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Moyen-Orient - Éclairage

Les Émirats veulent renforcer leur arsenal défensif

Abou Dhabi anticipe une poursuite des attaques contre son territoire et cherche à renforcer ses capacités avec le soutien de ses alliés.

Les Émirats veulent renforcer leur arsenal défensif

Des soldats américains et un F-35 stationnés sur la base aérienne d’al-Dhafra, au sud d’Abou Dhabi. Photo d’archives/AFP

« Toutes les mesures nécessaires » seront prises pour protéger les Émirats arabes unis. Réagissant à la quatrième attaque sur la fédération émiratie en trois semaines, son ministre de la Défense a rappelé mercredi dernier l’engagement ferme d’Abou Dhabi à assurer la sécurité de son territoire et de ses résidents. Se présentant comme un havre de paix dans une région tourmentée, les EAU avaient tenté ces derniers mois d’emprunter la voie diplomatique pour éviter une confrontation directe avec leurs adversaires et rivaux régionaux. Mais face à la menace désormais récurrente de drones et de missiles lancés par des groupes hostiles de la région soutenus par l’Iran, les EAU cherchent aujourd’hui à renforcer leur arsenal défensif avec le soutien de leurs alliés. Au lendemain des premières frappes inédites du 17 janvier, revendiquées par les rebelles houthis et qui ont fait trois morts à Abou Dhabi, le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, a réaffirmé « l’engagement américain pour la sécurité et la capacité d’autodéfense des EAU ». Signalant l’importance du partenariat stratégique scellé entre les deux pays à travers les accords d’Abraham en septembre 2020, le premier ministre israélien Naftali Bennett s’est empressé d’exprimer sa « disponibilité à offrir un soutien sécuritaire et de renseignements ».

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Signe à la fois de soutien et de confiance, le président israélien Isaac Herzog a décidé fin janvier de ne pas interrompre sa première visite officielle aux EAU, malgré l’attaque survenue durant son séjour. La troisième du genre depuis le début de l’année, cette agression a été comme les précédentes revendiquée par les rebelles yéménites soutenus par Téhéran, déterminés à faire payer le prix de l’engagement d’Abou Dhabi dans la coalition appuyant depuis 2015 les forces progouvernementales au Yémen. Le timing de cette troisième attaque marque également un rejet de l’alliance décriée par une partie de la région entre les EAU et l’État hébreu, qui devait consolider un front anti-iranien à travers des coopérations stratégiques, y compris dans les domaines sécuritaires et de défense.

Des alliés engagés

Paradoxalement, les attaques sur le territoire émirati semblent avoir accéléré le rapprochement entre les deux pays, qui se focalisait officiellement sur les échanges économiques. Embarqués dans un conflit asymétrique contre des groupes non officiels aux moyens relativement limités, « les EAU cherchent en effet à renforcer le niveau inférieur de leur défense aérienne pour contrer les RAM (roquettes, artillerie et mortiers), qui serviraient également contre les drones », précise Riad Kahwaji, analyste spécialisé dans les questions de défense, basé à Dubaï. Si un transfert de technologie concernant le bouclier défensif du Dôme de fer a vite été exclu par les responsables sécuritaires israéliens, les Émiratis seraient néanmoins en discussion avec des officiels pour coordonner leurs efforts dans le domaine du renseignement, notamment concernant les systèmes de détection et d’alerte rapide. Abou Dhabi serait également en contact avec des sociétés de défense privées prêtes à lui vendre des systèmes antidrones.

« La force militaire émiratie est largement basée sur des équipements, des formations, une doctrine et une architecture de défense américains. Cette réalité ne changera pas », nuance cependant Gerald Feierstein, ancien ambassadeur des États-Unis au Yémen et vice-président du Middle East Institute. Pour se défendre lors des récentes attaques, les EAU ont dû activer leur système de défense américain THAAD (Terminal High Altitude Area Defense), acquis pour quelques milliards de dollars il y a moins d’une décennie et utile pour contrer les missiles balistiques de courte, moyenne et longue portée. La fédération émiratie a également lancé des missiles intercepteurs du système Patriot, estimés chacun à près d’un million de dollars, conjointement avec les troupes américaines basées à al-Dhafra.

Afin d’améliorer l’efficacité de l’appareil de défense émirati, le Pentagone a d’ores et déjà promis de soutenir son système d’alerte rapide et d’envoyer des avions de combat de cinquième génération en renfort de la défense aérienne, tandis que le destroyer USS Cole coopérera avec la marine émiratie avant de faire escale à Abou Dhabi. Le département d’État a approuvé jeudi dernier de potentielles ventes d’armement à certains alliés régionaux, dont les EAU, qui pourraient ainsi acheter pour 65 millions de dollars de pièces de rechange afin de mettre à jour leurs systèmes défensifs, notamment THAAD et Patriot. Si la fédération émiratie n’a pas encore rouvert les discussions qu’elle avait suspendues sur l’achat d’avions de combat américains F-35, Washington semble enclin à assurer la protection de son allié stratégique, quitte à revoir dans une certaine mesure sa politique de désengagement de la région.

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Qualifiant les EAU de « pays ami », la ministre française des Armées Florence Parly a, quant à elle, annoncé vendredi que Paris mettrait à disposition de l’armée de l’air émiratie des avions de combat Rafale à partir de la base d’al-Dhafra, qui abrite aussi des troupes françaises. Ce soutien reposera sur des opérations coordonnées de détection et d’interception de drones et de missiles de croisière, et de ravitaillement en carburant, dans les limites du territoire émirati. Lors de la visite d’Emmanuel Macron dans le Golfe début décembre, un contrat d’armement avait été signé pour plus de 17 milliards d’euros, portant notamment sur l’achat de 80 Rafale de dernière génération.

Ces déploiements alliés servent de « message aux houthis et à l’Iran », insiste Riad Kahwaji. Alors que les agressions contre les EAU semblaient initialement liées à leur soutien aux groupes progouvernementaux yéménites, permettant à ceux-ci de reprendre du terrain sur les houthis, les dernières frappes de mercredi dernier posent la question de l’implication de la République islamique. Ces attaques aux drones ont été revendiquées par une milice irakienne relativement inconnue, Alwiyat al-Waad al-Haq, soupçonnée d’être proche du groupe Kataëb Hezbollah et sous le contrôle direct des gardiens de la révolution iranienne. Les ministres des Affaires étrangères iranien et émirati se sont entretenus au téléphone le même jour pour réitérer leur volonté de poursuivre le dialogue et de contribuer à la désescalade au Yémen. Cependant, selon le site d’information Amwaj Media, une visite du président iranien à Abou Dhabi, qui aurait dû avoir lieu en février, ne figure pas sur l’agenda du chef de l’État. Ce déplacement devait faire suite à la visite début décembre à Téhéran de cheikh Tahnoun ben Zayed, conseiller national à la Sécurité et également frère du prince héritier d’Abou Dhabi. « Renforcer les capacités défensives des EAU pourrait être plus dissuasif pour l’Iran, forçant le pays à s’engager plus sérieusement sur la voie diplomatique », conclut Gerald Feierstein.

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