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Moyen-Orient - Éclairage

En Irak, Kazimi perd une nouvelle manche contre les milices

La libération de Kassem Mousleh, commandant au sein des Forces de mobilisation populaire accusé de l’assassinat de l’activiste Ehab el-Ouazni, souligne à nouveau l’impuissance des autorités face à l’impunité dont bénéficient les factions armées pro-Téhéran dans le pays.

En Irak, Kazimi perd une nouvelle manche contre les milices

Kassem Mousleh, commandant au sein des Forces de mobilisation populaire (PMF), après avoir été libéré à Kerbala, en Irak, le 9 juin 2021. Photo Reuters

Il a été arrêté le 22 mai ; relâché le 9 juin. Kassem Mousleh, commandant des opérations de la coalition paramilitaire du Hachd al-Chaabi (PMF) dans la province d’al-Anbar, à l’ouest de l’Irak, et figure de proue de la brigade al-Tofuf, soutenue par l’Iran, a été remis en liberté mercredi matin. Alors qu’il est soupçonné d’avoir orchestré le meurtre du militant coordinateur des manifestations antipouvoir à Kerbala Ehab el-Ouazni, le Conseil suprême de la magistrature a établi qu’il « n’était pas en Irak au moment de l’assassinat » et ne pas avoir obtenu de « preuve de son implication ». Cette libération a coïncidé avec l’arrivée à Bagdad le même jour du général Esmaïl Qaani, chef de l’unité al-Qods au sein des gardiens de la révolution iranienne, pour discuter des tensions entre le gouvernement irakien et les PMF, largement liées à Téhéran. L’arrestation de M. Mousleh avait ainsi donné lieu à l’encerclement du bureau du Premier ministre Moustafa Kazimi à l’intérieur de la zone verte et au déploiement des forces de sécurité irakiennes et du service d’élite de lutte contre le terrorisme pour protéger le gouvernement et les missions diplomatiques. Une séquence courte qui, en peu de jours, témoigne à la fois de la volonté de Moustafa Kazimi d’en découdre avec la toute-puissance des factions armées pro-Téhéran dans le pays... et son incapacité à le faire tant elles ont tissé leur toile dans toutes les institutions étatiques. « Il est peu probable que M. Kazimi ou ses successeurs parviennent à maîtriser ces milices. Elles sont déjà devenues un État dans l’État avec ses propres règles, armes, financement et leadership », résume Randa Slim, chercheuse et directrice du Conflict Resolution and Track II Dialogues Program au sein du Middle East Institute. « Comment est-ce que le chef des services de renseignements, qui détient beaucoup d’informations au sujet des milices en Irak, peut ne pas savoir comment traiter avec elles ? » s’interroge de son côté Ruba Ali el-Hassani, sociologue juridique et chercheuse non résidente au Tahrir Institute for Middle East Policy. « Ce qui l’affaiblit est le fait que lui et ses prédécesseurs ont permis aux milices de repousser les limites de leur belligérance. Ce faisant, ils ont brouillé les lignes où ils détiennent un certain contrôle. Par conséquent, ce que nous avons, c’est une élite politique qui est à la fois impliquée tout en ayant perdu le contrôle du mastodonte qu’est le réseau des milices. »

Politisé et corrompu

La libération de Kassem Mousleh est à l’image de la faiblesse du gouvernement pour répondre aux demandes des contestataires irakiens réclamant que lumière soit faite sur les dizaines d’assassinats et les centaines d’enlèvements d’activistes et de manifestants ayant été perpétrés depuis le déclenchement du soulèvement populaire d’octobre 2019 contre la corruption endémique et la mainmise de puissances étrangères sur le pays, à commencer par celle de la République islamique voisine. Selon un article du Washington Post datant de mercredi, le gouvernement irakien n’a jamais pu prouver clairement qu’il détenait M. Mousleh tout au long de son arrestation, au point de susciter des rumeurs relatives à son transfert au domicile de Faleh el-Fayad, commandant du Hachd, le temps que des accords en vue de son relâchement soient conclus, sous la pression notamment du président du Conseil suprême de la magistrature, Faeq Zaidan, proche des PMF. « Lundi, le dossier était traité par un juge associé aux Forces de mobilisation populaire, selon des responsables judiciaires », précise le quotidien américain.

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Le dénouement paraît pour le moins encombrant du point de vue du Premier ministre qui voit sa démonstration de force pour limiter l’impunité dont bénéficient les milices réduite en lambeaux, à l’heure où son gouvernement subit des pressions de la part des responsables américains pour freiner les attaques de groupes armés liés à l’Iran contre les troupes et les intérêts de Washington dans le pays et tandis que les discussions techniques entre les États-Unis et Bagdad autour du retrait américain d’Irak sont entamées depuis le lancement du dialogue stratégique. La démarche de M. Kazimi a été accueillie par un magistral pied de nez avec la libération d’un commandant reçu en héros par ses partisans. « Chaque démonstration de force qui se termine par un échec dans la condamnation ajoute une entaille de plus à la crédibilité et à la confiance dans le Premier ministre et dans les autorités de l’État », commente Randa Slim. « La cote d’approbation de Moustafa Kazimi est déjà basse. Ce dernier fiasco va l’abattre encore plus. Plus important encore, cela va enhardir les milices qui ont maintenant le sentiment que la primauté du droit ne s’applique pas à elles », ajoute-t-elle. C’est en tout cas ce qui semble ressortir des déclarations officielles des PMF après la libération de M. Mousleh. Saad el-Saadi, responsable de la coalition paramilitaire dans la ville sainte de Kerbala, là où est tombé Ehab el-Ouazni, s’est ainsi réjoui d’« une victoire de plus pour le Hachd contre ceux qui le visent d’ici et de l’étranger ».

L’arrestation puis la libération de Kassem Mousleh – malgré les demandes des enquêteurs du gouvernement pour prolonger le processus d’investigation afin de recueillir les preuves nécessaires – et les circonstances troubles de sa détention sont emblématiques des failles d’un système judiciaire rongé par les pots-de-vin et la peur. « Tant que l’État ne pourra pas empêcher les juges de payer un prix personnel, parfois de leur propre vie, pour avoir inculpé ces membres de milices, les juges trouveront des failles pour les libérer », souligne Randa Slim. « Le judiciaire est politisé et corrompu. Et quand il ne l’est pas, il est intimidé. Cela varie entre les différents niveaux du pouvoir judiciaire », note pour sa part Ruba Ali el-Hassani. « Faeq Zaidan a déjà été vu dans des images médiatisées rencontrant des responsables iraniens en visite en Irak. Pourquoi le ministre des Affaires étrangères d’un pays voisin rencontre-t-il un membre très haut placé de la justice irakienne et le chef de ce qui est censé être un organe indépendant et apolitique ? »

Il a été arrêté le 22 mai ; relâché le 9 juin. Kassem Mousleh, commandant des opérations de la coalition paramilitaire du Hachd al-Chaabi (PMF) dans la province d’al-Anbar, à l’ouest de l’Irak, et figure de proue de la brigade al-Tofuf, soutenue par l’Iran, a été remis en liberté mercredi matin. Alors qu’il est soupçonné d’avoir orchestré le meurtre du militant...

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Pour que survive sa doctrine a barak hussein obama

Gaby SIOUFI

10 h 41, le 11 juin 2021

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  • Pour que survive sa doctrine a barak hussein obama

    Gaby SIOUFI

    10 h 41, le 11 juin 2021

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