Le clin d'œil

Combien ça coûte ?!

Combien ça coûte ?!

D.R.

Il fut un temps, dans les salons huppés de Beyrouth, où parler d’argent ou ne serait-ce qu’évoquer même tacitement prix, rentrées, fortune et autres gros sous équivalait à un péché mortel. Péché de mauvaises manières, pire encore, péché de mauvais goût ne pouvant être que le fait d’individus mal dégrossis et de parvenus malpolis. Même quand on avait un revers de fortune, on mourait debout, stoïquement et en silence, continuant envers et contre tout à faire bella figura en société.

À la maison et dans votre collège bien sous tous rapports, la règle était bien entendu scrupuleusement appliquée et vous connaissez même une grande dame qui allait jusqu’à effacer à l’alcool les étiquettes de prix des moindres objets qu’elle achetait pour la maison, afin que ses enfants ne les voient pas…

La première estocade à ce système de valeurs immuable vous fut donnée, durant vos vacances d’été, par des proches kesrouanais joviaux n’hésitant pas, à votre grande stupéfaction, à vous demander ingénument à combien s’élevait votre salaire et « s’il en valait la peine ». C’est là que vous avez compris que « Vérité en-deçà de Beyrouth, erreur au-delà ! »

À l’heure actuelle, tous les tabous ayant sauté, les conversations de salon qui portaient jadis sur le dernier modèle de sac siglé acheté à Paris et sur le dîner dans un restaurant étoilé ont laissé la place à des sujets comiques/sordides débutant immanquablement par une question/piège : « Devinez combien coûtent… cinq pizzas au feu de bois achetées à la pizzeria du coin ? 1 500 000 LL ! Et le kilo d’aubergines, les petites aubergines toutes bêtes pour les farcis de tous les jours ? 65 000 LL ! » La palme est cependant remportée par la dame qui claironne l’étalon-type, la boîte de labné-du-pauvre ayant atteint le montant extravagant de 61 000 LL ! Exclamations outrées, cris sans chuchotements…

Quant à vous, vous venez de vivre une expérience consumériste édifiante. Ayant voulu acheter la poudre compacte de votre marque-beauté préférée, vous êtes sommée de débourser, à cet effet, 8 millions de livres ! Information prise, le produit contiendrait du caviar. Candidement, vous demandez s’il n’en existe pas une version au thon ou à l’humble sardine.

Pour les temps durs.

Il fut un temps, dans les salons huppés de Beyrouth, où parler d’argent ou ne serait-ce qu’évoquer même tacitement prix, rentrées, fortune et autres gros sous équivalait à un péché mortel. Péché de mauvaises manières, pire encore, péché de mauvais goût ne pouvant être que le fait d’individus mal dégrossis et de parvenus malpolis. Même quand on avait un revers de fortune,...

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