L'audience de l'ancien député Farès Souhaid a été reportée lundi, après que cette figure du mouvement souverainiste et farouche opposant au Hezbollah, se soit rendu au Palais de justice pour comparaître devant le juge du Mont-Liban, Ziad Daghidi, suite à une plainte déposée à son encontre par le mouvement chiite pro-iranien.
Le report a été motivé par une grève des auxiliaires de justice, sans que la date d'une prochaine audience ne soit fixée. M. Souhaid, fondateur du Rassemblement de Saydet el-Jabal, est notamment accusé par le Hezbollah de faire ressurgir les "vieux démons de la guerre civile", et d'avoir fait porter à tort à cette milice la responsabilité des explosions meurtrières au port de Beyrouth, le 4 août 2020.
A sa sortie du palais de justice, M. Souhaid a affirmé qu'il avait décidé de comparaître devant le juge "par respect pour la position du pouvoir judiciaire". "J'ai demandé au juge que le report ne prenne pas de temps, de crainte qu'un incident sécuritaire ne se produise dans le pays", a souligné l'ancien député, qui affirme craindre pour sa vie et accuse le Hezbollah de vouloir "terroriser ses opposants".
Dans un communiqué publié en soirée, un collectif d'avocats du Hezbollah a pour sa part affirmé que des partisans de Farès Souhaid présents sur les lieux les ont insultés et conspués, avant de les pourchasser jusqu'à un parking situé à proximité et de s'en prendre au véhicule de l'un d'eux. Ces avocats ont condamné "des actes miliciens" et ont appelé les forces de l'ordre et l'ordre des avocats à "réclamer des comptes à ceux qui ont violé la loi".
Lors d'une conférence de presse à son domicile dimanche à Kartaba, dans la montagne libanaise, devant une foule de personnalités et de délégations venues le soutenir, dont les familles des victimes de l'explosion du port, M. Souhaid avait appelé à la création d'un front souverainiste pour lutter contre "l'occupation iranienne du Liban". Il a estimé que cette affaire "n'est plus d'ordre personnel, mais est désormais une question d'opinion publique", accusant le Hezbollah de "porter plainte devant la justice sans même croire en cette justice". "Cela n'est qu'un moyen pour inciter à mon assassinat, une méthode que le parti utilise depuis longtemps", a-t-il dit.
Plusieurs anciens députés, notamment Boutros Harb, qui est l'un des avocats de M. Souhaid, et Marwan Hamadé, ainsi que des dizaines de personnes, s'étaient rassemblées dès lundi matin devant le palais de justice, pour lui afficher leur soutien.
"La coupe est pleine"
"Nous sommes venus aujourd'hui non seulement pour exprimer notre solidarité avec Farès Souhaid, mais parce que la coupe est pleine", a proclamé M. Hamadé, estimant qu'il ne restait plus au Liban que "la justice, qui est indépendante".
M. Souhaid a reçu l'appui d'un grand nombre de personnalités souverainistes dans ce procès qui a figure de symbole. "Avec le courageux Farès Souhaid dans sa confrontation contre l'hégémonie iranienne et les armes illégales", a ainsi tweeté l'ancien député Michel Moawad.
"Le Hezbollah se trompe s'il pense que notre détermination a faibli", a tweeté pour sa part l'ancienne ministre des Forces Libanaises (FL) May Chidiac, qualifiant M. Souhaid de "héros" et le Hezbollah d'"assassins de Rafic Hariri", l'ancien Premier ministre.
Suite au drame du port qui a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés, M. Souhaid avait accusé le Hezbollah d’utiliser le port de la capitale pour entreposer des armes et des matières dangereuses, ce que ce parti a farouchement démenti, en annonçant son intention de poursuivre en justice l’ancien député, figure du mouvement du 14 Mars hostile au régime syrien, de même que le site Web des FL de Samir Geagea.
Interrogé sur les preuves qu'il détiendrait sur l'implication du Hezbollah dans l'explosion du port de Beyrouth, M. Souhaid avait affirmé, dimanche, que le parti chiite, qui dispose d'une forte présence dans le port, "doit nous dire qui a fait exploser le nitrate d'ammonium, et si ce n'est pas lui qui alors l'a fait".
Pointées du doigt pour négligence criminelle, les autorités responsables sont accusées par des familles des victimes et des ONG d'ingérence politique pour torpiller l'enquête et éviter les inculpations. L'énorme déflagration d'août 2020 a été déclenchée par un incendie dans un entrepôt qui abritait des tonnes de nitrate d'ammonium stockées "sans mesures de précaution", de l'aveu même de ces autorités. L'une des thèses est que le Hezbollah serait derrière le stockage de ce nitrate d'ammonium qu'il aurait envoyé en Syrie pour soutenir le régime du président Bachar el-Assad dans la guerre civile déclenchée en 2011.
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