opposait, jusque-là, à toutes nominations en Conseil des ministres. Comment expliquer ce revirement ? L’article 32 de la loi portant sur la grille des salaires (2017) ne permet pas de conserver les postes de première et seconde catégorie aux anciens militaires, apprend-on de source informée. M. Saliba a donc été nommé « en sa qualité de civil » pour pourvoir au siège vacant du Conseil militaire, explique un ministre chiite sous le couvert de l’anonymat.

Le billet de Gaby NASR

Bouses et barbouzes

Sur un autre registre, le gouvernement a refusé de discuter de la question du retour des réfugiés syriens, poussant le ministre des Déplacés, Issam Charafeddine, à se retirer de la séance. « On ne m’a pas permis de m’étaler sur ce point, sachant que j’étais en Syrie il y a une dizaine de jours et que tout le monde plaide pour un retour des réfugiés », déplore M. Charafeddine. Selon des informations obtenues par L’OLJ, le ministre des Affaires sociales Hector Hajjar s’est opposé à un débat autour des réfugiés tant que la référence dans ce dossier n’est pas définie. M. Mikati a alors proposé la formation d’une commission sous sa houlette, qui devrait se réunir lundi pour examiner le dossier. Notons enfin que le Conseil des ministres a été notifié de la nomination de Ziad Makari, ingénieur proche des Marada, à la tête du ministère de l’Information, trois mois après la démission de Georges Cordahi sur fond de crise diplomatique entre le Liban et les pays du Golfe.

Michel Aoun et son camp ont subi hier un nouveau camouflet : les mégacentres seront mis en place pour les législatives de 2026 et non de mai 2022, malgré tout le forcing du président de la République et du Courant patriotique libre qui ont fait de ce dossier leur cheval de bataille ces dernières semaines et qui semblent déjà préparer leur contre-attaque. La décision a été prise...

commentaires (7)

Les mégacentres, fallait y penser avant et non a deux mois des élections. Il y a tant d’autres urgences a traiter, mais non. Pour ces crapules, une façon de plaire a leur électorat et de rester en place. On ne s’en sortira jamais!

CW

08 h 00, le 12 mars 2022

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • Les mégacentres, fallait y penser avant et non a deux mois des élections. Il y a tant d’autres urgences a traiter, mais non. Pour ces crapules, une façon de plaire a leur électorat et de rester en place. On ne s’en sortira jamais!

    CW

    08 h 00, le 12 mars 2022

  • cest surtout le hezb qui est contre, car il ne pourra plus faire pression sur ses electeurs...

    Jack Gardner

    15 h 51, le 11 mars 2022

  • Des mégacentres...? Oui, en toute urgence, pour y enfermer tous ces "responsables" incapables et inutiles, qui détruisent notre pays de par leur immense bêtise sans limites !!! - Irène Saïd

    Irene Said

    15 h 19, le 11 mars 2022

  • Non mais quel cinoche! Ils ont fait tout ça pour arriver à placer des repris de justice et des vendus à des postes clés simulant une divergence de position sur un détail qui n’intéresse personne à savoir les mégas centres. Ils nous font avaler des boas et prennent des postures de patriotes alors qu’ils ne cessent de collaborer pour nous anéantir et rester à leurs postes pour rester intouchables. Aux dernières élections, lorsqu’ils bénéficiaient ouvertement des ressources de l’état, ils ont affrété des charters en invitant la diaspora tous frais inclus à venir voter pour eux, maintenant qu’ils ont asséché les caisses ils prétendent ne pas avoir les moyens de payer le déplacement en bus de la population désirant voter. C’est le seul changement que nous avons observé. Pour le reste les dollars circulent pour acheter les plus démunis ( et ils sont nombreux) à venir vendre leurs voix pendant que les alliances honteuses vont bon train pour accaparer encore plus notre pays. On commence à regretter cette échéance qui pourrait s’avérer le tombeau de notre démocratie et de notre pays.

    Sissi zayyat

    12 h 52, le 11 mars 2022

  • C'est la politique de l’échange de bon procédés. Ils ont reporté les méga-centres mais ce sont offert des sbires au sein des institutions. Une parodie d’état et de gouvernement mais un exemple digne d’être étudié en science politique sur le clientélisme et la corruption au vu et au su de tout le monde. Et dire qu'il y a encore des gens qui soutiennent ces messieurs, a commencer par le Président passant par les ministres et la majorité des députés! Il n'y a pas longtemps, Aoun avait dit, le peuple est corrompu de quoi se plaint-il? Les élections qui viennent sont l’opportunité idéale pour le démentir, sinon les reconduire serait leur donner raison.

    Pierre Christo Hadjigeorgiou

    08 h 53, le 11 mars 2022

  • Tant qu’à faire, autant instaurer le vote électronique et online d’ici 2026…

    Gros Gnon

    08 h 37, le 11 mars 2022

  • J'avoue ne rien comprendre à cette histoire. Il me semblait que le but était de permettre aux électeurs de voter à leur lieu de résidence et non à leur lieu d'origine, ce qui est. d'ailleurs, parfaitement logique. Il me semble que ce n'est qu'un problème technique, facile à résoudre à l'ère informatique. Le transfert des dossiers ne nécessitant qu'un simple clic de souris. Pourquoi faut-il pour cela des centres "géants"? Pourquoi faut-il une loi spéciale?

    Yves Prevost

    07 h 32, le 11 mars 2022

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