Le président du Parlement, Nabih Berry, a convoqué mardi la Chambre à une session jeudi au palais de l'Unesco pour examiner une éventuelle mise en accusation, devant une commission parlementaire, de trois députés qui font l'objet de poursuites engagées par le juge Tarek Bitar, en chargé de l'enquête sur la double explosion au port de Beyrouth, le 4 août 2020.
Selon un bref communiqué de l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), le Parlement doit examiner cette éventuelle mise en accusation, "en vertu de l'article 22 annexé à l'article 20 de la loi 13/90 (Procédures pour les procès devant la Haute cour en vertu de l'article 80 de la Constitution).
Selon l'article 22 en question, "le Parlement convoque une séance spéciale qui se tient dix jours après que la ou les personnes qui doivent faire l'objet de poursuites aient obtenu une copie de l'acte d'accusation. Après avoir entendu les plaidoyers de l'accusation et de la défense, le Parlement décide à la majorité absolue de ses membres de transférer immédiatement devant une commission parlementaire spéciale, nommée "commission d'enquête", la demande d'accusation, avant de voter ou de rejeter cette demande".
"Le Parlement devrait débuter sa séance en se prononçant sur la demande de levée d'immunités formulée par le juge Bitar", a estimé le député Alain Aoun, membre du Courant patriotique libre, dans des propos accordés à L'Orient-Le Jour.
Dans un communiqué rapporté par l'Ani, les familles des victimes ont appelé à "participer à une mobilisation devant le palais de l'Unesco, au moment de la tenue de la séance parlementaire". Les familles ont qualifié la demande de M. Berry de "demande de la honte" affirmant qu'il s'agit d'une "tentative de camoufler la vérité".
Le juge d'instruction près la Cour de justice, Tarek Bitar avait en effet demandé début juillet la levée de l’immunité de quatre anciens ministres, dont trois actuels députés Nohad Machnouk, Ghazi Zeaïter et Ali Hassan Khalil, ainsi que de responsables sécuritaires en vue de les inculper pour "éventuelle intention d'homicide, négligence et manquements" à leurs responsabilités. Tentant de court-circuiter cette procédure, plusieurs députés, dont des parlementaires relevant des groupes de M. Berry et du leader du Courant du Futur Saad Hariri, ont signé une pétition pour que les responsables en question soient poursuivis devant la Haute Cour chargée de juger les ministres et le président de la République. Plusieurs experts et observateurs doutent de l'impartialité d'une telle procédure. Cette décision a provoqué un tollé dans l'opinion publique et une campagne a été lancée sur les réseaux sociaux contre les députés signataires, sous les hashtag #députés_du_nitrate et #députés_de_la_honte. Les noms et photos de ces parlementaires ont été largement diffusés après que la pétition ait été rendue publique, accompagnés d'une représentation de la déflagration, ce qui a poussé certains d'entre eux à retirer leur signature de la pétition.
La déflagration du 4 août 2020 s'était produite à la suite d'un incendie dans le hangar n°12 du port de Beyrouth, où étaient stockées depuis des années 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium, sans mesures de sécurité. Plus d'un an après le drame qui a fait plus de 200 morts et des milliers de blessés, la population libanaise, qui s'est massivement rassemblée devant le port mercredi dernier, dénonce la lenteur des investigations. Le président du Parlement avait déjà déclaré qu'il était prêt à lever l'immunité des députés aux fins de l'enquête, sans dire quand, où et comment. Quant à l'ex-Premier ministre et député Saad Hariri, il avait plaidé pour la suspension de certains articles de la Constitution, afin de lever toutes les immunités, tout en se prononçant contre le transfert du dossier devant la Cour de justice. un tribunal d'exception chargé de statuer sur les crimes portant atteinte à la sécurité nationale.
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Les personnes mises en cause à ce jour sont soupçonnées d’avoir pris connaissance de l’entreposage de la substance explosive sans rien faire, en particulier Mr. Le Président qui, étant le père de la nation et surtout le protecteur des chrétiens Maronites, aurait dû non seulement donner des ordres à son assistant pour s’occuper de l’affaire comme il l’a fait, mais aussi poursuivre assidûment son progrès et enfin s’assurer que tout a été fait selon les règles.
Georges Bitar
22 h 08, le 10 août 2021