Rechercher
Rechercher

Moyen-Orient - Éclairage

Le militant égyptien Patrick Zaki libéré, en attendant son procès

L’étudiant avait été arrêté à son retour au Caire le 7 février 2020, déclenchant une large campagne de solidarité internationale.

Le militant égyptien Patrick Zaki libéré, en attendant son procès

Patrick Zaki avait été arrêté à son retour au Caire le 7 février 2020. Photo Facebook

C’est le dernier cas en date. Depuis plusieurs mois, instruction semble avoir été donnée aux juges égyptiens de se pencher sur un certain nombre de dossiers ultramédiatisés de détenus politiques bénéficiant d’une large visibilité à l’international. Khaled Daoud, Hossam el-Sayed, Solafa Magdy, Hossam Bahgat et, aujourd’hui, Patrick Zaki : ces noms de détenus connus du grand public faisaient jusque-là tache dans l’entreprise de lifting du régime de Abdel Fattah al-Sissi, qui œuvre afin de redorer son blason après la multiplication de critiques portant sur la dégradation des libertés fondamentales en Égypte. La série de verdicts rendus depuis le printemps dernier a permis d’envoyer un nouveau signal en direction des partenaires étrangers, Washington en tête : celui d’un régime prêt à tourner la page des « années d’exception »… du moins en apparence.

Un gage de bonne foi, certes partiel : c’est en ce sens qu’il faut lire la décision mardi prise par une cour d’urgence de sûreté de l’État de libérer le militant des droits de l’homme Patrick Zaki, en détention depuis 22 mois, dans l’attente de son procès prévu pour le 1er février 2022. L’audience, qui doit se tenir devant la Cour de sûreté de l’État de Mansoura, au nord de la capitale, avait initialement été prévue pour le 14 septembre, avant d’être reportée au 7 décembre puis à février. Il est accusé, entre autres, de « diffusion de fausses informations », d’« incitation à la violence et au terrorisme », et d’avoir appelé « à manifester sans autorisation ».

Lire aussi

Fin de l’état d’urgence en Égypte : l’arbre qui cache la forêt

Patrick Zaki, chercheur au EIPR, était étudiant à l’Université de Bologne, en Italie, lorsqu’il avait été arrêté et mis en détention à son retour au Caire le 7 février 2020. L’homme de 28 ans avait notamment œuvré à élucider les conditions du meurtre de l’étudiant italien Giulio Regeni, kidnappé, torturé et assassiné par les forces du régime en 2016. Son arrestation en 2020 avait déclenché une vaste campagne de solidarité, notamment en Italie. En avril dernier, le Sénat italien avait approuvé une proposition de loi visant à encourager le gouvernement à naturaliser Patrick Zaki, tandis qu’une cinquantaine de municipalités italiennes lui attribuaient une « citoyenneté honorifique ».

Arrière-goût amer

« Je saute de joie ! » avait déclaré mardi la mère du détenu à l’AFP, célébrant la libération de son fils, sorti de prison hier dans l’après-midi, après des mois d’angoisse. Ses anciens collègues de l’ONG Egyptian Initiative for Personnal Rights (EIPR), la communauté militante égyptienne, et ses soutiens internationaux ont également accueilli la nouvelle comme un rare succès, alors que des dizaines de milliers de prisonniers demeurent sous les écrous dans l’attente d’un procès. « Mais cette victoire a tout de même un arrière-goût amer : il a déjà passé deux ans derrière les barreaux, dans le cadre d’une détention injuste et dans des conditions déplorables… » avait toutefois nuancé Amr Magdy, chercheur à Human Rights Watch, au média en ligne Middle East Eye, tout en précisant que le jeune homme avait fait l’objet de torture physique lors de son arrestation.

Lire aussi

Le militant égyptien Hossam Bahgat condamné à une peine symbolique

L’arrestation de Patrick Zaki a eu lieu dans le cadre d’une campagne d’intimidation menée contre l’ensemble du personnel de l’EIPR, l’une des dernières organisations à œuvrer pour le respect des libertés fondamentales en Égypte. Gasser Abdel Razek, ancien directeur, Karim Ennarah, chercheur, et Mohammad Bachir, membre de l’administration, avaient été arrêtés en novembre dernier avant d’être libérés en décembre sous la pression d’une campagne de solidarité internationale. Le directeur actuel, Hossam Bahgat, avait quant à lui été condamné à une peine symbolique de 10 000 livres égyptiennes à la fin du mois de novembre, échappant à une peine de prison.

Mais malgré les quelques signes de détente, dont notamment en octobre la fin de l’état d’urgence en place de manière quasi continue dans le pays depuis 1981, les observateurs regrettent que le régime ne se contente que de « mesures cosmétiques » faites pour séduire l’Occident, mais qui ne changent rien, ou très peu, au quotidien des Égyptiens. Arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’État en 2013, le président Sissi a depuis régné d’une main de fer sur le pays, orchestrant une répression brutale ayant mené à la détention de 60 000 prisonniers politiques. Mais en prenant le prétexte d’une « lutte contre le terrorisme », le raïs égyptien a su ménager les chancelleries occidentales, notamment Paris, avec qui l’Égypte a continué de faire des affaires en matière d’armement et de coopération sécuritaire. Fin novembre, l’ONG « Disclose » publiait une série de révélations portant sur le détournement de l’aide militaire française pour des campagnes de bombardements de civils par l’armée égyptienne.

C’est le dernier cas en date. Depuis plusieurs mois, instruction semble avoir été donnée aux juges égyptiens de se pencher sur un certain nombre de dossiers ultramédiatisés de détenus politiques bénéficiant d’une large visibilité à l’international. Khaled Daoud, Hossam el-Sayed, Solafa Magdy, Hossam Bahgat et, aujourd’hui, Patrick Zaki : ces noms de détenus connus du...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut