L’ancien député Farès Souhaid fait l’objet d’un procès intenté par le Hezbollah. Le fondateur du Rassemblement de Saydet el-Jabal, rassemblement politique souverainiste violemment opposé au parti chiite, est appelé à comparaître le 13 décembre prochain à 9 heures devant le juge d’instruction du Mont-Liban, Ziad Daghidi. Selon la convocation 434/2020 publiée par l’agence de presse al-Markaziya, le médecin, qui ne bénéficie d’aucune immunité judiciaire, a l’obligation de se présenter pour être entendu sur la base d’une plainte présentée contre lui par le Hezbollah en vertu des articles 295, 296, 308, 315, 317 du code pénal. Il est notamment accusé de faire ressurgir les vieux démons de la guerre civile, et de fausses allégations sur la responsabilité du parti pro-iranien dans la double déflagration au port de Beyrouth. Dans le cas où M. Souhaid ne se présenterait pas devant le juge à la date indiquée dans la convocation, il risquerait de faire l’objet d’un mandat d’amener.

Sauf que le responsable politique, dont le domicile principal est enregistré à Qartaba, n’a pas été officiellement notifié. « J’ai appris ma convocation sur les réseaux sociaux », affirme-t-il à L’Orient-Le Jour. « Je n’ai reçu aucune convocation m’invitant à me présenter devant le parquet du Mont-Liban, assure-t-il. J’ai en revanche été informé que le député Ibrahim Moussaoui avait intenté un procès contre ma personne au nom du Hezbollah. C’est d’ailleurs la première fois que le parti chiite intente un procès à une personnalité politique ou un citoyen. »

À la suite de l’explosion d’importantes quantités de nitrate d’ammonium au port de Beyrouth qui a fait 220 morts et plus de 6 000 blessés, M. Souhaid avait accusé le Hezbollah d’utiliser le port de la capitale pour entreposer des armes et des matières dangereuses, ce que le parti a démenti. La formation dirigée par Hassan Nasrallah avait alors annoncé son intention de poursuivre l’ancien député, figure du mouvement du 14 Mars antirégime syrien, de même que le site web des Forces libanaises. « Nous avons intenté un procès à chaque personne ou entreprise médiatique qui nous a accusés d’être impliqués dans la double explosion au port, qu’elle nous ait accusés de posséder du nitrate, de le transporter ou d’être liés à l’explosion », affirme à L’Orient-Le Jour le responsable des relations presse du Hezbollah, Mohammed Afif. « À l’instar de Farès Souhaid, deux autres personnalités politiques sont au cœur de notre action : Achraf Rifi (ancien ministre de la Justice) et Baha’ Hariri (frère de l’ancien Premier ministre Saad Hariri), de même que certains médias comme la chaîne télévisée MTV, qui incite à la haine contre nous. Qu’ils apportent donc les preuves de leurs accusations ! » précise M. Afif. MM. Rifi et Hariri appartiennent tous deux à la communauté sunnite, et sont hostiles au Hezbollah.

Quelle suite aura l’affaire ? « Je vais me comporter en citoyen », promet Farès Souhaid. Le chef du Rassemblement de Saydet el-Jabal va d’abord « consulter » ses avocats, Boutros Harb (ancien ministre), Simon Karam, Ramez Daher et Élie Kyrillos, afin de décider s’il comparaît ou non devant la justice. « Je me réserve aussi le droit d’intenter un procès au Hezbollah et à Hassan Nasrallah pour agression et fausses accusations de raviver la guerre civile », assure l’homme politique, qui rappelle son statut de « personnalité morale engagée dans le dialogue islamo-chrétien ». « Mon image est aujourd’hui ternie par ce procès », déplore-t-il.