Le président de la 15e chambre civile de la Cour d’appel, Habib Mezher, proche du tandem chiite Amal- Hezbollah, a été officiellement écarté, mardi, de l’affaire Tarek Bitar, un nouveau rebondissement dans le feuilleton judiciaire de l’enquête sur l’explosion au port de Beyrouth.
M. Mezher, qui s’acharne à entraver les investigations du juge Bitar, faisait l’objet de plusieurs plaintes, dont une du collectif Mouttahidoun, pour s’être saisi abusivement d’un recours en dessaisissement du magistrat chargé de l’enquête du port. Sa décision avait eu pour effet de suspendre le traitement du dossier par M. Bitar, juge d’instruction près la Cour de justice.
Mardi cependant, le juge Mezher a été notifié d’une décision de justice de l’écarter de l’affaire, suite à la plainte déposée par Mouttahidoun devant l’Inspection judiciaire pour dépassement de prérogatives, incompétence, partialité et autres fautes commises dans le cadre de ses fonctions.
La décision du juge Mezher avait provoqué confusion et indignation dans les milieux de la justice lorsqu’il a notifié, jeudi dernier, le juge Bitar d’un recours en dessaisissement porté contre lui par l’ancien ministre Youssef Fenianos, l’une des personnalités mises en cause dans l’enquête.
Pas d'audience pour Zeaïter
L’action du juge Mezher avait manifestement pour but d’empêcher le juge Bitar de poursuivre ses investigations, alors qu’une séance était prévue mardi pour auditionner le député et ancien ministre Ghazi Zeaïter, affilié au mouvement Amal. La séance n’a pas eu lieu, alors que les avocats des députés d’Amal, Zeaïter et Ali Hassan Khalil, ont engagé un énième recours, intentant une action en responsabilité de l’État pour "fautes lourdes" commises par la présidente de la 5e chambre civile de la Cour de cassation, Jeanette Hanna, et par ses deux conseillers, Joseph Ajaka et Noëlle Kerbaje, qui avaient rejeté, le 10 octobre, leur demande en récusation de Tarek Bitar, sans en notifier celui-ci ni les autres parties au procès.
Les deux députés ont porté le même recours contre Naji Eid et Rosine Ghantous, respectivement président et conseillère d’une autre chambre civile de la Cour de cassation, qui les avaient également déboutés le 11 octobre en se déclarant incompétents. Les avocats des deux députés ont assigné, mardi, ces cinq magistrats devant l’Inspection judiciaire.
Dans ce contexte, le parquet général près la Cour de cassation a répondu, mardi, à une demande déposée par les MM. Zeaïter et Khalil, qui réclamaient l'identification de l'autorité judiciaire chargée de statuer sur les demandes de dessaisissement du juge d'instruction près la Cour de justice. Selon le Parquet, c'est la Cour de justice elle-même qui est compétente pour traiter ces demandes. La Cour de justice est présidée par le premier président de la Cour de cassation et constituée de quatre juges siégeant à la Cour de cassation
Entre-temps, les responsables politiques mis en cause ne chôment pas. L’ancien ministre Fenianos, affilié au parti Marada de Sleiman Frangié, a présenté, lundi, un recours en dessaisissement contre Rosine Hojeili, conseillère au sein de la 12e chambre, pour l’empêcher de se pencher sur la question du dessaisissement de Tarek Bitar.
MM. Zeaïter et Khalil ont engagé, pour leur part, un énième recours, intentant une action en responsabilité de l’État pour "fautes lourdes" commises par la présidente de la 5e chambre civile de la Cour de cassation, Jeanette Hanna, et par ses deux conseillers, Joseph Ajaka et Noëlle Kerbaje, qui avaient rejeté le 10 octobre leur demande en récusation de M. Bitar, sans en notifier celui-ci ni les autres parties au procès.
Plus tôt dans la matinée, une dizaine de militantes de l'association Noun ont scellé à la cire rouge la porte du bureau du juge Mezher au palais de Justice de Beyrouth, l'accusant d'avoir '"outrepassé la loi" en se saisissant d'un recours présenté à l'encontre de Tarek Bitar. Elles l'ont également appelé à "rejeter le recours présenté à l'encontre du juge Bitar". "S'il n'y a pas de justice, il n'y a pas de Liban ; s'il n'y a pas de souveraineté, il n'y a pas de justice. Nous voulons qu'il y ait une justice", a plaidé une activiste. "Vous êtes des juges, travaillez en conscience", a clamé une autre. "Qu'auriez-vous fait si les victimes étaient vos enfants ?", s'est interrogée une autre protestataire.
commentaires (12)
Franchement, on est déboussolé par ce(s) palais de justice qui ressemblle(nt) à Harit kil min iido ilo et où l’impunité règne bien plus qu’ailleurs. Un juge qui illégalement s’auto saisit d’un dossier pour empêcher un autre dossier d’avancer doit tomber sous le coup de la justice et pas simplement se faire dessaisir. Et puis on se demande comment sortir de ce tunnel de M. M comme Mont Blanc bien sûr. Restons polis.
PPZZ58
19 h 52, le 09 novembre 2021