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Monde - Focus

Les forces spéciales afghanes, des unités d’élite déjà à bout de souffle

Les forces spéciales afghanes, des unités d’élite déjà à bout de souffle

Des commandos de l’armée afghane, le 1er août 2021, dans la province de Hérat. Hoshang Hashimi/AFP

Formées par les États-Unis et dotées d’un équipement dernier cri, les forces spéciales afghanes sont reconnues pour leur expertise. Mais sollicitées de toutes parts et en partie privées du soutien aérien américain, elles sont au bord de la rupture. Les talibans mènent depuis trois mois une offensive tous azimuts à la faveur du retrait définitif des forces étrangères, presque achevé. Ils ont pris le contrôle de vastes territoires ruraux et menacent de grandes villes. L’avancée des talibans a surpris par son ampleur et sa rapidité. Les troupes régulières afghanes n’ont le plus souvent opposé qu’une faible résistance aux insurgés, contraignant les forces spéciales à combler le vide.

Mais, selon le général Haibatullah Alizai, 35 ans, le chef des forces spéciales afghanes, la baisse du soutien aérien américain a rendu leur tâche encore plus ardue. « Nous nous battons dans beaucoup d’endroits, sur différentes lignes de front, et cela devient difficile », déclare-t-il. En juin, une unité d’élite d’une vingtaine d’éléments a été prise en embuscade dans la province de Faryab (Nord). Après avoir vainement attendu des renforts, elle a été massacrée par les talibans. Le nombre total des membres des forces spéciales est classifié. Mais selon deux sources sécuritaires, il serait de 40 000 dans l’armée, 8 000 dans la police et 8 000 au sein des services de renseignements (NDS). Avec leurs lunettes de vision nocturne, leurs fusils d’assaut américains et autres armes modernes, ces unités ont donné du fil à retordre aux talibans à leur apparition en 2008.

« Jamais perdu une bataille »

« Les opérations spéciales en Afghanistan ont été façonnées à notre image », explique Todd Helmus, analyste au centre de réflexion américain Rand Corporation. Les membres des forces spéciales « sont très bons », « très bien entraînés ». Leur formation est bien plus complète que celle des forces régulières, souvent rudimentaire. Ils apprennent à évoluer ensemble, s’exercent aux techniques des tireurs d’élite et aux assauts aéroportés, et participent à des exercices à balles réelles. « Ces courageux soldats n’ont jamais perdu une bataille. Et ils n’en perdront jamais aucune », assurait en 2017 le général John Nicholson, alors commandant des forces américaines en Afghanistan, quand les forces spéciales ont participé à l’opération qui a coûté la vie à Abdul Hasib, chef de la branche afghane du groupe État islamique.

Mais des analystes estiment que les forces spéciales ont toujours été trop dépendantes de l’assistance internationale, que ce soit pour la collecte de renseignements ou la logistique, et se retrouvent fragilisées par le départ des troupes étrangères. « Nous assistons à l’échec de cette politique. Il est maintenant admis qu’évidemment, nous devons entraîner ces unités pour qu’elles sachent combattre seules, de manière à ne plus avoir besoin de nous », constate M. Helmus.

Selon le général Alizai, la formation et l’entraînement des forces spéciales ne sont cependant plus aujourd’hui assurés par les Américains, mais par les Afghans eux-mêmes. Avec le retrait des forces de l’OTAN, les unités d’élite sont la dernière ligne de défense du pouvoir afghan.

« Plus de sacrifices »

Les forces spéciales « sont utilisées à toutes les sauces et parachutées d’une crise à l’autre, étouffant le feu sans pouvoir l’éteindre », explique Vanda Felbab-Brown, analyste à l’institut américain Brookings. Ces unités ont notamment été déployées en juillet à Qala-i-Naw (Ouest), première capitale provinciale attaquée par les talibans depuis que le retrait définitif des troupes étrangères a commencé début mai. Elles ont aussi été utilisées pour défendre Kandahar (Sud) et Hérat (Ouest), les deuxième et troisième plus grandes villes afghanes.

Mais elles se sont souvent retrouvées livrées à elles-mêmes. Parmi les soldats tués à Faryab – une vidéo publiée ultérieurement laisse à penser qu’ils ont été abattus par les talibans après s’être rendus –, figurait le major Sohrab Azimi, une étoile montante de l’armée afghane. Sa mort a suscité l’émotion sur les réseaux sociaux. Son père, Zahir Azimi, un général à la retraite, a accusé la hiérarchie militaire de n’avoir pas soutenu l’unité de son fils. Certains craignent que ce genre d’épisode ne se répète. Mais le général Alizai reste convaincu que ses hommes vont tenir. « Chaque jour, nous perdons des gens remarquables, de grands hommes, de très bons officiers, sous-officiers et soldats », dit-il. Mais « cela ne va démoraliser personne (...) Nous sommes prêts à accepter plus de sacrifices ».

Élise BLANCHAR avec Oliver HOTHAM/AFP

Formées par les États-Unis et dotées d’un équipement dernier cri, les forces spéciales afghanes sont reconnues pour leur expertise. Mais sollicitées de toutes parts et en partie privées du soutien aérien américain, elles sont au bord de la rupture. Les talibans mènent depuis trois mois une offensive tous azimuts à la faveur du retrait définitif des forces étrangères, presque...

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