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Culture - Exposition

« L’Empire des sens » : désir et plaisir dans les peintures du XVIIIe siècle

Ces œuvres licencieuses d’artistes – dont Boucher et Fragonard – sont exposées au musée Cognacq-Jay à Paris.

« L’Empire des sens » : désir et plaisir dans les peintures du XVIIIe siècle

Jean-Honoré Fragonard (1732-1806) « La résistance inutile, vers 1770-1773 », huile sur toile, Stockholm, Nationalmuseum. © Nationalmuseum, Stockholm

Il fallait autrefois pénétrer dans un boudoir, une « petite maison » hors des villes ou un bordel pour les voir : aujourd’hui, ces peintures licencieuses d’artistes du XVIIIe siècle – dont Boucher et Fragonard – sont exposées au musée Cognacq-Jay à Paris.

« Nous avons sélectionné des œuvres extrêmement osées, des compositions secrètes, licencieuses et impertinentes », explique Annick Lemoine, la commissaire de l’exposition L’Empire des sens et directrice du musée. Ces œuvres confidentielles des peintres les plus prestigieux du siècle, tels François Boucher ou son célèbre élève, Jean-Honoré Fragonard, étaient à l’origine dissimulées au regard de leur public libertin par de petits rideaux.

Les tabous et interdits artistiques de l’époque se révèlent à travers « les audaces » et innovations des peintres.

« À une époque où l’on ne pouvait pas faire poser un modèle féminin dans un atelier, ils faisaient poser leur femme, leurs sœurs, raconte la commissaire Annick Lemoine. Ou, très souvent, et c’est là qu’intervient la question du sulfureux et de l’interdit, ils se procuraient des jeunes filles dans le milieu de la prostitution. »

Mise en valeur des fessiers, pouvoir érotique d’une chemise blanche qu’on retire (les dessous de l’époque), drapés aux dessins parfois évocateurs... les tableaux retracent au fil des salles le désir, de sa naissance à son assouvissement.

La chemise blanche relevée sur ses fesses couleur de nacre, une Odalisque brune allongée sur le ventre, tourne sa tête vers le peintre, les yeux embués et les joues rosies.

Cette peinture de Boucher (réalisée en 1745) est l’une des rares de l’exposition dont on connaît le probable commanditaire, un mécène proche des milieux littéraires libertins et l’un des hommes les plus riches de France, Alexandre Le Riche de La Popelinière.

L’exposition s’étend dans les salles de la collection permanente de l’établissement, qui abrite les objets et œuvres du XVIIIe siècle légués par le couple Marie-Louise Jaÿ et Ernest Cognacq, propriétaires du grand magasin La Samaritaine.

L’exposition explore le regard (masculin) posé sur le désir féminin : cou renversé, yeux révulsés et bouche entrouverte.

Dans La lecture de Pierre-Antoine Baudouin, un livre « qu’on ne lit que d’une main » tombe de la main d’une jeune aristocrate assise devant un bureau couvert d’ouvrages d’étude.

« Le peintre a allié la question de la jouissance et de l’érudition », analyse la commissaire Annick Lemoine, « en réponse aux moralistes qui estimaient que la lecture pouvait être dangereuse pour les âmes sensibles ».

Le circuit s’achève par une petite pièce consacrée aux objets pornographiques qui circulaient « sous le manteau », pour « rappeler que la quête hédoniste du plaisir des libertins a amené à des violences, particulièrement pour les jeunes femmes ».

Dans des couleurs froides, une esquisse préparatoire de Jean-Baptiste Greuze, en vue du tableau La cruche cassée : une jeune fille au visage « perdu, vide », la tenue dérangée et la coiffure en partie défaite.

Le tableau « n’a d’autre sens qu’évoquer la violence qui a eu lieu », interprète la commissaire, alors qu’apparaît, derrière la jeune fille, la statue d’un lion au visage humain.

L’exposition L’Empire des sens a ouvert le 19 mai et dure jusqu’au 18 juillet.

Nicolas BOVE/AFP

Il fallait autrefois pénétrer dans un boudoir, une « petite maison » hors des villes ou un bordel pour les voir : aujourd’hui, ces peintures licencieuses d’artistes du XVIIIe siècle – dont Boucher et Fragonard – sont exposées au musée Cognacq-Jay à Paris.« Nous avons sélectionné des œuvres extrêmement osées, des compositions secrètes, licencieuses et...

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